La réunion ministérielle de la communauté de développement de l'Afrique Australe (SADC) et de la communauté de l'Afrique de l'Est (EAC) tenue lundi 17 mars à Harare (Zimbabwe), a adopté une feuille de route détaillant les mesures de mise en œuvre des résolutions à l'immédiat, à moyen et à long termes pour résoudre le conflit dans l'est de la RDC où la rébellion du M23 soutenue par le Rwanda mène la guerre contre l’armée congolaise.
La feuille de route devra désormais être soumise à un sommet conjoint SADC-EAC pour adoption ou entérinement. Le communiqué final précise que ces mesures immédiates doivent être exécutées endéans 30 jours. Il s'agit notamment d'entraîner un dialogue direct avec les parties au conflit au niveau militaire afin qu'elles s'engagent à un cessez-le-feu inconditionnel, à la cessation des hostilités et à l'arrêt de toute expansion territoriale afin de permettre la liberté de mouvement des agences humanitaires, l'ouverture des aéroports (Goma et Kavumu) et l'évacuation ininterrompue de la zone de conflit.
Un mécanisme de vérification conjoint SADC-EAC sera mis en place pour surveiller la cessation des hostilités et le cessez-le-feu inconditionnel. Compte tenu de la présence sur le terrain du Mécanisme conjoint de vérification élargi (MCVE) de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et de la MONUSCO, la réunion a recommandé que la CIRGL s'engage à examiner la possibilité pour la SADC et la CAE de renforcer le Mécanisme conjoint de vérification des opérations (MCVE) en détachant du personnel supplémentaire pour servir d'outil principal de surveillance de la cessation des hostilités, du cessez-le-feu et de la situation humanitaire.
Il est également prévu qu’une équipe conjointe d'évaluation technique de terrain SADC-EAC, composée de 12 à 16 experts issus de l'armée et d'autres agences gouvernementales, soit constituée pour évaluer la situation sécuritaire et humanitaire dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, ainsi que l'état des infrastructures critiques (aéroports et autres infrastructures clés). Cette équipe sera composée d'experts en opérations, en renseignement, en logistique, en travaux publics et en aviation.
En ce qui concerne les mesures à moyen terme (soit 30 à 120 jours), il sera question de mettre en œuvre des mesures de confiance aux niveaux politique et militaire, parallèlement à la négociation et à la médiation. Le dialogue avec les parties au conflit sera assuré par les représentants conjoints de l’EAC et de la SADC dans le cadre fusionné Luanda-Nairobi ; la déclaration d'un cessez-le-feu permanent ; l’appel à l'ONU à élaborer des mesures/un mandat appropriés pour renforcer la capacité de la MONUSCO à soutenir les efforts de sécurisation des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
Pour les mesures à long terme (au-delà de 120 jours), la feuille de route renseigne que l’EAC et la SADC doivent explorer les moyens de renforcer les capacités des forces gouvernementales de la RDC afin qu'elles puissent assurer la sécurisation de Goma, Bukavu et des zones environnantes; s'attaquer aux causes profondes du conflit ; rétablir les autorités étatiques et civiles du gouvernement de la RDC (pour la souveraineté du pays et le respect de l'intégrité territoriale) dans les zones occupées par le M23 ; et soutenir les efforts de stabilisation et de consolidation de la paix.
La réunion conjointe SADC-EAC était initialement programmée le vendredi 28 février dernier à Harare, au Zimbabwe mais elle a été reportée en dernière minute. La convocation de cette réunion est conforme aux résolutions issues du sommet conjoint SADC-EAC tenue à Dar es salam (Tanzanie) qui ordonnait qu'une réunion conjointe de ces blocs régionaux se tienne pour évaluer le degré d'exécution des différentes recommandations.
Même si le communiqué ne reconnaît pas le Rwanda comme soutien à la rébellion du M23, selon plusieurs rapports des Nations-Unies, l'armée rwandaise est active en RDC et combat aux côtés de la rébellion du M23 pour la conquête des espaces dans la province du Nord-Kivu. La partie orientale de la RDC est secouée depuis plusieurs décennies par des conflits et des relations tumultueuses exacerbées depuis le génocide rwandais de 1994. La RDC a toujours accusé notamment le Rwanda de vouloir y faire main basse sur ses nombreuses richesses naturelles, ce que Kigali dément.
Le sommet conjoint SADC-EAC se tient en exécution de la décision du Sommet extraordinaire des chefs d'État et de gouvernement de la SADC du 31 janvier 2025 à Harare, en République du Zimbabwe, où le Sommet a évalué la situation sécuritaire précaire et en évolution rapide dans l'Est de la RDC, et a appelé à un sommet conjoint immédiat de la SADC et de l'EAC pour trouver la meilleure voie à suivre et une approche collective de la situation sécuritaire en RDC.
Clément MUAMBA