L'actualité de la semaine vue par Martine Kanyiki

Photo/ Droits tiers
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Du processus électoral en RDC à la suspension du contrôle routier à Kinshasa en passant par le départ entamé de la force de l'EAC dans l'Est du pays, la semaine qui vient de s'achever a été riche au niveau de l'actualité. Retour sur chacun de ces faits marquants avec Martine Kanyiki

Madame Martine Kanyiki, Merci de nous accorder de votre temps. Pouvez-vous nous parler de vous ?

Martine Kanyiki Je suis licenciée en Gestion des Ressources Humaines de l'Université de Kinshasa, gérante du restaurant "Forêt Muma" situé sur le campus de l'UNIKIN, et candidate municipale numéro 340 dans la commune de Matete.

À deux semaines des scrutins, la CENI sollicite du gouvernement 4 Antonov, 10 hélicoptères pour le déploiement du matériel, et 170 millions USD pour parachever le financement des opérations. Pensez-vous que ceci pourrait laisser croire à un report des élections.

Martine Kanyiki Certes, la CENI rencontre quelques difficultés logistiques, mais jusqu'à preuve du contraire, le gouvernement et la CENI ont suffisamment montré la volonté d'organiser les élections dans le délai constitutionnel. Je reste convaincu que le gouvernement trouvera les voies et moyens pour apporter les matériels demandés par la CENI pour que les scrutins se tiennent le 20 décembre comme prévu par la constitution.

En campagne électorale à Kananga, Adolphe Muzito, candidat président, se dit ouvert à un report des élections de 1 à 3 mois. Comment jugez-vous cette attitude ?

Martine Kanyiki : cette déclaration peut être imputée à la peur de l'échec. En plus, j'ai l'impression qu'il a fait cette déclaration juste pour braquer les projecteurs sur lui-même. La CENI tient au respect de la constitution. Que Muzito se concentre sur sa campagne et nous épargne des situations où toutes les institutions seront hors mandat.

Toujours dans le chapitre des élections, comment trouvez-vous les discours des candidats et communicants de l'USN autour de la nationalité de Moise Katumbi à quelques jours de la tenue de ces scrutins ?

Martine Kanyiki : c'est juste une bataille électorale. Pendant cette période, chaque camp cherche la moindre faiblesse de son adversaire pour pouvoir l'exploiter et montrer qu'il n'est pas un bon candidat pour le peuple. Cependant, il faut reconnaître que la question de la nationalité de Moise Katumbi demeure une épine dans le dos du candidat N°3 à la présidentielle. Il y a tellement de choses qui se racontent autour de sa nationalité qu'il sera difficile pour lui d'effacer cette tâche sur son parcours.

Delly Sesanga s'est finalement désisté lui aussi de la course à la présidentielle en faveur de Katumbi. Pour vous, ce désistement pourrait augmenter les chances de Moise Katumbi à remporter les élections ?

Martine Kanyiki : ce désistement n'apporte rien de consistant au camp de Moise Katumbi. Delly Sesanga est un ancien député qui, malheureusement, n'a pas suffisamment d'électeurs derrière lui. Il n'a pas une assise politique nationale, en plus, c'est un leader de moins de l'espace Kasaï, une région électorale où il sera difficile de battre Félix Tshisekedi étant donné que c'est son fief électoral.

Lundi 04 décembre, c'était le lancement de la campagne pour les conseillers municipaux. Comment l'avez-vous vécu ?

Martine Kanyiki La campagne reste timide. Il faut noter que c'est la première fois que les élections se tiennent jusqu'au niveau municipal. En tant que candidate conseillère, j'essaie de faire la ronde de la commune avec mon équipe pour parler aux électeurs et leur présenter mon offre politique.

Depuis le départ entamé de l'EAC, les combats ne cessent de s'intensifier dans l'Est, alertent les sources locales. Pensez-vous que ce départ à quelques jours des élections valait la peine ?

Martine Kanyiki : Les troupes de l'EAC ont passé plusieurs jours en RDC sans nous apporter le résultat espéré, c'est-à-dire, le retour de la paix, le cantonnement des terroristes du M23. Il est temps que ces troupes quittent notre pays. Ces attaques ne sont qu'une diversion et une preuve de plus que ces troupes étaient de mèche avec les terroristes. C'est une manière pour eux de nous montrer qu'elles servaient à quelque chose alors que tout ce temps ils étaient en cohabitation avec le M23 sans jamais les inquiéter.

Les troupes de la SADC en remplacement de l'EAC sont attendues dans l'EST vers le 10 décembre. Selon vous, la SADC pourrait aider à stopper le conflit et permettre aux électeurs de l'Est d'exercer leur droit le 20 décembre ?

Martine Kanyiki : je pense que la SADC reste un partenaire fiable. Il est difficile de prédire avec exactitude le temps que peut prendre une guerre, mais je fais confiance à l'engagement des troupes de la SADC pour combattre les terroristes, contrairement à l'EAC qui était devenu un observateur de plus de notre calvaire aux côtés de la MONUSCO.

Le 10 décembre, c'est la Journée internationale des droits de l'homme. Selon vous, peut-on dire que la lutte contre les violences faites à la femme a atteint des avancées significatives ?

Martine Kanyiki Il y a quelques avancées dans la lutte contre les violations des Droits de l'Homme en RDC. La récente promulgation de la loi portant protection des défenseurs des droits de l'Homme en est une preuve. Cependant, le chemin reste long, car un bon nombre de Congolais reste ignorant de leurs droits, même les plus fondamentaux. Il faut multiplier les campagnes pour sensibiliser le peuple sur leurs droits et savoir défendre ses droits lorsqu'ils sont violés.

La COP 28 a démarré le 30 novembre à Dubaï. Que peut-on attendre de la RDC, durant ces Assises, comme pays solution dans la lutte contre le réchauffement climatique et comment doit-elle s'y prendre pour jouer pleinement ce rôle ?

Martine Kanyiki La RDC reste un pays solution à la crise climatique étant donné l'immensité de ses forêts. Cette COP est une occasion de plus pour la RDC de faire du lobbying auprès des partenaires pour obtenir des compensations financières en contrepartie du rôle que jouent nos forêts dans la lutte contre le changement climatique.

Dans un communiqué rendu public jeudi 07 décembre, le Ministre congolais des transports a suspendu jusqu'à nouvel ordre le contrôle routier à Kinshasa. Comment trouvez-vous cette décision durant cette période des festivités de fin d'année ?

Martine Kanyiki Je pense que cette décision entre dans le cadre des mesures d'apaisement pour éviter des tracasseries routières pendant cette période qui cumule les élections générales et les festivités de fin d'année. Cependant, il faudra que la police renforce la sécurité pour éviter que les gens mal intentionnés n'en profitent pour circuler librement et commettre des crimes. Et la police de circulation routière doit vraiment bien faire son travail pour réduire les embouteillages que ceci pourrait créer afin de faciliter la circulation.

Selon une enquête menée par Target Sarl, sur le moyen de transport en RDC, il révèle que 64 % des personnes interrogées ont déjà connu un accident de moto, 36 % disent avoir des proches victimes de ce type d'accident, et 47 % ont déjà perdu des proches à cause des accidents de moto. Qu'est-ce qui justifie selon cette augmentation des motos comme moyen de transport en commun à Kinshasa ? Et comment peut-on limiter ou réduire ces accidents ?

Martine Kanyiki: La florescence des motos comme moyen de transport est justifiée par les embouteillages que nous connaissons dans la ville et l’état de nos routes.  Dans ces situations, la moto reste une solution pour circuler vite et dans des lieux où les véhicules ne peuvent pas accéder. Malheureusement, plusieurs conducteurs de motos circulent en violation des codes de la route et la plupart sont des jeunes qui, à force de ne pas trouver du travail, se sont réfugiés dans la conduite de la moto pour subvenir à leurs besoins. Certains n'ont même pas étudié. Il y a lieu que le gouvernement trouve un moyen de réguler ce secteur pour identifier chaque conducteur et se rassurer que tout celui qui conduit une moto a les facultés mentales et physiques requises pour ne pas mettre en danger la vie des passagers.

Selon un sondage rendu public par RFI, depuis le début de l'année, des dizaines de milliers de migrants sont partis des côtes sénégalaises pour rejoindre l'archipel espagnol des Canaries. Comment trouvez-vous cette démarche des jeunes Africains qui quittent leur pays pour rejoindre l'Europe ?

Martine Kanyiki : Les pays africains n'offrent pas assez d'opportunités aux jeunes pour leur épanouissement. Dans le désir de trouver un meilleur cadre qui puisse les aider à sortir de la pauvreté, ils prennent malheureusement de gros risques en voulant rejoindre l'Europe, parfois par des moyens très dangereux. Il est temps que les dirigeants travaillent suffisamment pour vaincre la pauvreté et offrir aux jeunes Africains les conditions minimales pour s'épanouir.

Les Etats-Unis ont annoncé mardi 5 décembre des sanctions contre les colons israéliens extrémistes accusés d'attaques envers des Palestiniens, pour tenter d'enrayer les violences en Cisjordanie occupée Pensez-vous qu'avec ces sanctions la situation sur le conflit en Israël pourra s'apaiser ?

Martine Kanyiki : Je pense que les sanctions ne sont pas du tout un moyen efficace pour résoudre ce conflit. Il suffit de voir la situation russo-ukrainienne pour se rendre compte que les sanctions de l'UE et des USA contre la Russie n'ont pas aidé à mettre fin à la guerre. Il y a lieu que les dirigeants et acteurs impliqués dans cette guerre comprennent la nécessité de dialoguer pour trouver rapidement une solution qui puisse satisfaire chaque camp et ramener rapidement la paix.

Propos recueillis par Nancy Clémence Tshimueneka