A Inongo, la prison centrale fait piètre figure. Elle offre le visage d’un désastre en voyant l'état de ses murs et départements. Construite en 1928, cette maison pénitentiaire, censée être la plus importante de la province de Mai-Ndombe, est aujourd’hui dans un état de délabrement très avancé, au point de ne plus mériter son appellation.
Les murs fissurés menacent de s’effondrer, tandis que les fenêtres et portes en bois, rongées par le temps, ne tiennent plus que par miracle. La cour de l’établissement est envahie par des herbes atteignant parfois deux mètres de hauteur. Sur les sept pavillons que la prison compte, seuls trois restent partiellement fonctionnels, les autres étant inutilisables faute de toiture.
Les installations hygiéniques, laissées inachevées, ajoutent à la précarité du site pour les détenus contraints à s'y adapter. Les détenus, au nombre de 87, bien en dessous de la capacité carcérale de 150, vivent dans des conditions indignes, exposés à une cour presque ouverte où la sécurité ne reste qu’un vain mot, avec un faible effectif policier.
Quant à la salle d’audience, elle est devenue une caricature de ce qu’elle fut jadis. Dépourvue de toiture et de fenêtres, elle est envahie par la végétation, les herbes ayant poussé jusqu’à hauteur de ceinture. Impossible de se rappeler la dernière fois qu’un procès s’y est tenu.
L’infirmerie, autrefois censée garantir un minimum de soins, est aujourd’hui réduite à un dépôt de briques cuites. Un de ses murs s’est écroulé, rendant la pièce inutilisable. À quelques pas de là, une maisonnette témoigne d’un épisode marquant de l’histoire politique congolaise : c’est là qu’Étienne Tshisekedi, figure emblématique de l’opposition, fut incarcéré pendant deux semaines en 1972. Mais comme le reste des infrastructures, ce bâtiment est tombé en ruine, son histoire noyée dans l’abandon.
Le tableau s’assombrit davantage lorsque le reporter de actualite.cd découvre que le directeur adjoint de la prison partage son bureau avec des sacs de manioc, entreposés là faute d’espace. Cette confusion illustre à elle seule le chaos qui règne dans cet établissement.
Entre désolation et inaction, Isidore Bolikala, président du cadre de concertation de la société civile du Mai-Ndombe, dit être au bout de son intelligence en matière de plaidoyer.
"Nous avons déclaré, alerté, dénoncé, mais rien ne change. La prison centrale d’Inongo n’a plus rien d’une prison. Les murs sont écroulés, les détenus vivent dans des conditions inhumaines. Tout y est difficile : manger, se laver, faire ses besoins. Même les murs sont fatigués. C’est insupportable", a-t-il indiqué.
Pour cet acteur de la société civile, il est urgent de passer à l’action. La construction d'une nouvelle prison s'impose.
"La construction d’une nouvelle prison est une nécessité absolue. Même si le gouvernement central ne la considère pas comme prioritaire, nous disons que c’est plus qu’une urgence. Cette prison peut s’écrouler à tout moment. C’est une urgence, une urgence, une urgence", a-t-il insisté.
Avec près d’un siècle d’existence, la prison centrale d’Inongo incarne à elle seule l’état de délabrement du système carcéral congolais. Mais malgré les nombreux rapports et alertes, le silence des autorités reste assourdissant. L’avenir de cet établissement semble condamné, tout comme la dignité des détenus qu’il abrite encore.
Jonathan Mesa