Quelques procédures à recourir en cas de soupçon de la partialité d’un magistrat

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Service infographie de ACTULITE.CD

Lorsqu’un justiciable suspecte le tribunal ou la cour, ou un membre de la composition chargé d’examiner son affaire, d’être partial, la loi lui donne quelques mécanismes auxquels recourir pour une bonne administration de la justice.  ACTUALITE.CD se penche sur ces mécanismes qui sont la récusation ou la décharge du magistrat instructeur, le renvoi et la prise à partie.

1. La récusation 

Il s’agit d’une procédure par laquelle un justiciable sollicite qu’un juge dont la partialité est suspectée, soit écarté  de l’examen de son affaire. Les causes pouvant donner lieu à une procédure de récusation de juge sont limitativement citées par l’article 49 de la loi numéro 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire : « Tout juge peut être récusé pour l'une des  causes limitativement énumérées ci-après :

1. si lui ou son conjoint a un intérêt personnel quelconque dans l'affaire ; 2. si lui ou son conjoint est parent ou allié soit en ligne directe, soit en ligne collatérale jusqu'au troisième degré  inclusivement de l'une des parties, de son avocat ou de son mandataire ; 3. s'il existe une amitié entre lui et l'une des parties ; 4. s'il existe des liens de dépendance étroite à titre de domestique, de serviteur ou d'employé entre lui et l'une des parties ; 5. s'il existe une inimitié entre lui et l'une des parties ; 6. s'il a déjà donné son avis dans l'affaire ; 7. s'il est déjà intervenu dans l'affaire en qualité de juge, de témoin, d'interprète, d'expert, d'agent de l'administration, d'avocat ou de défenseur judiciaire ; 8. s'il est déjà intervenu dans l'affaire en qualité d'officier de police judiciaire ou d'officier  du Ministère Public ».

Notons que la récusation ne concernent que les magistrats assis que sont les juges et non les magistrats du Parquet. Ces derniers peuvent plutôt être déchargé de l’instruction du dossier lorsque le justiciable estime qu’il y a dans son chef, l’une des causes prévues par l’article 49 précité. Dans ce cas, il adresse sa demande au chef hiérarchique du magistrat concerné.

Et le magistrat du siège ou du Parquet qui estime qu’il se retrouve dans l’une des causes de récusation doit se déporter.

2. Renvoi de juridiction

Le renvoi des juridiction est une procédure par laquelle un justiciable sollicite que son affaire soit jugée par une autre juridiction du même rang et du même ressort parce qu’elle soupçonne  de partialité celle qui est entrain d’examiner cette cause. Il peut intervenir soit pour cause de sûreté publique ou de souspicion légitime. Il n’y a que le ministère public qui peut solliciter le renvoi pour cause de sûreté publique, puisque « le climat social ou politique du lieu où siège le juge naturel est détérioré au point qu’il ne soit plus possible de rendre une justice sereine (LUZOLO BAMBI LESSA, Cours d’organisation et compétence judiciaires, UPC, 2014, p. 35). Pour souspicion légitime, la demande est introduite par les parties. La juridiction compétente pour opérer le renvoi de juridiction est en principe la juridiction immédiatement supérieure à celle qui est suspectée. Exceptionnellement la Cour de cassation peut, pour les mêmes causes, renvoyer la connaissance    d'une affaire d'une Cour d'appel à une autre ou d'une juridiction du ressort d'une Cour d'appel à une juridiction de même rang du ressort d'une autre Cour d'appel( article 60 de la loi du 11 avril 2013).

3. La prise à partie

La prise à partie est une procédure par laquelle un justiciable attaque un magistrat pour dol, concussion ou déni de justice dans la prise d’une décision dans son affaire. Ici le magistrat incriminé sera condamné aux dommages-intérêts et sa décision sera annulée, sans préjudice des sanctions disciplinaires. 

Le  dol est défini ici comme une violation volontaire du droit par le magistrat pour aboutir à une conclusion erronée dans le but d'accorder un avantage indu  à une partie. Il se caractérise par la mauvaise foi, par des artifices et des manœuvres qui donnent à la décision une valeur juridique apparente. L'erreur grossière du droit est équipollente au dol.( article 56 de la loi du 19 février 2013 relative à la procédure devant la cour de cassation) La concussion est le fait,  pour un magistrat, d'ordonner de percevoir, d'exiger ou de recevoir ce qu'il savait n'être pas dû ou excéder ce qui était dû, pour droits, taxes, impôts, revenus ou  intérêts, salaires ou traitements(article 57). Il y a déni de justice lorsque le magistrat refuse de procéder aux devoirs de sa charge ou néglige de juger les affaires en état d'être jugées. Le déni de justice est constaté par deux sommations faites par l'huissier et adressées au magistrat à huit jours d'intervalle au moins( article 58).

La juridiction compétente pour connaître de la prise à partie est la cour de cassation.

Blaise BAÏSE, DESK JUSTICE