La République démocratique du Congo a récemment levé le moratoire sur la peine de mort, en vigueur depuis 2003. Cette décision, entérinée en mars 2024, s’inscrit dans un contexte marqué par l’agression du pays par le Rwanda à travers le M23 et une montée de la violence urbaine.
Lors d’un briefing de presse tenu le lundi 6 janvier 2024, le ministre d’État en charge de la Justice, Constant Mutamba, a défendu cette mesure, estimant qu’elle répond aux réalités sécuritaires du pays.
« Nous ne devons pas tout copier de l’Occident. Lorsque la France abolit la peine de mort, devrions-nous suivre aveuglément ? Ces débats entre abolitionnistes et rétentionnistes sont parfois stériles et ne tiennent pas compte de nos réalités. Nous sommes un pays agressé, un pays en guerre. Certains de nos compatriotes, occupant de hautes fonctions, ont trahi la nation. Face à cela, il ne s’agit pas de faire plaisir aux ONG des droits de l’homme, mais de répondre aux impératifs de sécurité nationale », a déclaré le ministre.
Constant Mutamba a comparé la situation de la RDC à celle des États-Unis, où la peine de mort est toujours appliquée dans plusieurs États fédérés.
« Aux États-Unis, première puissance mondiale, la peine de mort est encore en vigueur. Cela signifie-t-il l’absence des droits de l’homme ? Pourquoi, lorsqu’il s’agit de la RDC, des critiques s’élèvent-elles pour des mesures pourtant similaires ? Nous devons nous assumer en tant que peuple et régler nos problèmes selon nos propres réalités, notamment face au phénomène des "Kulunas" qui est une menace réelle », a-t-il affirmé.
Le ministre a également souligné les risques de transposer aveuglément des pratiques étrangères en RDC, citant le cas d’Haïti, où l’absence de mesures répressives a conduit à une situation chaotique nécessitant une intervention étrangère pour sécuriser la capitale.
« Nous ne voulons pas subir le sort d’Haïti. En RDC, les règles doivent être adaptées à nos us, coutumes et réalités. Ce n’est ni une avancée ni un recul, mais une mesure destinée à renforcer la sécurité de notre peuple », a-t-il insisté.
Le Conseil Supérieur de la Défense, lors d’une réunion élargie aux membres du gouvernement et présidée par le chef de l’État Félix Tshisekedi le 5 février 2024, avait recommandé la levée du moratoire sur la peine de mort pour les cas de trahison au sein des Forces de défense et de sécurité. Cette mesure vise également à endiguer la recrudescence des actes de banditisme et de terrorisme dans les grandes villes du pays.
Après validation en Conseil des ministres, une circulaire signée par Rose Mutombo, ministre d’État en charge de la Justice, a officialisé cette décision. Selon ce document, l’objectif est de « débarrasser l’armée des traîtres et de freiner la recrudescence des actes de criminalité entraînant des pertes en vies humaines ».
Dans les provinces de l’Est, notamment au Nord-Kivu, la situation sécuritaire reste volatile, marquée par des affrontements entre la coalition FARDC-Wazalendo et les rebelles du M23 soutenus par le régime rwandais. Pour Constant Mutamba, la levée du moratoire s’inscrit dans une stratégie globale de lutte contre l’insécurité et de restauration de l’autorité de l’État.
« La priorité du gouvernement est de protéger ses citoyens et d’assurer un minimum de sécurité. La reprise de l’exécution de la peine de mort est une réponse pragmatique aux défis sécuritaires actuels », a-t-il conclu.
Clément MUAMBA