Parution du livre “Le carnet de Christian Gombo”: de la littérature mélangée à l’humour sur l’actualité politico-sociale congolaise

Carnet
Ph. ACTUALITE.CD

Ce n’est pas du journalisme, insistait-on au vernissage du livre “Le carnet de Christian Gombo”, dimanche 9 avril, à l’académie des beaux-arts. Et cela, à juste titre car ce bouquin est le résultat de plus de 600 textes sur l’actualité, dits carnets publiés dans un site d’informations pour soupeser l’actualité quotidienne. Un tri subjectif a été fait par l’auteur pour sélectionner ceux qui figurent dans le livre et en plus, il a rajouté une discussion entre deux personnages qui a émaillé le livre jusqu’à la fin.

L’auteur n’est personne d’autre que celui dont le nom figure dans le titre de l’ouvrage, Christian Gombo. Il a accordé une interview à ACTUALITÉ.CD au sujet de ce nouveau livre dans son répertoire après “Les maladies textuellement transmissibles”, en 2019. A quoi s’attendre en lisant ce livre ? Ou s’en procurer ? Pourquoi acheter ce livre ? Quel apport dans la quête identitaire à la congolaise ? Des questions auxquelles l’auteur répond.

ACTUALITÉ.CD : Trois ou quatre ans d’écriture, c’est l’aboutissement d’un long processus qui a dépassé plusieurs périodes. Y-a-t-il un ouf de soulagement en publiant le livre ?

Christian Gombo : Ouf de soulagement, pas tellement parce que le travail continue. Ce qui est publié est une sélection de plusieurs chroniques que j'ai estimées meilleures. C'était un peu subjectif parce que sûrement, il y a des chroniques que beaucoup auraient aimé voir qui n'ont pas pu être reprises. Sinon, c'est toujours un plaisir de voir ce projet être matérialisé. Ça fait toujours plaisir.

Est-ce que c’est une manière de dire au monde littéraire que vous êtes de retour dans l’écriture en plus de vous avoir été illustré beaucoup plus dans la vente ou l’édition des livres ces dernières années ?

Oui ! Parce que ça date de ma dernière publication. Peut-être, y’aura-t-il très prochainement mon roman en lingala “Bolingo eza na buzoba” qui va être réédité aux éditions Mabiki, dans la collection “Sene Mongaba”. C'est un peu comme une année de retour parce qu'après, il y aura d'autres projets qui, pendant un long moment, étaient en train d'être travaillés et ça va bientôt apparaître. Je pense à “Parole de ma chatte” et pourquoi pas un nouveau roman en lingala “Ba fibaka lisu te”. Il y aura deux ou trois textes qui vont apparaître après un long moment de repos, de lecture, d'apprentissage et on est prêt pour les nouvelles aventures en termes de publication.

Vous publiez déjà quotidiennement ces carnets sur les réseaux sociaux et sur le site de Sahuti Africa. Est-ce qu’il y a du nouveau dans ce livre qui n’a pas été déjà lu par les gens depuis 2019 ?

Je n'ai pas seulement fait un placement de plusieurs chroniques littéraires. L’originalité de ce livre est que je crée une fiction dans laquelle j’oppose deux parties de moi. Je pose clairement des problèmes d'identité nationale qui nous font tous souffrir. Je pose, à cet effet, deux personnages : il y a Christian Gombo d'un côté qui est cette évolué que nous sommes devenus, parce que de fois on fait les choses comme les occidentaux nous ont montré, même si on fait semblant tout nous oblige à faire ça.

Et de l'autre partie, c'est Gombo Tomokwabini, qui est panafricaniste, qui essaie de conserver ce qui nous reste comme culture et qui essaie un peu de nous ramener à la source de notre origine. Ce sont ces deux facettes de moi qui sont un peu les facettes de tout le monde. C'est un combat quotidien que nous menons entre notre existence véritable et notre existence de facette que nous voulons essayer à chaque fois d'éteindre.

Cette conversation entre deux personnages qui sont vous-même, ajoutée à la kinoiserie qui est dans le texte, c'est comme cela que s'explique le côté identitaire que vous revendiquez ?

Je ne sais pas écrire des choses que je ne vis pas. Je suis kinois, j’évite de dire de père et de mère, mais en tant que tel, il y a une façon de parler qui est propre à Kinshasa, il y a une façon de communiquer qui est propre et c’est ce langage là que j'utilise pour parler en tant que Kinois. Mais n'empêche même en tant que Kinois, on est face à ces deux évidences là, bien qu'il y a un côté panafricain qui nous réclame et de l'autre côté, notre être intérieur qui nous réclame aussi et chaque jour nous sommes dans un combat entre les deux parties.

Le livre se termine par un dialogue final où on ne sait pas qui a gagné et qui a perdu. Mais l'essentiel, c'est que les questions ont été posées. J'aime beaucoup ce que Tata N’longi Biatitudes aime souvent dire : “Parfois, les questions sont plus importantes que les réponses”. J’ai posé le questionnement sur le recours à l'authenticité de Mobutu, j'ai posé tant de questions sur notre façon de vivre en mode occidentale, si c'est bien ou pas, et ça sera à chacun d'essayer de répondre par rapport à ses réalités.

Pour un lecteur qui veut acheter le livre, que lui diriez-vous pour qu'il l’achète, à quoi peut-il s'attendre ?

Ce livre a beaucoup de poésie, il y a aussi beaucoup d’humour. Il y a une façon de vivre avec la légèreté certaines choses graves de notre pays, j'essaie de le rendre très amusant. C'est une façon de découvrir un peu la mentalité de tout un peuple, la façon de vivre de toute une population et l'humour à fond de ce livre. En tout, c'est quelque chose que les gens doivent forcément découvrir.

Est-ce que ce livre est la meilleure œuvre de ta carrière ?

La meilleure œuvre, moi-même je ne sais pas si j'en ai, mais ce qui est sûr est que, je suis toujours sur un livre que j'écris depuis des années, le titre c'est “Paroles de ma chatte”. J'ai toujours cru que ça serait mon livre fondamental ou mon livre le plus important, je travaille dessus depuis 15 ans. De toute façon, meilleur ou pas, c'est le temps qui le dira, les critiques ou les lecteurs pourront classifier le travail fait. Je laisse le jugement à d'autres personnes, moi je ne sais.

La chronique dans le monde littéraire congolais, comment la regardez ? Parce qu'on va se le dire qu’elle n’est pas trop présente.

Au début, je pouvais choisir la voie de la facilité. Ça aurait été d’étaler juste les différentes chroniques, mais moi je suis un artiste, c'est peut-être pour ça que je n'aime pas les choses faciles et j'ai choisi de créer une fiction autour de ces chroniques là. C'est une fiction sur l'auto dérision. Les politiques, les députés, les sénateurs, ce sont des gens qui, du matin au soir, se moquent un peu de nous sans le dire avec beaucoup de sérieux, et j'essaie un peu de copier leur modèle en ironisant sur mon être, en ironisant sur ma vie.

En parlant de titre de votre ouvrage, c'est le carnet de Christian Gombo. Tout en sachant que bien avant, vous avez publié la fable de Christian Gombo. Vous aimez bien vous mettre en avant, déjà dès le titre, on sait qu’il s’agit de Christian Gombo ?

Le carnet de Christian Gombo est devenu une marque déposée du site Sahuti Africa. C'est pour ça que je ne savais pas mettre mon nom dans la couverture, j'ai utilisé un surnom pour illustrer, mais ce n'est pas tellement à une exposition de ma propre personne d'abord que je pense. Au début, c'était des choses que j'entretenais, que j'écrivais pour moi-même en privé, à un moment j'ai ressenti le besoin de commencer à les mettre sur Facebook et c'est là que je vais me faire remarquer et je serai recommandé à Sahuti Africa par un ami qui avait l'habitude de lire ce que j'écrivais.

Vous êtes aussi libraire, vous vendez des livres. Est-ce que dans votre travail de populariser les livres des auteurs congolais, vous avez déjà vendu des livres de chronique ou de carnet d'autres auteurs congolais en dehors de vous-même ?

Il y a un moment nous avons vendu des Actu-poésie de Pat Le Gourou. Dans la même logique aussi il traite un peu de l'actualité congolaise, avec des vers classiques, sous forme de poème. Sinon, nous ne sommes pas fermés, les personnes qui nous contactent pour la vente de leurs ouvrages, nous les recevons, et c'est un métier qu'on fait avec beaucoup de joies et beaucoup de plaisirs.

Où peut-on se procurer Le carnet de Christian Gombo ?

Il est livrable partout à Kinshasa, il suffit de contacter la structure LAESH qui a un compte Facebook, qui a une adresse mail et peut-être aussi de me contacter directement. Et d'ici-là, le livre sera disponible à Mbuji-mayi et à Matadi, où  nous irons le présenter dans le cadre du Salon du Livre du Kongo-Central. Je pense que cette année, nous serons aussi au Festival du Livre et de la Bible pour les gens qui pourront trouver notre carnet, mais sinon les livres sont livrables partout à Kinshasa au prix de 20$.

Y-aura-t-il un autre carnet ?

Naturellement oui, parce que je continue à créer des carnets. L'actualité continue, moi aussi je continue d'écrire et d'ailleurs j'ai pris un long retard comme je devais me concentrer sur la publication de ce livre. Ça fait un moment que je n'ai pas écrit mais, je me remets bientôt au travail pour continuer à égayer les gens de faire ce travail qui me passionne.

Propos recueillis par Emmanuel Kuzamba