Normes sociales et inégalités en RDC: les femmes face aux défis de l'autonomisation économique

Photo/ Droits tiers
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Le travail domestique, souvent considéré comme une tâche naturelle et gratuite, représente une part considérable du travail effectué au sein des ménages congolais par les femmes, note Vincent Bauna, sociologue et spécialiste de questions de genre. Pourtant, poursuit-il, la contribution économique des femmes au sein des ménages est rarement reconnue et valorisée. Pour mieux comprendre les enjeux liés à cette invisibilisation, il a accordé un entretien ce lundi 26 août 2024 au Desk Femme d'Actualité.cd

Selon le sociologue, les représentations sociales du travail domestique en RDC sont fortement marquées par les normes culturelles et les rôles de genre traditionnellement attribués aux femmes. 

"La femme est souvent perçue comme la gardienne du foyer, responsable de toutes les tâches ménagères et de l'éducation des enfants. Ce rôle est tellement ancré dans les mentalités qu'il est difficile de le remettre en question", explique-t-il. 

"Ces représentations ont pour conséquence de dévaloriser le travail domestique, le considérant comme une activité secondaire par rapport aux activités rémunérées. Cette invisibilisation a un impact direct sur la reconnaissance de la contribution économique des femmes au sein du ménage"

Parmi les obstacles socio-culturels qui entravent l'autonomisation économique des femmes en RDC, Vincent Bauna cite: 

-Le manque de reconnaissance sociale : le travail domestique n'est pas reconnu comme un travail à part entière, ce qui limite les possibilités d'accès aux droits sociaux, aux services et à sa valorisation économique  

- ⁠Le manque d'accès à l'éducation et à la formation professionnelle : les femmes ménagères ont souvent moins de possibilités de se former et d'acquérir les compétences nécessaires. Elles ont souvent un niveau d'éducation inférieur à celui des hommes, ce qui restreint leurs possibilités d'accéder à des emplois qualifiés

 - ⁠Les contraintes liées à la charge familiale : les femmes sont souvent surchargées de tâches ménagères et familiales, ce qui limite leur temps et leur énergie pour se consacrer à des activités génératrices des revenus 

- ⁠Les inégalités liées au partage des tâches domestiques : les hommes participent peu aux tâches ménagères, ce qui renforce la dépendance économique des femmes 

Pour faire face à cette situation , le sociologue appelle à repenser les rôles de genre et à valoriser le travail domestique. 

" Il faut reconnaître cette contribution économique des femmes et leur donner les moyens de s'autonomiser financièrement. Cela passe par des politiques publiques qui favorisent l'égalité entre les hommes et les femmes, la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, ainsi que l'accès des femmes à l'éducation et à la formation", souligne-t-il. 

"Il faut sensibiliser également l'opinion publique à l'importance du travail domestique et à la contribution économique des femmes. Mais aussi mettre en place des politiques publiques qui permettent aux femmes ménagères d'accéder à l'autonomisation économique", a-t-il conclu. 

Nancy Clémence Tshimueneka