RDC-Rutshuru: le M23 consolide son administration dans le groupement de Jomba, 40 jours après la prise de Bunagana

La cité de Bunagana, frontalière avec l'Ouganda
La cité de Bunagana, frontalière avec l'Ouganda

Quarante jours se sont écoulés depuis la prise de la cité frontalière de Bunagana (territoire de Rutshuru) au Nord-Kivu, par le M23. Cette occupation était intervenue après la conquête des plusieurs autres villages dans le groupement de Jomba à l'issue des combats avec les FARDC. La rébellion a, depuis, instauré son administration notamment à la tête du groupement de Jomba qui comprend en tout 8 villages.

En avril dernier, le M23 disait pourtant «qu'elle n'a jamais eu l'intention de faire des conquêtes des espaces pour les administrer, notre seule motivation est le règlement pacifique de la crise». 

Ce jour, la rébellion a largement étendu sa présence dans le groupement de Jomba,  frontalier avec le Rwanda et l'Ouganda. 

«Le groupement de Jomba comprend 8 villages et il y a six qui sont occupés par les rebelles et deux entre les mains du gouvernement», a dit a ACTUALITE.CD ce vendredi 22 juillet, Jackson Gachuki, chef du groupement de Jomba actuellement en fuite a Goma.

Et la majorité des populations des villages occupés sont en fuite. «S'il faut assister les déplacés, nous ne pouvons que le faire dans les deux villages qui sont contrôlés par les FARDC», confie le chef de Jomba.

Administration

Il y a bel et bien des animateurs nommés par la rébellion dans les villages conquis et à la tête du groupement de Jomba. 

«L'entité est occupée par les rebelles. Ils ont nommé un autre chef, ils sont venus pour faire l'administration», a ajouté M. Gachuki. 

«Même dans la cité de Bunagana il y a des nouveaux animateurs», a-t-il indiqué tout en précisant que «le poste frontalier reste ferme».

En juin dernier, l'administration militaire du Nord-Kivu avait interdit l'importation et l'exportation via le poste frontalier de Bunagana. «Toute personne dont la marchandise de quelque nature que ce soit entrerait par ce poste frontalier sera considérée comme fraudeur-collaborateur de l’ennemi et subira la rigueur de la loi», avait menacé le gouverneur militaire du Nord-Kivu. 

Par ailleurs, dans le groupement de Busanza, le M23 contrôle le village de Mungo. L'expansion de la rébellion dans cette partie a été étouffée par l'armée après des combats en juin dernier notamment dans la localité de Musenzero, rapporte une source administrative du groupement de Busanza. 

Inquiétudes suite à l'occupation prolongée du M23

Vendredi, l'ONG la Voix des Sans Voix pour les droits de l'homme (VSV) a exprimé ses inquiétudes à la suite de l'occupation prolongée de la cité de Bunagana par le M23.

«Il convient de souligner que depuis l’occupation de la cité de Bunagana par les rebelles du M23, la population fait face à une situation dramatique sur le plan sécuritaire, économique et humanitaire se traduisant par des tueries, la multiplication des exactions et autres exigences des taxes contre les populations civiles», a souligné la VSV dans un communiqué.   

Lire ici: RDC: Human Rights Watch a établi que le M23 a délibérément tué au moins 30 civils depuis la mi-juin

«Les rebelles sont là pour piller et tuer», a précisé pour sa part le chef du groupement de Jomba, M. Gachuki qui déplore aussi la durée longue d'occupation.  

La VSV regrette «qu’à l’heure actuelle, l’Etat congolais n’arrive pas à restaurer l’autorité de l’Etat à Bunagana». Pour cette organisation, «cette situation contraint les populations civiles à se résigner sans vaquer librement à leurs occupations quotidiennes».

La RDC accuse toujours le Rwanda de soutenir la rébellion du M23. Le Chef de l' Etat congolais a opté pour la solution diplomatique afin de résoudre la crise. Dans cette optique, le président angolais Joao Lourenço a offert sa médiation. Il avait convoqué Felix Tshisekedi et Paul Kagame afin de tenter de trouver une solution à la crise. Malgré le cessez-le-feu décrété, les combats s'étaient poursuivis sur le terrain avant une accalmie précaire ces derniers jours. Une nouvelle rencontre de la commission mixte RDC-Rwanda a eu lieu jeudi dernier à Luanda. Les deux parties ont encouragé notamment le déploiement de la force régionale de l'EAC et la lutte contre les FDLR-FOCA que Kigali accuse de coaliser avec les FARDC dans l'Est du pays.

Patrick MAKI