Élections en RDC : alors que la CENI exige plus d'un milliards USD, l'ODEP estime que le budget actuel ne devrait pas dépasser 600 millions USD

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Machine à voter (CENI).

Dans son dernier communiqué de presse l'Observatoire de la Dépense Publique (ODEP) dénonce l'opacité du financement du processus électoral en République Démocratique du Congo. Selon les données de cette Ong évoluant dans le secteur des finances publiques le gouvernement a déjà alloué 480 millions USD à la CENI sur les 642 millions USD sollicités en violation des lois.

Selon Dénis Kadima, président de la Commission Nationale Électorale Indépendante (CENI), le processus total va coûter plus d’un milliards de dollars. Un coût que l'ODEP juge exagéré car non vérifié et approuvé par les instances de contrôle. 

L'ODEP craint des objectifs de détournements, des retro-commissions et autres pratiques d’enrichissements illicites derrière le coût "exagéré" de la CENI pour la tenue des élections en RDC. 

"Nous estimons que le budget actuel ne devrait pas dépasser 600 millions de dollars pour couvrir les élections présidentielles, législatives nationales et provinciales, même si on y ajoutait la révision du fichier électoral, évalué à près de 70 millions de dollars, si on s’en tient au budget présenté en 2015 pour couvrir les mêmes besoins. Selon les données recueillies auprès du cabinet du Ministère des Finances il y a une semaine, sur les 642 millions sollicités en violation des lois, un décaissement d’environ 480 millions a déjà été effectué. Un reliquat de 142 millions reste à effectuer en plus d’environ 400 millions sollicités en 2023. Le processus total va coûter plus d’un milliards de dollars, comme si le pays n’était pas sinistré et n’avait pas une guerre atroce à gérer. Le coût exagéré des besoins non vérifiés et approuvés par les institutions supérieures de contrôle vise des objectifs de détournements, des retro-commissions et autres pratiques d’enrichissements illicites que les besoins d’organiser un processus électoral transparent, crédible et apaisé", dénonce l'ODEP dans son communiqué.

Selon cette Ong, la procédure de mise à disposition des fonds favorise le manque de transparence préjudiciable à la crédibilité même du processus électoral. "Avec un financement opaque, quelle transparence devrons-nous espérer de ce nouvel hold-up électoral qui se profile à l’horizon", s'interroge l'ODEP.

L'ODEP estime que le budget de la CENI ne peut pas atteindre plus d'un milliards car les matériels et la quincaillerie électorale acquis en 2018 existent déjà.

"En 2018, 52%, du budget des opérations électorales couvraient l’acquisition des matériels et la quincaillerie électorale. Ce qui existe déjà, d’après le rapport du processus électoral 2012 à 2019", précise un paragraphe du communiqué de l'ODEP.

Face à cette situation, "l’ODEP constate que le financement du processus électoral est en danger. La course à l’enrichissement illicite, les mauvaises pratiques décriées sous Corneille Naanga ont refait surface. Le pays n’est pas sorti du vieux démon des élections business", déplore l'ODEP. 

En effet, en perspective d'éviter le pire, l'ODEP a formulé quelques recommandations :

Au premier Ministre de : - Prendre des mesures nécessaire  pour garantir à la CENI la jouissance effective  de l’autonomie financière conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi organique  n° 10/013 du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de la commission électorale nationale indépendante telle que   modifiée à ce jour ; - Présenter au parlement un collectif budgétaire à chaque fois que des besoins de la CENI non évalués apparaissent ; 

Au ministre des finances d’exiger un plan de décaissement avec chronogramme d’activité avant tout décaissement ;

A la CENI de publier un budget détaillé des opérations électorales assorties d’un plan de décaissement et d’utilisation des fonds reçus pour faciliter le gouvernement à financer le processus électoral ;

Aux organes de contrôle (Inspection générale des finances et cour des comptes) d’initier un audit complet de la CENI depuis les premiers décaissements jusqu’à fin octobre 2022. La présence pertinente des brigades financières de l’IGF à la CENI s’impose ;

A la société civile de doubler de vigilance, de continuer sans relâche le contrôle, de continuer à éduquer et sensibiliser la population ;

A la population de s’organiser et se prendre en charge pour faire barrage à une réédition d’un nouvel hold-up électoral.

Notons que c'est dans le cadre du suivi citoyen de l’exécution de la loi de finance 2022 que l’Observatoire de la dépense publique suit de près le débat engagé entre le Président de la CENi et le ministre des finances au sujet des fonds décaissés pour les opérations électorales en République démocratique du Congo, entre décembre 2021 et février 2022. 

Jordan MAYENIKINI