RDC : ce que pense la société civile de la proposition de l’élection présidentielle au suffrage indirect 

Photo ACTUALITE.CD.

Le débat lancé par Alphonse Ngoyi Kasanji, cadre du Front Commun pour le Congo (FCC) de basculer l'élection du Président de la République au suffrage universel indirect continue de défrayer la chronique au pays. Sur ACTUALITE.CD mercerdi dernier, quelques acteurs de la société civile ont donné leurs points de vue sur cette question.

Le coordonnateur général de la société civile, Christophe Ngoyi, dénonce cette démarche, qu'il qualifie de provocatrice et compte sur la souveraineté du peuple congolais pour obtenir la dissolution de l'Assemblée nationale.

« Nous ne sommes pas d'accord avec cette proposition, c'est une provocation en ce sens qu'elle en relève de la constitution, elle va également enerver le peuple congolais souverain primaire dans son ensemble. Donc moi, je crois que nous avons eu raison de proposer la pétition au peuple congolais qu'il assume d'ailleurs massivement pour obtenir la dissolution de l'Assemblée nationale », a-t-il déclaré à ACTUALITE.CD.

Le coordonnateur national du panel des experts de la société civile, Dieudonné Mushagalusha aborde la question dans le sens opposé. Pour lui, cette démarche est avantageuse parce qu'elle repose sur des lois électorales.

« L'élection au second degré a plusieurs avantages, et ça, je parle rien que sur le plan scientifique, technique électoral sans entrer en politique. Le 1er avantage de cette élection, c’est qu'elle est facile à dépouiller, il y a moins de corruption parce qu'on connaît bien les électeurs et on peut bien les surveiller, il ya moins de fraudes électorales. Le deuxième avantage, c’est que ça diminue le coût des élections parce que le nombre d’électeurs est réduit. Les électeurs ayant déjà le mandat des électeurs du premier degré. Et eux, ont la représentation du second degré, ils engagent les électeurs à la base. Le troisième avantage, c’est que cette élection permet de consolider des partis et regroupements politiques, parce qu'à ce moment là, il y aura des alliances de plusieurs partis ou regroupements qui vont faire une seule plateforme pour permettre à ce que la personne désignée de cette plateforme puisse être élue comme président de la République », a estimé Dieudonné Mushagalusha.

Et de poursuivre :

« Le cas il y en a, dans des pays à vieilles démocraties, aux États Unis, on ne peut dire que le président Trump est moins président que le président Macron, on ne peut pas dire que le président sud africain est moins président que notre président son excellence Félix Antoine Tshilombo etc. Je vous rappelle qu'ici en RDC on a déjà vécu ça, le président Kasa Vubu était élu au second degré, d'ailleurs pour Joseph Kasa Vubu, ce n’était même pas par des députés mais par la chambre des représentants. Et Joseph Kasa Vubu est toujours cité comme premier président de la République, il a été chef de l'Etat comme Mobutu désiré, comme Laurent Désiré Kabila, Joseph Kabila et Felix Tshisekedi ». 

Jonas Tshiombela, Président de la nouvelle société civile du Congo (NSCC) pense que cette proposition est irréaliste et cache des manœuvres politiciennes.

« C'est une proposition irréaliste et calquée sur des calculs politiciens qui ne peut pas résoudre le problème d'organisation des élections dans notre pays. Vous vous souviendrez qu'en 2011, la même famille politique nous a amenés de deux tours à un seul tour et quelle solution nous ont-ils amenée? Aujourd'hui, nous avons des présidents élus avec un faible pourcentage, cette manière de faire ne relève pas de la démocratie et c'est un recul pour notre démocratie et c'est inacceptable. Nous pensons qu'il faut améliorer au lieu de détruire ce qui est déjà détruit », a réagi Jonas Tshiombela.

Et de prévenir:  

« C'est une proposition qui ne passera pas dans l'opinion et nous nous mobiliserons contre cette proposition, qui ne cadre ni avec la bonne gouvernance électorale ni avec l'organisation des élections justes, démocratiques et transparentes. C'est une proposition égoïste et teintée de la survie politique même de ladite famille qui cherche à tout prix à survivre malgré elle ». 

Lors d’une interview accordée à ACTUALITE.CD, le secrétaire général de la conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), Abbé Donatien Nshole, a dénoncé la tenue de ce projet et suppose que cette position est justement à l'extrême. Il a rappelé que la population garde encore frais en l'esprit le scandale de corruption qui a caractérisé les élections des sénateurs en 2019. De son côté, Jacques Ndjoli, élu de Boende-territoire et inspecteur général du Mouvement de libération du congo (MLC), qui s’est également confié à ACTUALITE.CD, cette démarche est une manoeuvre de la famille politique de Joseph Kabila afin de fuir le verdict du peuple qui est le souverain primaire.

M. Kasanji entend porter sa proposition jusqu’à l’Assemblée nationale mais tout d’abord il va la présenter au FCC. 

Nancy Kapinga, stagiaire UNIKIN