Dans une étude dénommée « Livre blanc sur les cahiers des charges des entreprises minières en R.D. Congo », publié ce mois de novembre, le Centre carter note un taux de signature des cahiers des charges reprenant les besoins des populations victimes d’exploitation minière, en termes de développement durable, en deçà des attentes.
Selon ce rapport, sur les 402 cahiers prévus entre 2018 et 2024, seuls 71 ont été signés, soit à peine 18%.
Par ailleurs, le Centre carter juge également les budgets globaux de 71 cahiers des charges signés jusqu'à juin 2024 d’insuffisants. L'étude révèle que les budgets annuels représentent en moyenne seulement 0,2% du chiffre d'affaires des entreprises minières concernées.
« Les estimations faites sur base d’un échantillon de dix (10) cahiers des charges signés et approuvés que l’équipe du Centre Carter a pu examiner montrent que le budget du cahier des charges signés pour cinq (5) ans est financé en moyenne par 1% du chiffre d’affaires d’une seule année de chacune de ces entreprises minières. Ceci signifie que le budget annuel de ces cahiers des charges est d’environ 0,2% des chiffres d’affaires de ces entreprises minières. Ces estimations reflètent la tendance globale de la modicité des budgets des cahiers des charges signés entre 2018 et 2024 », peut-on lire dans ce rapport.
D’où doit venir le financement des cahiers des charges ?
La question du financement des cahiers des charges des communautés riveraines impactées a toujours été source de divergences entre les opérateurs miniers et les communautés bénéficiaires.
Selon Fabien Mayani, chef du programme Droits humains et transition juste au Centre Carter, contacté par ACTUALITÉ.CD, les détenteurs de titres miniers exploitent souvent la disposition du code minier relative à la dotation de 0,3% du chiffre d'affaires pour le développement durable afin de se soustraire à leurs obligations financières liées aux cahiers des charges
« Outre la participation au développement durable des communautés riveraines à travers la constitution du fonds de la dotation minimale de 0,3% du chiffre d’affaires des entreprises, le code minier de 2018 prévoit également le paiement direct d’une portion de la redevance minière aux autorités provinciales et locales ainsi que la signature et l’exécution du cahier des charges de responsabilité sociétale », a-t-il fait savoir.
Selon lui, l’exécution des cahiers des charges ne doit pas avoir pour source de financement le 0,3 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. Il doit par contre provenir du budget social des entreprises minières, comme le précise l’article 7 du chapitre 2, relatif aux obligations des parties, contenu dans l’annexe 7 de la directive relative au modèle-type de cahier des charges de responsabilité sociétale.
Causes de la non signature et des faibles budgets alloués aux cahiers des charges
Le Centre carter note que la faible signature des cahiers de charge et la modicité des budgets alloués à ceux déjà signés sont liées notamment à l'asymétrie d'information entre les communautés et les entreprises, à un manque de culture d'investissement durable chez certains opérateurs, et au manque de volonté par certains.
Le gouvernement central, ainsi que les autorités locales et provinciales ne sont pas épargnés. Ils sont accusés du manque des mécanismes du contrôle et de suivi.
Parmi plusieurs recommandations pour remédier à cette situation, le Centre carter appelle le ministre des mines à signer un arrêté fixant le seuil minimal du budget du cahier des charges à 5% du dernier chiffre d’affaires de l’entreprise minière ou 5% du chiffre d’affaires prévisionnel pour les entreprises en phase de développement.
Cette structure invite les gouverneurs des provinces de prévoir une ligne budgétaire dans le projet d’édit provincial portant budget de la province pour l’appui au fonctionnement de la commission permanente d’instruction des cahiers des charges.
Le parlement est quant à lui appelé à introduire dans le cadre juridique de la RDC la législation relative à la protection de l’environnement, à l’exploitation des ressources naturelles et à l’accès aux terres rurales les principes et standards du droit au consentement libre, préalable et éclairé des communautés.
Bruno Nsaka