Sa correspondance transmise à la première dame a fait le tour des réseaux sociaux. Angélique Bemba Kombite Pollet réclame ses parts dans le patrimoine de Jeannot Bemba, géré actuellement par Jean-Pierre Bemba. Pourquoi a-t-elle entamé une procédure judiciaire contre son « frère » ? Qu’attend-t-elle de Denise Nyakeru, des ONG ou de la Justice ? Éléments de réponse sans cet entretien accordé au Desk Femme.
Bonjour Madame Angélique Kombite. Vous avez récemment envoyé une lettre à la première dame, dans laquelle vous signifier avoir entamé une « grève de faim » à propos du différend qui vous oppose à l’homme politique Jean-Pierre Bemba. Pouvez-vous revenir sur cette situation ?
Angélique Bemba Kombite Pollet : après le décès de notre père, nous, les frères et sœurs de Jean-Pierre Bemba, avions attendu qu'il soit d'abord remis en liberté avant d'évoquer toute question relative au partage du patrimoine de notre défunt père comme notre culture Ngbaka l'exige, et surtout que Jean-Pierre est l'aîné de tous les enfants Bemba. Curieusement, après son acquittement par la Cour pénale internationale, nous avons constaté son refus (Jean Pierre) de rencontrer les autres enfants Bemba. Beaucoup le cherchaient ne serait-ce que pour avoir de ses nouvelles. Pas seulement pour cette question. Il était devenu très différent de celui que nous attendions tous, sans avancer une raison valable. Douze ans après la disparition de notre père, Jean-Pierre Bemba n’a pas voulu entendre l’épineuse question de partage du patrimoine de papa que lui seul gère jusqu'à ce jour. Il dit à qui veut l'entendre que je ne suis pas la fille de Bemba Saolona. Et que même si le partage se faisait aujourd'hui je n'aurais droit à rien. C’est pour cette raison que je suis allée en justice contre lui devant les Cours et Tribunaux congolais.
Dans votre correspondance, vous précisez vivre présentement « cachée dans un calvaire insupportable » craignant ainsi des représailles après avoir dénoncé votre frère. Que vouliez-vous dire par « calvaire insupportable » ?
Angélique Bemba Kombite : mon calvaire est avant tout psychologique. Comment on peut dire de moi que je ne suis pas fille de mon père. Et qui me le dit ? C'est Jean Pierre qui venait nous rendre visite régulièrement à Kinshasa quand j'étais encore petite. C'est Jean Pierre qui me connait parfaitement bien. C'est incroyable et insupportable en même temps. La crainte des représailles était tout à fait naturelle. Ce n'est pas un secret de polichinelle, Jean Pierre Bemba était acteur politique majeur en RDC et son parti politique, le Mouvement de Libération du Congo, MLC en sigle, a de nombreuses cellules ici au niveau de la diaspora. Qu'est-ce qui ne dit pas que ses adeptes peuvent s’en prendre à moi pour avoir exposé l'égoïsme de leur leader sur la place publique. Beaucoup agissent en bande organisée ici à Bruxelles où je suis présentement. Cette crainte des représailles continue de me troubler. J'ai restreint mes mouvements à cause de cette crainte évidemment.
Vous avez entamé une procédure judiciaire en septembre 2020. Où en êtes-vous actuellement ?
Angélique Bemba Kombite Pollet : mon dossier qui est au niveau des juridictions congolaises va de report en reports. Des reports qui ne se justifient pas par rapport à ma situation. Je pense aussi qu’il faudrait interroger Jean-Pierre Bemba pour savoir pourquoi il ne s'est jamais présenté devant la justice ?
Vous avez, au cours d’une audience, sollicité qu’un examen ADN soit réalisé. Cela n’a-t-il pas été effectué ?
Angélique Bemba Kombite Pollet : je suis allée sans problème l'exécuter mais Jean Pierre ne s'était pas rendu à l'INRB pour tester son ADN en comparaison avec le mien.
Qu’attendez-vous concrètement de Denise Nyakeru ?
Angélique Bemba Kombite Pollet : j'attends un appui important pour que justice soit faite. J'éprouve d'énormes difficultés à nouer les deux bouts du mois. Il faudrait qu’une justice équitable soit faite pour me remettre dans mes droits. Je suis une Bemba au même titre que tous les autres enfants de Jeannot Bemba.
La correspondance est également adressée aux organisations de défense des droits humains et de la femme en particulier, notamment ASADHO, La Voix des sans Voix et CAFCO. Quelles sont alors vos attentes vis à vis d’elle ?
Angélique Bemba Kombite Pollet : j'attends un appui important de leur part. Qu'ils ne m'abandonnent pas dans cette lutte pour une justice équitable. Nul n’ignore aujourd'hui le rapprochement entre Bemba et le pouvoir actuel. Il est dans une position capable d'influencer les décisions judiciaires.
Et qu’attendez-vous de la part de la justice congolaise ?
Angélique Bemba Kombite Pollet : à la justice congolaise, je continue et continuerai à faire confiance. Si mes autres frères ont saisi la justice bruxelloise à l'époque, à cause de la même problématique, moi en tout cas je vois les choses différemment . La justice congolaise en qui je crois est capable aujourd'hui d'élever notre nation en soulageant les victimes.
Un dernier mot ?
Angélique Bemba Kombite : je demande à la population congolaise de m'accompagner dans cette lutte. Moi qui vis dans une condition insupportable en Europe, j'ai besoin de son aide pour que la justice agisse de façon équitable. Une personne ne peut pas se servir de ses positions politiques pour marcher sur les droits des autres. C'est aussi ça l'État de droit que le Chef de l'État Félix-Antoine Tshisekedi nous avait promis.
Propos recueillis par Prisca Lokale