Kinshasa : échange et sensibilisation sur le droit d’auteur et la gestion collective des œuvres de l’esprit

sensibilisation au droit d'auteur
Ph. ACTUALITE.CD

Artistes, créateurs, journalistes, opérateurs culturels ou des curieux étaient de la partie dans des échanges de sensibilisation sur le droit d’auteur et droit voisin ou encore la gestion collective. L’activité s’est déroulée la semaine dernière à la grande halle de l’Institut Français de Kinshasa où les discussions étaient intenses. C’était en marge de la journée africaine du droit d'auteur et de la gestion collective, célébrée le 14 septembre.

La question de droit d’auteur en RDC est devenue quasiment un casse-tête pour les auteurs qui n’ont pas manqué d’exprimer leur ras-le-bol. Sous forme de talk-show, les échanges ont concerné, dans un premier temps, les invités qui sont revenus, de manière parfois pédagogique, sur des questions plus claires comme ce qu’il faut faire face à la défaillance de la société de protection de droit d’auteur des créateurs.

C’est dans le deuxième temps que les participants, environ une centaine, se sont exprimés également. Comme invités, il y a eu Junior Luyindula, DG de l’Adaco ; Baya Ciamala, co-fondateur de Baziks ; Joe Mondonga, expert agréé en gestion collective des droits d'auteur et droits voisins, et Fred Kabeya, chanteur et directeur artistique du centre culturel Aw'art. Randy Kalay, juriste expert en propriété intellectuelle qui en est l’initiateur, a assuré la modération de la discussion.

Plus pédagogique, M. Joe Mondonga a laissé entendre que les droits voisins bénéficient aux auxiliaires des auteurs tels que des producteurs, des danseurs, des guitaristes, solistes, percussionnistes, ou tous ceux qui contribuent d’une manière technique ou artistique pour la création d’une œuvre de l’esprit. Alors que les droits d’auteur reviennent au créateur d’une œuvre.

À propos de la gestion collective des droits d’auteur, il a expliqué que ces sociétés doivent être l’émanation des auteurs. Aussi, toutes les œuvres de l’esprit ne sont pas tout de suite éligibles à la gestion collective vu qu’elles ne produisent pas immédiatement des droits. La musique, le cinéma ou le théâtre produisent des droits alors que les journaux ou les festivals sont éligibles à la gestion collective mais ne produisent pas directement des droits.

La gestion collective consiste en l’exercice du droit d’auteur par un organisme qui représente les auteurs, les créateurs, les interprètes. Ledit organisme veille à faire appliquer leurs droits, à défendre leurs intérêts moraux et patrimoniaux. En RDC, ce monopole est détenu par la Société congolaise des droits d’auteur (Socoda) qui a été décriée sans langue de bois par les artistes présents.

« La gestion collective est un monde des techniques. Celles qui sont mises en place pour pouvoir récupérer de l’argent pour une œuvre musicale ne sont pas les mêmes pour les œuvres d’art plastique. Nous, notre proposition pour la libéralisation est de partir sur les arts qui existent », a souligné Junior Luyindula.

Au niveau de l’Administration des droits d’Auteur au Congo (ADACO), la recommandation sur la libéralisation du secteur du droit d’auteur part dans le sens où les droits d’auteurs seront gérés par des organes habilités pour chaque art ou groupe d’arts. Le numérique, pas pris en compte par la loi congolaise de 1986 sur le droit d’auteur, était également évoqué pour dénoncer le piratage constant des œuvres des créateurs congolais dans les coins de rue.

Les artistes congolais de différents arts sont quasi unanimes sur le fait de ne pas rejoindre la Socoda pour déclarer leurs œuvres. Un humoriste présent a même laissé entendre qu’il voit ses œuvres, déjà déclarées, circuler depuis plus de 5 ans mais sans en bénéficier alors qu’il est membre de la Socoda. Fred Kabeya a dénoncé ouvertement ce qu’il considère de l’archaïsme dans cette société.

Il ne comprend pas notamment qu’« au vingt et unième siècle, la Socoda n’a même pas une page Facebook », affirme-t-il. Quant à Baya Ciamala, il recommande d’adhérer malgré tout à cette société, surtout pour évoluer avec sa plateforme de streaming Baziks.

Après les discussions, le public a eu droit à un spectacle de performance de l’artiste Yas Ilunga et un concert de l'artiste congolais Ya Moja. Ce dernier vit à cheval entre Kinshasa et l'Italie.

Figurant parmi les préoccupations majeures des artistes congolais, des avocats, développeurs, créateurs, auteurs et bien d’autres personnes concernées par la question de la propriété intellectuelle s’étaient déjà réunies le 26 avril dernier, à l’Institut Français de Kinshasa, à l’occasion de la journée mondiale de la propriété intellectuelle. La question a été évoquée avec un peu plus d’éclairage sur la notion de la propriété intellectuelle et la protection des œuvres de l’esprit.

Emmanuel Kuzamba