A l’occasion de la célébration, Mercredi 02 novembre 2016, de la « Journée Internationale contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes », Journaliste en Danger (JED) a rendu public son rapport annuel 2016 sur la situation de la liberté de la presse en RD Congo intitulé : « La pire saison pour la presse en RD Congo ».
Ce rapport contient au moins 87 cas d’attaques documentées contre les journalistes et contre les médias recensés par JED en 2016 dans les 26 anciennes et nouvelles provinces de la RD Congo. Si au cours de cette année 2016, JED n’a enregistré aucun cas d’assassinat de journaliste, contrairement aux années précédentes, beaucoup de professionnels des médias n’ont pas échappés à d’autres formes de violence physique ou psychologique.
« Dans ce contexte pré-électorale tendu, JED n’a eu de cesser de tirer la sonnette d’alarme sur les dangers qui menacent la liberté de presse et d’expression, de dénoncer les attaques contre les professionnels des médias ; d’exiger la libération de ceux qui sont emprisonnés ; d’alerter sur ceux qui font l’objet des menaces et d’agressions de toutes sortes et d’exiger des sanctions », peut-on lire dans ce Rapport.
Le sentiment général de peur et d’insécurité qu’éprouvent les journalistes dans l’exercice de leur métier s’est d’avantage accentué depuis que le climat politique se détériore, et que le processus électoral se trouve dans une grande impasse.
Selon les statistiques de JED, au moins quarante journalistes ont été arrêtés, interpellés ou privés de leur liberté pendant des périodes plus ou moins longues à cause de leur profession. Une vingtaine d’autres ont été agressés ou reçus des menaces directes ou indirectes pour des raisons liées à leur travail ou à leurs qualités de journalistes. Plusieurs actes de pressions et des cas de censures ont été imposés aux journalistes et aux médias par des autorités gouvernementales et des services de sécurité congolais.
Mais l’année 2016 restera marquée par les violences qui ont secoué la ville de Kinshasa lors des manifestations initiées par l’opposition, les 19 et 20 septembre 2016. Selon le monitoring de JED, au cours de ces journées de violence, au moins une dizaine de journaliste ou professionnels des médias ont été attaqués ou interpellés par des éléments des diverses forces de sécurité. Ces journalistes ont été malmenés, battus, leurs matériels de travail endommagés, et détenus pendant des longues heures dans des camps militaires.
A l’analyse des différentes alertes diffusées par JED au cours de l’année 2016, concernant les auteurs ou responsables des atteintes à la liberté de la presse, il ressort que près de 90% des cas de menaces, d’attaques ou de violences contre les journalistes et contre les médias sont le fait de ceux que communément on nomme « les hommes en uniforme ou en armes ». En clair il s’agit, soit des éléments de Forces armées congolaises, soit de la police, ou soit encore des différents services de sécurité et des renseignements. Ceci pouvant aussi justifier pourquoi ni les autorités judiciaires, ni les autorités politiques ne réagissent pas adéquatement, ou pas du tout, devant les plaintes et autres dénonciations des atteintes portées aux droits des journalistes, garantissant du même coup un régime d’impunité assuré aux responsables identifiés ou identifiables de ces attaques, note le Rapport.
Alors qu’on s’approche des échéances politiques majeures, dans un climat d’intolérance et de vive tension entre le pouvoir et l’opposition, JED constate que :
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<li>aucune mesure, ni politique, ni juridique n’a été prise dans le sens de renforcer la liberté de la presse qui demeure fragile ;</li>
<li>L’exercice du métier d’informer reste périlleux pour les journalistes exposés aux risques des arrestations, des emprisonnements et des agressions dans un système d’impunité quasi instituée ;</li>
<li>La situation générale de la presse et des médias est de plus préoccupantes, non seulement en raison de la précarité des organes de presse soumis à des pressions administratives et économiques grandissantes, et mais aussi et surtout à cause de la mort programmée de quelques médias qui « dérangent »et qui, d’ores et déjà sont réduits au silence.</li>
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En cette journée de lutte contre l’impunité des attaques contre la presse, JED saisit l’occasion pour dénoncer la prise en otage, depuis plusieurs mois, des médias proches de l’opposition pour des raisons politiques inavouées, et en dépit de toutes les protestations engagées pour démontrer les irrégularités des mesures ainsi prises.
JED demande, une fois de plus, au Président de la République, de mettre fin au calvaire imposé aux journalistes travaillant dans ces médias ainsi contraints au chômage et à la précarité, en ordonnant la réouverture de leurs médias illégalement fermés.