Dégradation de la situation autour de Goma: Depuis le début de l'année, MSF a déjà recensé plus de 20 incidents de tirs d’obus autour des camps de déplacés

Le site des déplacés de Kanyaruchinya à Nyiragongo
Le site des déplacés de Kanyaruchinya à Nyiragongo

Depuis le mois de février de l’année 2024, les camps des déplacés autour de Goma ont enregistré des tirs d’artillerie lourde venus de la ligne de front où les FARC et le M23 s'affrontent. Des dizaines de morts ont été enregistrées et une cinquantaine de blessés. Médecins sans frontières (MSF) précise qu’à Goma, les personnes déplacées se retrouvent dans une situation similaire à celle qu’ils avaient initialement fui. Elles sont dans l’insécurité la plus totale et n'ont plus aucune échappatoire. 

D’après les Nations unies, au moins 18 civils, en majorité des femmes et des enfants, sont décédés et 32 autres ont été blessés lors de bombardements touchant plusieurs sites de déplacés au cours de la seule matinée du 3 mai. Ces chiffres sont inférieurs à ceux présentés par le gouvernement: 35 morts et 37 blessés. « Les camps de déplacés doivent être respectés par toutes les parties au conflit et les combats doivent cesser à proximité », indique MSF.

Avec un nombre le plus élevé de déplacés internes en Afrique, la RDC connaît un contexte d’insécurité atroce dans sa partie est avec des conditions de vie hautement précaires. « Les personnes déplacées vivent dans des camps densément peuplés, aux conditions sanitaires déplorables, sans accès adéquat à l'hygiène, dans des abris faits de bâches en plastique, sur des sols jonchés de pierres volcaniques. L’accès à l’eau potable et à la nourriture est très difficile et aléatoire », souligne MSF.

Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, étant une ville stratégique, se retrouve encerclée par plusieurs lignes de front avec autour d’un million de déplacés et deux millions d’habitants, dans un territoire restreint. Par conséquent, la concentration de porteurs d'armes à l’intérieur et autour des camps et le rapprochement des positions militaires à proximité immédiate des personnes déplacées a entraîné une augmentation généralisée du niveau de violences.

« Les civils sont pris en étau entre les différents groupes armés, blessés ou tués dans des tirs croisés, victimes de la criminalité et plus particulièrement de violences sexuelles », note MSF.

Dans le Nord et le Sud-Kivu, les équipes de MSF travaillent dans un contexte sécuritaire volatile avec des difficultés de déplacement, d'acheminement de l’aide humanitaire et un accès incertain aux centres de santé. Malgré la nature médicale et humanitaire de leur réponse à cette crise, le personnel de MSF n'a pas été épargné par les actes d'intimidation d'hommes armés.

Marie Brun, coordinatrice d’urgence pour Médecins Sans Frontières à Goma, dans la province du Nord-Kivu, en RDC, témoigne que malgré tout, leurs équipes prennent en charge quelques blessés.

« Depuis le début de l’année, nous avons recensé 24 incidents impliquant des tirs d’obus à l’intérieur ou autour des camps où nous travaillons et les équipes de MSF ont reçu 101 blessés légers, dont 70% de civils à l’hôpital de Kyeshero, transférés par le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) qui prend en charge les patients blessés par arme les plus graves », témoigne-t-elle.

À plusieurs reprises, MSF a été obligé de suspendre ses activités à cause notamment d’affrontements à proximité des camps de Goma, à Kibirizi, à Bambo et aux alentours de Minova. La route qui mène du Sud-Kivu vers Goma est actuellement bloquée à cause des combats et l’approvisionnement ne peut se faire que par bateau depuis le lac Kivu ou par moto. Les affrontements compliquent également l’approvisionnement depuis Goma des zones plus périphériques où les combats font également rage.

Emmanuel Kuzamba