Affaire Seth Kikuni-Constant Omari : Les explications de droit à propos des « imputations dommageables »

Photo droits tiers

Le jeudi 18 juillet dernier, Seth Kikuni, ancien candidat président de la République et directeur général de l’entreprise KMSI, accompagné de son avocat, Maître Théodore Ngoy, a déposé une plainte contre Constant Omari, président de la Fédération congolaise de football association (FECOFA), au parquet général près la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe pour « imputations dommageables ». Seth Kikuni avait annoncé des poursuites contre la FECOFA et son président, Constant Omari, pour non-respect du contrat de sponsoring, signé le 22 mai pour la campagne CAN/Egypte 2019. Joueurs et staffs des Léopards (65 personnes) devraient être habillés par la marque Özel Trendz de KMSI pour un montant global de 77 000 dollars américains.

Il ressort des éléments des faits tels que présentés par l’avocat conseil du plaignant que Constant Omari aurait commis, depuis l’Egypte où s’est tenue la 32ème édition de la Coupe d’Afrique des Nations de football, des faits et actes constitutifs de l’infraction d’imputation dommageables à l’endroit de Seth Kikuni.

« Nous sommes ici pour l’affaire Seth Kikuni contre Constant Omari. L’affaire KMSI contre la FECOFA a fait l’objet d’un écrit de ma part demandant à la FECOFA d’appliquer le règlement à l’amiable. Nous n’avons pas encore reçu de réponse à notre courrier. L’affaire Seth Kikuni contre Constant Omari concerne les imputations dommageables commises par monsieur Omari. Monsieur Seth Kikuni a livré les articles comme convenus, il a ordonné aux joueurs de ne pas porter les articles délivrés par un con et un voyou. Monsieur Omari n’a pas seulement porté atteinte à l’honneur et la considération de monsieur Seth Kikuni, il a déshonoré même la République parce qu’il parlait à partir de l’Egypte avec à sa gauche le ministre des Sports, qui n’a rien dit, et à sa droite l’ambassadrice de la RDC en Egypte, et il se met à imputer les faits précis à un ancien candidat président de la République, directeur général de son entreprise avec qui il a signé un protocole d’accord (…) mais monsieur Omari sans se maîtriser parce qu’il était peut-être en colère contre quelque chose, a préféré non seulement l’injure mais aussi l’imputation dommageable, l’humiliation, rabaisser les autres. C’est cela monsieur Omari », avait déclaré Théodore Ngoy au sortir du parquet.

S’il est vrai que, conformément aux alinéas 1er et 2ème de l’article 3 du Décret du 30 janvier 1940 portant code pénal congolais, toute personne qui, hors du territoire de la République Démocratique du Congo, s'est rendue coupable d'une infraction pour laquelle la loi congolaise prévoit une peine de servitude pénale de plus de deux mois, peut être poursuivie et jugée en République Démocratique du Congo, sauf application des dispositions légales sur l'extradition, et que la poursuite ne peut être intentée qu'à la requête du ministère public, il n’est pas pour autant vrai que le président de la FECOFA a commis des faits susceptibles d’être qualifiés d’imputations dommageables.

En effet, l’article 74 du code pénal congolais livre II dispose que celui qui a méchamment et publiquement imputé à une personne un fait précis qui est de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de cette personne, ou à l'exposer au mépris public, sera puni d'une servitude pénale de huit jours à un an et d'une amende de vingt-cinq à mille zaïres [Ndlr : Zaïre parce que le code congolais n’a jamais été révisé] ou d'une de ces peines seulement. Cependant, il ressort des faits, et spécialement de la vidéo à laquelle fait allusion le plaignant, qu’en aucun moment l’accusé ci-haut identifié n’a commis des faits et actes rentrant dans la qualification de l’infraction d’imputation dommageable.

La loi pénale est de stricte interprétation. Ainsi, il faudrait, pour le magistrat saisi des faits, de confronter chaque élément de fait (exemplaires des journaux et vidéo) à chaque élément matériel et intentionnel l’infraction d’imputation dommageable avant de retenir cette qualification (prouver si les propos de Constant Omari étaient tenus avec intention de commettre cette infraction). Dans le cas contraire, le magistrat instructeur n’aura comme devoir que de classer sans suite pour défaut d’élément matériel, et surtout d’élément intentionnel.

Contexte

Le tweet de Seth Kikuni après le match perdu par la RDC contre l’Ouganda avait provoqué la colère de Constant Omari qui, dans une réunion avec les joueurs, avait décidé de rompre verbalement le contrat avec KMSI, traitant Seth Kikuni de “petit con”.

Conflit interne, irresponsabilité, manque de professionnalisme et poursuite de l'intérêt personnel des cadres influents de la FECOFA ont créé hier soir des frustrations graves au sein de l'équipe nationale pourtant motivée. Ils ont tout saboté. Ibenge n'y est pour rien”, avait écrit sur Twitter le 22 juin, Seth Kikuni.

Me Grâce Muwawa, avocat