Depuis l’évasion de plus de 4 000 détenus de la prison de Makala en mai dernier, le contrôle de la police s’est intensifié dans plusieurs artères de la ville de Kinshasa. Les routes sont barricadées pendant la nuit par les forces de l’ordre et de sécurité, pour des contrôles systématiques.
Voitures fouillées de fond en comble, identités exigées. Autant d'exigences auxquelles doivent se soumettre les Kinois qui circulent après 21h00'.
Selon la police, il s’agit des mesures dans le cadre de la traque des évadés de la prison de Makala, ainsi que de ceux qui se sont volatilisés du cachot du Parquet de Matete et du commissariat de Kalamu.
Trois mois depuis l’intensification de ces check-points, ACTUALITE.CD a fait une ronde dans plusieurs coins de la ville de Kinshasa notamment dans la commune de la Gombe, sur le boulevard du 30 Juin et l’avenue Lukusa, dans la commune de Lingwala, sur les avenues Kabinda et du 24 Novembre, ainsi que dans la commune de Barumbu, sur l’avenue du Flambeau, devenue avenue Joseph Kabasele Tshamala.
Le dispositif reste le même à chaque check-point. Une équipe composée d’au moins 10 éléments militaires pose des barrages routiers et tous les véhicules sont systématiquement fouillés, un contrôle d’identités s’impose aux conducteurs comme aux passagers.
Il est 21h30'. Sur l'avenue Lukusa, à 100 m du nouveau centre commercial “Shopping Moll”, une scène se passe au check-point.
"<em>Pouvez-vous nous montrer vos documents ?</em>", demande un agent de l’ordre. "<em>Volontiers</em>", répond le conducteur. Tous les documents exhibés, il lui faut ensuite indiquer sa destination finale et… le café (1000 FC).
Les piétons ne sont pas concernés par ces fouilles jusqu’aux environs de minuit pour les coins mouvementés comme le rond-point des avenues des Huileries et Nyangwe, l'avenue Mushie, rond-point Victoire, rond-point 24 Novembre et Bandalungwa.
<b>"Tracasseries..."</b>
«<em>C’est depuis l’évasion à la prison de Makala que la police nous tracasse la nuit. Elle bloque les routes pour faire soit-disant le contrôle, mais en réalité ils ne font rien. Je présente tous les documents du véhicule, à la fin je dois donner au moins 1 000 Fc pour passer. ça fait au moins 3 mois, n’ont-ils pas encore trouvé ce qu’ils cherchent ?</em>», s’interroge Junior, la vingtaine révolue.
«<em>Au début de cette opération, les militaires fouillaient les véhicules. Ils faisaient en quelque sorte le contrôle des documents du véhicule, le permis de conduire. Ils fouillaient même les sacs des femmes, demandaient les pièces d’identité des clients à bord du taxi. Actuellement, ils ne font plus le contrôle (…) C’est devenu une tracasserie. Tu dois au moins donner 1 000 FC à chaque barrière. Je fais le tronçon station Ma Campagne-Huileries et, des fois, je passe par l’avenue Nyangwe, je traverse 24 Novembre pour déboucher sur Shahumba vers Magasin Kintambo. Imaginez que partout là, je trouve des barrières. Donc, je dépense plus que même ce que je gagne par course. J’en ai vraiment marre ! Ils doivent arrêter cette aventure</em>», s’indigne Faustin, chauffeur taxi.
« <em>Au début de cette opération j’avais peur. Je devais regagner la maison avant 20h pour ne pas croiser les barrières. Mais depuis que j’ai découvert qu’il suffit d’avoir au moins 1 000 FC pour passer, je vaque paisiblement à mes occupations. Donc, je suis déjà habitué</em> », déclare à son tour le passager d’un taxi dans la commune de Barumbu.
Le porte-parole de la police, le colonel Pierrot Mwanamputu, avait, lors de la présentation de l’homme d’affaires indien Ritesh Hemnani, PDG des sociétés Miles Travel SARL et SOKERICO SARL, enlevé depuis le 20 juin 2017 à Kinshasa, souligné que les check-points servent à traquer des criminels évadés se trouvant dans la nature après le refus constaté de la part de la population de dénoncer des suspects dans leurs quartiers respectifs.
<b>Christine Tshibuyi</b>