Les évêques de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) ont exprimé leur inquiétude face à la persistance de la crise multiforme qui secoue la République démocratique du Congo (RDC). Dans un message rendu public vendredi 16 mai 2025, ces leaders religieux déplorent la crispation du climat politique et la détérioration de la situation socio-économique surtout dans les zones sous contrôle de la rébellion AFC/M23 soutenue par le Rwanda.
"Au moment où le pays a plus que besoin d'être uni et de renforcer la cohésion nationale, nous assistons à une grande crispation du climat politique. Les consultations pour la formation d'un Gouvernement d'union nationale avec pour objectif la décrispation du climat politique sont faites dans un environnement difficile ne permettant pas d'atteindre les résultats escomptés. Malgré les interpellations du Chef de l'Etat relatives au fonctionnement du système judiciaire et la tenue des Etats Généraux de la Justice, celle-ci continue à être manipulée par les plus forts. En plus, les scandales étalés au grand jour dans le traitement des contentieux électoraux sont malheureusement restés impunis jusqu'à présent. A cela nous pouvons ajouter des cas de spoliations des terrains, dont l'Eglise catholique est aussi victime, qui sont devenus davantage une pratique courante", disent les évêques dans un message lu par Donatien Nshole, Secrétaire général de la CENCO.
Au plan socio-économique et humanitaire, les évêques notent que ceux qui vivaient dans les camps des déplacés à Goma et aux alentours, contraints de retourner dans leurs milieux d'origine, ont du mal à se réinsérer.
"Les moyens consentis par le Gouvernement pour répondre à l'effort de guerre impactent négativement l'économie du pays et affectent la vie des Congolais, surtout ceux de l'Est du pays. La fermeture des banques et des aéroports, dans les territoires sous le contrôle de AFC/M23, impose à plusieurs familles les conditions de vie difficiles et précaires. Nombreux de ceux qui vivaient dans les camps des déplacés à Goma et aux alentours, contraints de retourner dans leurs milieux d'origine, ont du mal à se réinsérer. Nous exprimons notre compassion et notre proximité spirituelle à toutes les victimes de ces situations dramatiques", ont-ils fait savoir dans leur déclaration.
Face à ce tableau sombre dressé, les évêques de la CENCO ont une nouvelle fois appelé à la mise en œuvre du Pacte social pour la paix et le bien-vivre ensemble en RDC et dans la région des Grands Lacs. Pour les évêques, une paix durable est une priorité pour l'Église catholique.
"L'initiative du Pacte social pour la paix et le bien-vivre ensemble en RDC et dans la Région des Grands Lacs est une réponse citoyenne aux crises récurrentes que notre pays traverse depuis son accession à l'indépendance. C'est un processus de paix qui a pour vocation de mobiliser le peuple congolais afin de combattre tout ce qui entrave son développement et son bien-être intégral", a fait savoir le SG de la CENCO, Donatien Nshole.
Et de poursuivre :
"Le forum national ne doit pas être réduit à un espace de partage du pouvoir. Il s'agit d'abord, de relire notre histoire commune avec l'aide des experts scientifiques et savants congolais, en vue de dégager les causes profondes des crises récurrentes. Bien plus, ce travail scientifique permettra d'identifier les raisons pour lesquelles les dialogues passés n'ont pas pu y mettre fin et, surtout, de proposer aux gouvernants les politiques publiques en vue du redressement rapide de notre pays".
Au lendemain de la prise de la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu par la rébellion du M23 soutenue par l'armée Rwandaise, des voix en interne et à l'extérieur du pays s'étaient levées pour appeler les différentes parties au dialogue national pour aboutir à la résolution de la crise sécuritaire dans l'Est de la République Démocratique du Congo. L'église catholique et l'église protestante ont initié et proposé pour ce faire, des consultations de la classe sociopolitique pour un dialogue national. Mais cette démarche est réfutée par le parti présidentiel, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) qui affirme que « l’église n’a pas vocation de prendre des initiatives politiques ».
Au niveau international, à l'instar de la France et de la Belgique qui soutiennent les initiatives de paix en cours, ne cessent d'encourager également des initiatives nationales en vue de régler durablement les conflits dans l'Est du pays. Jusque-là, Kinshasa semble réticent à ces différents appels de certains États au niveau national.
Clément Muamba