Des membres du Mouvement du 23 mars (M23) ont tué au moins vingt hommes et violé des dizaines de femmes et de jeunes filles, révèle une enquête d'Amnesty International publiée ce vendredi. Ces actes qui se sont déroulés le 21 et le 30 novembre 2022 à Kishishe constituent des crimes de guerre et pourraient constituer des crimes contre l’humanité.
Selon les informations recueillies par Amnesty International, ces actes s'inscrivent dans le cadre d'une campagne menée par le M23 pour punir et humilier les civils soupçonnés de soutenir des groupes armés rivaux, notamment les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) et les Maï-Maï locaux.
"Depuis ces attaques, les survivants vivent dans la terreur et le dénuement le plus total. Si certaines victimes de viol ont reçu des soins médicaux de base dans des centres de santé communautaires, la plupart d'entre elles ont besoin de toute urgence de soins médicaux et de santé mentale adaptés, ainsi que d'une aide humanitaire", a déclaré Tigere Chagutah, directeur régional d'Amnesty International pour l'Afrique orientale et australe.
Des survivants et des témoins ont raconté à Amnesty International qu'après avoir pris le contrôle de Kishishe, des groupes de combattants du M23 ont fait du porte-à-porte, tuant sommairement tous les hommes adultes qu'ils trouvaient et soumettant des dizaines de femmes à des viols, y compris des viols collectifs.
« Ils ont franchi la porte de l'enceinte et rassemblé tous les hommes présents, sept au total, qu'ils ont tués. Cinq soldats nous ont ensuite violées : six femmes et moi. Ils nous appelaient les femmes des FDLR », témoigne Aline qui a été violée le 29 novembre.
Eugénie* a été violée par trois soldats du M23 le 30 novembre 2022 devant une église où elle s'était réfugiée avec sa famille à la suite d'affrontements entre le M23 et d'autres groupes armés.
" Ils ont dit que nous étions tous des FDLR. Ils ont distingué les hommes et les ont abattus, y compris mon mari et mes deux fils. Trois soldats du M23 m'ont ensuite emmenée derrière l'église et m'ont violée à tour de rôle. Je pensais que je ne survivrais pas".
Quelques jours après l'attaque, les autorités congolaises ont "fermement condamné les crimes odieux commis à Kishishe et Bambo" et ont promis de faire tout ce qui était en leur pouvoir pour que justice soit faite. Près de trois mois plus tard, les progrès sont minimes, constate l'ONG.
"Les autorités de la RDC, avec le soutien international, notamment par le biais des processus politiques en cours menés par la Communauté d'Afrique de l'Est et l'Union africaine, doivent demander des comptes aux auteurs de ces crimes odieux et rendre justice aux victimes. Elles doivent prendre d'urgence toutes les mesures nécessaires pour que les survivants de ces crimes reçoivent rapidement des soins de santé adéquats et une assistance humanitaire."
*Les noms des témoins ont été modifiés pour protéger leur identité.