RDC : HRW réclame un "procès équitable", près de deux ans après le "massacre" des réfugiés burundais à Kamanyola

Procès du policier qui a tué par balle une fille de 14 ans au quartier Kyeshero ouvert au tribunal militaire de Goma/Ph Jonathan Kombi ACTUALITE.CD

L'organisation américaine de défense des droits de l'homme, Human rights Watch (HRW), a appelé à un procès "équitable", ce lundi 29 juillet, à la reprise des audiences dans le procès sur le "massacre des réfugiés burundais" le 15 septembre 2017, à Kamanyola, dans la province du Sud-Kivu.

Suspendues, fin juin, les audiences devraient reprendre ce lundi devant le tribunal militaire de Bukavu, au chef-lieu de la province. Cinq militaires et un officier de police sont poursuivis pour "meurtre et tentative de meurtre" sur des demandeurs d’asile burundais à Kamanyola.

"Un procès équitable pour le massacre de Kamanyola est capital pour la justice et pour les victimes", a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique Centrale à Human Rights Watch, pour qui les "responsables de ce carnage devraient être dûment punis et les victimes devraient recevoir des réparations adéquates."

En septembre 2017, des soldats congolais avaient ouvert le feu sur une centaine de réfugiés et demandeurs d'asile burundais qui manifestaient pour obtenir la libération de quatre des leurs, arrêtés et expulsés vers leur pays d'origine.

Au total, 39 réfugiés avaient perdu la vie et une centaine d'autres étaient blessés. Les balles avaient été tirées sur les manifestants après qu'ils avaient tué un officier des Forces armées de la RDC (FARDC), à qui ils avaient même ravi son arme.  

Des habitants de Kamanyola, en colère, avaient lapidé à mort un réfugié burundais.

"Les autorités congolaises devraient prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le procès de Kamanyola soit crédible et impartial (...) Le traitement de cette affaire est important, non seulement pour les victimes, mais aussi pour mettre fin aux atrocités de masse commises par les forces de sécurité congolaises dans tout le pays", a conclu Lewis Mudge.

Les victimes sont essentiellement des adeptes de la prophétesse d’obédience catholique, Eusébie Ngendakuma (Zeibya). Cette prophétesse controversée de 47 ans, assure avoir des visions de la Vierge Marie et anime une secte. Ses disciples reconnus pour leurs voiles blanches se considèrent comme les martyrs de la vierge et sont convaincus que la fin du monde est "proche". La prophétesse et ses disciples se disent victimes de la "persécution" de la part des autorités burundaises.

Après le massacre de Kamanyola, la plupart d'entre eux se sont réfugiés au Rwanda. Au Sud-Kivu, près de 40 survivants, témoins et membres des familles ont indiqué qu’ils étaient prêts à témoigner au tribunal. 

Les survivants de la fusillade voulaient assister au procès à Bukavu, mais craignaient d’être identifiés par les autorités burundaises. "C’est trop dangereux, et nous n’avons pas de garanties pour notre sécurité”, a indiqué à HRW, un avocat, lui-même membre de la secte.

Les survivants ont exprimé leur souhait de participer aux futures audiences si leur protection pouvait être assurée, selon l'ONG qui demande aux autorités congolaises "avec le soutien de la MONUSCO" de "prendre toutes les mesures nécessaires" pour garantir la sécurité des victimes et des témoins qui décident de témoigner.

Le gouvernement devrait enquêter sur le rôle des autorités locales dans la propagation du "discours de haine" avant le massacre et traduire en justice les responsables de "manière appropriée", insiste HRW.   

Elle remet en cause les tribunaux militaires congolais qui, selon elle, "ont un bilan contrasté" en matière d’affaires impliquant les militaires accusés de crimes graves.

Christine Tshibuyi