C’était assez attendu dans les salons huppés de Kinshasa bien avant le tragique événement dont a été victime le député national Chérubin Okende. Sans surprise, dira-t-on donc, la mise à l’écart de Monsieur Hervé Mbelu, AG sortant de l’Agence nationale de renseignements, et de Monsieur Jean-Claude Bukassa, il y a peu encore conseiller spécial a.i. du chef de l’Etat en matière de sécurité. Par contre, les noms de nouveaux patrons de ces structures largement sensibles s’avèrent non moins surprenants. A plusieurs titres.
De un. Esambo au CNS et Lusadisu à l’ANR ne sont pas sociologiquement proches du Président de la République, souvent reproché par d’aucuns, dans ce pays à la remarquable liberté d’expressions, de privilégier les « siens du sang et du terroir ». De deux. Ils ne sont pas réputés être des membres du sérail présidentiel. Officiellement, ils ne sont pas non plus des « services ». Etc.
De quoi susciter des questionnements sur le sens de leur nomination au regard du temps politique en République Démocratique du Congo. Est-ce pour créer les conditions occultes, au sens non frelaté du terme, de la réélection sans conteste du Président candidat à sa propre succession ou pour tourner une page peu élogieuse de ces deux structures hautement stratégiques ?
L’un et l’autre objectifs, du reste non opposables, requièrent, pour prendre corps, non pas seulement des qualités intrinsèques d’heureux promus mais surtout une mobilisation systémique des institutions nationales pour engager les Renseignements dans une profonde réforme, nécessaire pour y créer les conditions idoines du renforcement de l’efficacité. Ce, dans le but d’en faire un facteur de redressement de l’Etat.
Dès lors, ils doivent relever non plus du tabou à la base, fort malencontreusement, des abus propres au totalitarisme mais plutôt de la promotion du débat démocratique, dans les limites d’une rationalité dictée par le devoir de responsabilité dans la construction des mécanismes d’une meilleure préparation des décisions stratégiques pour la sécurité de l’Etat, de ses institutions et de son peuple. Ceci aurait l’avantage de permettre aux débatteurs de bien nommer les maux qui rongent nos « services » et de penser rigoureusement aux solutions adéquates à y apporter à court, moyen et long termes.
Fondamentalement, il est utile qu’une nouvelle loi serve de nouveau repère pour nos « services » dont la démystification des mythes est indispensable pour assurer l’ennoblissement de ce secteur où doivent être recrutés les meilleurs parmi les excellents. Mutadis mutandis, la dotation des ressources plus accrues dans la perspective de la redynamisation de l’Inspection générale des finances (IGF), jadis à portée réduite, atteste qu’il est possible d’insuffler une nouvelle vie à nos Renseignements. Les deux promus doivent s’investir en priorité pour obtenir, du plus haut sommet de l’Etat, l’impulsion nécessaire pour récréer les « services » et y assurer l’effectivité du nettoyage des écuries d’Augias.
Ceci requiert d’abord de la vision et de la détermination. Il va sans dire que le défaut d’expertise et d’expérience en matière des Renseignements, qu’accuseraient Esambo et Lusadisu – à en croire les mauvaises langues -, ne devrait nullement constituer une entrave majeure à la réforme des « services ». Bien au contraire …
Plus de quatre ans après l’accession de Félix Tshisekedi à la Magistrature suprême, le chef de l’Etat a l’occasion d’écrire, en lettres d’or, une nouvelle page de l’histoire des Renseignements congolais et, partant, de préparer, à ce propos, un discours persuasif de campagne électorale. Le contraire desservirait l’affirmation de son action politique pour le changement positif en RDC.