Minerais de sang : la RDC attaque Apple en justice, jusqu’où ira l’affaire ?

ACTUALITE.CD

Les autorités congolaises ont déposé une plainte contre Apple en France et en Belgique, accusant la multinationale de tirer profit de minerais provenant de zones de conflit en République démocratique du Congo. Cette démarche s’appuie sur des preuves qu’elles jugent solides, mettant en cause la chaîne d’approvisionnement de l’entreprise américaine.

Des preuves documentées et des témoignages

La RDC fonde sa plainte sur plusieurs éléments. Parmi eux, un rapport publié en avril 2024, intitulé "Minerais de sang : Le blanchiment des 3T de la RDC par le Rwanda et des entités privées". Ce document détaille les pratiques illégales d’exploitation et de blanchiment de minerais – étain, tantale et tungstène – extraits des zones de conflit à l’est du pays. Selon ce rapport, ces minerais transiteraient par le Rwanda avant d’intégrer les chaînes d’approvisionnement mondiales.

Les autorités congolaises s’appuient également sur des études réalisées par des organismes internationaux, tels que les Nations Unies et l’ONG Global Witness, qui établissent des liens entre le commerce de ces minerais et les conflits armés en RDC. Des témoignages de personnes impliquées dans la chaîne d’approvisionnement, ainsi que des informations obtenues grâce à des lanceurs d’alerte, viennent étayer ces accusations.

Par ailleurs, Kinshasa dénonce les failles des systèmes de traçabilité, tels que l’initiative I-T-S-C-I, censée garantir l’origine des minerais. Les autorités estiment qu’Apple continuerait d’utiliser ces mécanismes pour masquer l’origine réelle des ressources employées dans ses produits.

Une plainte déposée en France et en Belgique

La décision de porter plainte dans ces deux pays repose sur plusieurs arguments. La RDC souligne que la France et la Belgique disposent de lois strictes en matière de blanchiment, de crimes de guerre et de pratiques commerciales trompeuses. Ces cadres juridiques permettent de traiter des affaires complexes impliquant des multinationales.

Les avocats de la RDC rappellent également la responsabilité coloniale de la Belgique et insistent sur la nécessité d’examiner les pratiques actuelles de pillage des ressources naturelles. En outre, la présence de filiales d’Apple dans ces pays offre une base légale pour mener des enquêtes avec des implications potentielles à l’échelle européenne. Les avocats espèrent par ailleurs élargir le débat en saisissant la Commission européenne, afin de renforcer la traçabilité des minerais et la responsabilité des entreprises dans l’Union européenne.

La réponse d’Apple

Apple rejette catégoriquement les accusations portées contre elle. La firme affirme avoir demandé à ses fournisseurs de suspendre tout approvisionnement en minerais provenant de la RDC et du Rwanda dès la détérioration de la situation sécuritaire. L’entreprise met également en avant son engagement en faveur du recyclage, déclarant que 99 % du tungstène utilisé dans ses produits proviennent désormais de sources recyclées. Enfin, Apple insiste sur la rigueur de ses audits, affirmant que sa chaîne d’approvisionnement respecte des normes éthiques et environnementales strictes.

Cette affaire, qui mêle accusations d’exploitation illégale, enjeux de traçabilité et responsabilité des grandes entreprises, pourrait relancer le débat sur l’éthique des chaînes d’approvisionnement mondiales.