L'arrêt « triangle », situé sur la route By pass entre les communes de Lemba, Makala et Mont-Ngafula dans la ville de Kinshasa est devenu, depuis un certain temps, l'épicentre des accidents spectaculaires. Le dernier en date, est celui enregistré ce lundi 6 septembre, faisant trois morts et plusieurs blessés. Bien avant, soit au mars de l'année en cours, un autre accident beaucoup plus grave s’y était déjà produit. On a compté plusieurs morts selon les habitants sur place. Ce n’est pas tout. Le 17 février 2020, toujours au même endroit, l’excès de vitesse d’un camion poids lourd, transportant des moellons, avait fait 15 morts et plusieurs blessés (bilan officiel). Il faut ajouter à cela plusieurs autres cas d’accidents qui ont été signalés à cet endroit avant 2020.
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Les usagers de cette route se disent mécontents de compter régulièrement des morts dus à ces cas d’accidents, devenus monnaie courante. Face à cette situation, ACTUALITE.CD a voulu en savoir un peu plus, en allant à la rencontre des différentes couches de la population, qui fréquentent régulièrement cette route précisément au niveau de l’arrêt Triangle.
Pamuke, une trentaine révolue, est un chauffeur de taxi-bus. En tant que tel, il est revenu sur celles qui peuvent être présentées comme causes majeures des accidents en répétition au niveau de cet arrêt de bus.
« La responsabilité est partagée. En tant que chauffeur, sans se voiler la face, la plupart d'entre nous ne respectent pas les codes de la route. Aujourd'hui, tout le monde a la facilité de se procurer un permis de conduire moyennant des relations ou avec quelques billets. La prolifération des auto-écoles est aussi à la base des plusieurs accidents car elles sortent des chauffeurs non qualifiés et délivrent des permis comme des bonbons. Particulièrement sur cette route il y a aussi un problème d'excès de vitesse », a-t-il déclaré.
L'absence des policiers de roulage sur ce tronçon
Le tronçon compris entre l’entrée Righini (Lemba) jusqu’au niveau de cité verte (Mont-Ngafula et Selembao) sur la route Bypass est dépourvu des agents de la police de circulation routière (PCR). L’arrêt Triangle se trouve sur ce tronçon-là. Selon les habitants sur place, les PCR n’arrivent là qu’en cas de problème notamment lors des accidents. Ils peuvent encore rester là un ou deux jours après l’accident avant de disparaître complètement des radars. « A mon humble avis, les autorités doivent mettre des roulages ici à l'arrêt triangle pour éviter les mauvais stationnements des chauffeurs et réguler la circulation », a recommandé Pamuke, ce chauffeur que nous avons rencontré sur place, en partance de l’UPN.
Fatou Fataki, habitante du quartier, a vécu le scénario du dernier accident. En plus de la présence des PCR sur ce tronçon, elle souhaite que soient mis en place des dos-d’âne, question d’obliger des chauffeurs à ralentir leurs courses près de cet arrêt, qui draine beaucoup de passagers et véhicules. « Ici, les chauffeurs conduisent toujours à vive allure, et ne laissent pas le temps aux piétons pour traverser. Nous demandons aux autorités de mettre les dos-d'âne ici et de mettre en permanence les roulages pour nous permettre de traverser. Aussi, les voitures ou motos stationnent sans tenir compte du danger. L'État doit trouver la solution pour éviter la répétition de cette situation car nous ne sommes pas des moutons », confie-t-elle.
Revenant sur le dernier cas d’accident, celui du lundi 6 septembre, elle a déclaré ce qui suit :
« C'était vers 9h. J'étais sur une moto venant du rond-point Ngaba. Nous nous sommes arrêtés pour déposer quelqu'un tout de près de l'arrêt triangle et soudain, j'ai vu une voiture ben de couleur rouge, marque de voiture que les compagnies chinoises utilisent pour transporter des moellons et sable. Elle venait vers Mont-Ngafula à vive allure en klaxonnant, et il y avait un motard avec 2 personnes à bord devant. Après avoir heurté la moto, elle a fini sa course en se cognant sur un véhicule qui était stationné tout près de la station Total qui se trouve à côté de l'arrêt triangle. Tout le monde était paniqué et nous nous sommes approchés du véhicule. Le chauffeur de la voiture ben était en bon état et les 3 personnes qui se trouvaient sur la moto ont connu la mort sur le champ (…) ».
Juste à 5 mètres de la chaussée, il y a là des femmes qui vendent et des maisons commerciales. « Ce qui s'est passé lundi était très difficile à supporter. Voir des gens mourir chaque semaine ici nous fait mal. L'État doit recycler les chauffeurs et surtout ceux qui conduisent des voitures de marque Ben des compagnies chinoises. L'année passée, c'était toujours la même marque de voiture qui a causé la mort de plusieurs personnes au même endroit. Et nous ne savons pas jusqu'à aujourd’hui la suite des enquêtes. On doit mettre les feux rouges ici pour résoudre ce problème tant soit peu surtout mettre l'éclairage public car la nuit aussi il y a des accidents », a expliqué une maman, vendeuse de légumes.
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Comme l’accident ne s’est produit que lundi, ce mercredi 8 septembre, nous avons eu la chance de rencontrer un policier de roulage sur place. Pour lui, la présence des PCR n’empêche toujours pas des cas d’accidents. Il rappelle plutôt les conducteurs des véhicules à la conscience.
« Vous devez comprendre que la présence des roulages n'empêche toujours pas les accidents. Nous sommes dans un pays où les chauffeurs ne veulent pas faire le contrôle technique. Notre travail se limite à contrôler les documents, à réguler la circulation et à arrêter les chauffeurs qui ne respectent pas les codes de la route. Si vous remarquez bien, la plupart des accidents qui se produisent ici sont toujours causés par l'excès de vitesse. Depuis l'arrêt courant, ils descendent à vive allure pour réduire à l'arrêt triangle. Mais parfois quand les freins lâchent même nous, nous ne pouvons rien faire », a-t-il dit.
Et d’ajouter :
« Nous sommes en pourparlers avec nos autorités pour mettre des dos-d'âne ici. Le travail a déjà commencé, il y a des dos-d'âne déjà à l'entrée cité verte et arrêt la police vers UCC et bientôt ici. Nous devons dire aux chauffeurs de conduire avec conscience, d'éviter l'alcool et de respecter les codes de la route ».
Rappelons que depuis l'accident du 17 février 2020, qui peut-être considéré comme le plus meurtrier connu sur cet endroit, aucune mesure d'encadrement n'a été prise pour que pareilles situations ne se reproduisent plus.
Jeancy Mampuya, stagiaire UPN