Des millions de personnes sont confrontées à un mélange mortel d’Ebola, des violences et de soins de santé inadéquats – Oxfam

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Aujourd'hui, nous vous proposons cette tribune de OXFAM, envoyée à la rédaction.

Un an après la déclaration de l'épidémie d'Ebola en République démocratique du Congo (RDC), Oxfam alerte que le virus, le conflit violent et l'insuffisance des soins de santé sont un mélange mortel pour les populations congolaises.

Certains progrès ont été réalisés pour contenir le virus qui a coûté la vie à 1 800 personnes. Mais le fait qu'un deuxième cas vient d'être signalé à Goma, la plus grande ville de l'Est de la RDC avec environ deux millions d'habitants, ainsi que les décès récents d'Ebola en Ouganda, montrent le potentiel dévastateur d'une spirale incontrôlable de la maladie.

Corinne N'Daw, Directrice pays d'Oxfam en RDC, a déclaré : "Nous espérons sincèrement que ce nouveau cas à Goma est un cas isolé, car le virus pourrait se propager rapidement dans une ville qui compte deux millions d'habitants."

Les troubles généralisés causés par l'augmentation de la violence et des déplacements dans le pays entravent les efforts de contrôle de l'épidémie d'Ebola, qui s'inscrit dans une crise humanitaire beaucoup plus vaste. Dans l'ensemble de la RDC, plus de 12,8 millions de personnes ont besoin d'aide humanitaire, mais le pays n'a reçu que le quart du financement d'urgence dont il a besoin jusqu'ici cette année, ce qui laisse un déficit de 1,2 milliard de dollars.

Dans la province de l'Ituri, des centaines de milliers de personnes vivent dans des camps de fortune surpeuplés à la suite d'une flambée de violence en juin, qui a causé la mort de centaines de personnes. Les nouveaux déplacés arrivent chaque jour et au moins 25 des camps ont doublé de taille au cours du mois de juin. La situation est catastrophique, avec très peu d'eau potable et d'assainissement, ce qui crée des conditions très propices à la propagation des maladies.

Outre les personnes déplacées vivant dans les camps, des dizaines de milliers de personnes vivent au sein des communautés d'accueil, ce qui exerce une pression supplémentaire sur des personnes déjà extrêmement vulnérables et qui n'ont pratiquement aucun accès aux soins de santé.

Corinne N'Daw, déclare : "La violence incessante qui sévit dans la région dévaste la vie de centaines de milliers de personnes, les empêchant d'obtenir des services essentiels, comme les soins de santé, et, en fin de compte, entravant la réponse humanitaire et Ebola dans son ensemble".

"Ebola bénéficie à juste titre d'une attention et de financements mondiaux et ce nouveau cas à Goma montre à quel point cette attention est nécessaire. Cependant la crise humanitaire au sens large reste largement ignorée. Il est essentiel que des fonds soient également fournis pour aider les millions de Congolais qui ont été déplacés par la violence, y compris ceux qui ont récemment fui en Ituri. Des efforts nationaux et internationaux sont également nécessaires de toute urgence pour s'attaquer aux causes profondes de la violence qui sévit en RDC depuis des décennies."

L'insuffisance des systèmes de santé en RDC exacerbe le problème ; avant la dernière épidémie d'Ebola, il n'y avait que neuf médecins formés pour 10 000 habitants dans le pays. Bien que davantage de ressources aient été mobilisées pour lutter contre le virus Ebola, des enquêtes récentes sur les perceptions et les pratiques ont montré que les agents de santé locaux, qui sont en première ligne de la riposte au virus Ebola, se sentent souvent mal équipés ; beaucoup ont déclaré ne pas connaître tous les symptômes (notamment les symptômes "secs" comme les douleurs abdominales) ; comment repérer un cas où référer les personnes présentant les signes du virus ; ou se sentent incapables de référer les cas éventuels aux centres de traitement Ebola.

Dans la région de Mandima, où 200 cas ont été signalés, plus de 75% des agents de santé interrogés ont déclaré qu'ils estimaient ne pas avoir reçu une formation ou des informations suffisantes.

À Butembo, l'une des zones les plus touchées, près de 50 % des agents de santé interrogés ont déclaré ne pas se sentir suffisamment informés pour pouvoir identifier un cas suspect.

Corinne N'Daw : "Il faut beaucoup plus de formation et de soutien pour les agents de santé locaux en première ligne. L'une des priorités du nouveau financement d'Ebola, promis par la Banque Mondiale et d'autres donateurs, doit viser à doter les agents de santé des compétences et des ressources dont ils ont besoin pour faire leur travail.

"Il est également crucial de disposer d'un personnel local bien formé pour instaurer un climat de confiance avec les communautés touchées, ce qui a été un problème majeur jusqu'à présent dans l'intervention.

La réponse d'Oxfam au virus Ebola a aidé plus de 600 000 personnes en travaillant directement avec les communautés touchées pour instaurer la confiance et aider à prévenir la propagation de cette maladie mortelle ainsi qu'à améliorer l'accès à l'eau potable. L'agence internationale travaille déjà à Goma et est prête à intensifier sa réponse si d'autres cas se présentent.

L’épidémie de la maladie à virus Ebola a totalisé un an, jour pour jour, depuis sa déclaration officielle le 1er août 2018.  Selon les données de la riposte, le cumul des cas est de 2.701, dont 2.607 confirmés et 94 probables. Au total, il y a eu 1.813 décès (1.719 confirmés et 94 probables) et 776 personnes guéries.

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