RDC : un rapport de Oakland Institute révèle comment l'accord de Washington perpétue le pillage des richesses du Congo pour des intérêts miniers américains et offre une prime au Rwanda

Mines de Rubaya
Mines de Rubaya

Près de quatre mois après la signature de l'accord de paix dit "accord de Washington" entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda sous les auspices des États-Unis, la crédibilité ou la probité de cette initiative diplomatique ne cessent d'être mise en cause au niveau national tout comme à l'international. 

Un nouveau rapport de l'Oakland Institute, "Floués ! La ruée vers les minéraux critiques en RDC", soulève de vives inquiétudes concernant l'accord conclu en juin 2025. Alors que Donald Trump a salué cet accord comme marquant la fin d'une guerre meurtrière longue de trois décennies, le rapport révèle comment il ne fait que perpétuer le pillage des richesses du Congo par des intérêts étrangers et des entreprises américaines.

« Indiscutablement, l'implication des États-Unis dans les affaires congolaises a toujours été liée à un objectif de garantir l'accès aux minéraux critiques », a déclaré dans un communiqué rendu public ce mercredi 22 octobre 2025 Frédéric Mousseau, co-auteur du rapport et directeur des politiques à l'Oakland Institute.

Et d'ajouter :

« L'accord de ‘paix’ intervient après des décennies de formation, conseil et soutien américains à des armées étrangères et mouvements rebelles, et à un moment où le Rwanda et son bras armé, le M23, ont étendu leur contrôle territorial dans l'est de la RDC. Il s'agit d'un accord gagnant-perdant qui favorise les intérêts miniers américains et offre une prime au Rwanda pour des décennies de pillage des ressources congolaises » 

Présentée dans le rapport, l'analyse des données historiques du commerce du coltan montre que les États-Unis ont joué un rôle central dans le blanchiment des minerais congolais de contrebande par le Rwanda. Selon ce rapport de Oakland Institute, groupe de réflexion progressiste situé à Oakland , en Californie révèle que les exportations totales de tantale (extrait du coltan) du Rwanda vers les États-Unis ont été multipliées par 15 entre 2013 et 2018.

« Ce bond a eu lieu après la première invasion du M23 de 2012, dans une période où l'administration américaine a décidé de ne pas appliquer son propre mécanisme de sanctions contre le Rwanda. À leur apogée, plus de la moitié des importations américaines de tantale provenaient du Rwanda, malgré la production limitée du pays. Floués ! La ruée vers les minéraux critiques en RDC détaille comment l'intégration économique régionale, au cœur de l'accord de « paix », légaliserait ce système de blanchiment », souligne le communiqué de Oakland Institute.

Au lendemain de la chute de Goma et Bukavu et après l'échec du processus de Luanda, l’accord de Washington et le processus de Doha sont les deux volets complémentaires des initiatives diplomatiques majeures visant à mettre fin aux conflits persistants dans l’Est de la RDC, en particulier ceux impliquant le Rwanda et les groupes armés comme le M23.

Après la signature de l'accord de Washington entre la RDC et le Rwanda sous les auspices des États-Unis d'Amérique, les discussions se poursuivent à Doha dans le but de compléter l’accord de Washington en abordant les dimensions internes du conflit, notamment la restauration de l’autorité de l’État sur l'ensemble du territoire et la réintégration des groupes armés.

L'accord de Washington comprend deux volets majeurs : sécuritaire et économique. Il prévoit notamment le respect de l’intégrité territoriale des deux pays, la cessation des hostilités entre leurs armées, ainsi que l’engagement mutuel de ne plus soutenir de groupes armés comme les FDLR ou le M23/AFC. Il inclut également la mise en place d’un mécanisme conjoint de coordination sécuritaire fondé sur le concept d’opérations adopté à Luanda en octobre 2024.

Sur le plan économique, l’accord entend renforcer la coopération bilatérale autour de projets communs, notamment dans l’hydroélectricité, la gestion des parcs nationaux et la traçabilité des minerais. Il s’appuie sur les cadres régionaux existants – CIRGL, COMESA, EAC – pour favoriser l’intégration économique et lutter contre les circuits illicites. Les États-Unis sont également appelés à jouer un rôle accru en tant qu’investisseurs dans les filières stratégiques.

Clément MUAMBA