Maître de conférences au département de politique et de relations internationales de l’université de Sheffield (Royaume-Uni), Judith Verweijen est parmi les rares experts qui s’intéressent aux dynamiques liant violences et ressources naturelles. Elle a consacré l’essentiel de son travail sur les conflits dans la partie Est de la RDC. Dans un billet édifiant, elle a apporté un éclairage supplémentaire sur les causes des violences dans les hauts plateaux du Sud-Kivu.
Dans la partie blog du site du baromètre sécuritaire du Kivu, elle explique que ces violences ont été exacerbées tant par les conflits purement locaux que par des implications sous régionales. Dans un effort de synthèse, elle note que ces troubles ne sont pas les résultats d’un conflit « ethnique » ou « intercommunautaire ». Elle revient également sur l’impact de la création de la commune rurale de Minembwe mais aussi sur l’ingérence étrangère.
Elle constate que les conflits en cours sur les hauts plateaux sont étroitement liées à des disputes autour de l'autorité locale et l'accès aux terres et aux ressources"
Elle précise aussi qu’au sein des groupes considérés parfois comme monolithiques, il existe aussi des dynamiques aux intérêts parfois différents. Par exemple, dans le groupe appelé Banyamulenge, il ya les Twirwaneho, une coalition de milices locales qui développe également une branche politique. Opérant de façon plus décentralisée que les Ngumino, ils sont basés autour de Bijombo. Il y a aussi les Ngumino. Au départ composé d’anciens groupes dont les ex-FRF, ces miliciens dirigés par Shaka Nyamusharaba se sont illustrés ces dernières semaines dans les affrontements réguliers avec les mai-mai au Nord de Fizi. Il ya également le groupe conduit par le déserteur des FARDC Michel Rukunda (Makanika). Selon plusieurs sources, confirmées aussi par Judith Verweijen, les miliciens de Makanika se recrutent aussi parmi les jeunes Banyamulenge de la diaspora régionale (Kenya, Rwanda, Burundi). A côté de ces milices banyamulenge, il existe une kyrielle de groupes armés placés sous les vocables mai-mai qu’on retrouve aussi dans la catégorie de ceux qui qui se considèrent comme autochtone (Babembe, Bafuliiru, Banyindu, Bavira, etc.).
Judith Verweijen explique aussi que l’opérationnalisation des décrets de 2013 et 2018 sur l’institution d’une commune rurale appelée « Minembwe » est aussi à la base de cette situation. La tension s’est encore accrue en 2019 avec la nomination des dirigeants. Les babembe particulièrement voient d’un mauvais oeil cette nouvelle organisation de la territoriale.
Judith Verweijen rappelle que « pendant la seconde guerre du Congo, l’administration rebelle du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), soutenu par le Rwanda, a créé le territoire de Minembwe, qui comprenait une grande partie des Hauts Plateaux et des Moyens Plateaux adjacents. Ce territoire répondait à un souhait de longue date des Banyamulenge, à qui les autorités coloniales avaient refusé une chefferie ou un groupement – des entités de gouvernance locale généralement formées selon des lignes ethniques ».
Elle explique l’impact des groupes armés d’origine étrangère comme la Résistance pour un état de droit au Burundi (RED-Tabara) et Forces nationales de libération (FNL), ainsi que le Rwanda national congress (RNC).
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