Kamerhe : « Si nous continuons à perdre du temps en plus du glissement, ce sera la glissade et ça sera terrible» - INTERVIEW

Vital Kamerhe était l’invité de la rédaction d’actualite.cd, il s’est confié à <a href="https://twitter.com/bujakeratshiams">Stany Bujakera</a>, <a href="https://twitter.com/Ange_kason">Ange Kasongo</a> et <a href="https://twitter.com/ligodipatient">Patient Ligodi</a>. Co-modérateur du Dialogue politique national, il revient sur ce forum, le processus électoral, ses rapports avec le Rassemblement et les récents évènements du 19 et 20 septembre 2016. Entretien

<strong>Plusieurs morts et vous avez dit que ces évènements vous confortent dans votre position. Manifestations et Dialogue, ce n’est pas antinomique ? </strong>

« Quand j’ai choisi la voie de la paix nous avions deux positions : ou la violence au contour mal défini et aux issues incertaines ou donner la chance à la paix. Nous avons tous exigé les éléments que nous retrouvons dans <strong>la résolution 2277.</strong> Que celui qui est contre cette résolution lève le doigt. Personne ! Nous disons : Donnons la chance à la paix. Sur la voie de la violence personne ne sort vainqueur. Je l’avais dit comme un prophète. Aujourd’hui, nous déplorons les morts. Les familles éprouvées peuvent témoigner de la peine qu’elles ressentent alors que les politiciens  continuent à se pavaner dans leurs maisons et à appeler à la violence. Nous qui sommes au <strong>Dialogue</strong> nous avons fixé des lignes rouges et jusque-là ça marche. Nous avons rejeté le fichier de 2011. Nous avons accepté la séquence, c’est-à-dire commencer le processus électoral par la présidentielle. Il ne reste que le dernier verrou, celui du calendrier électoral. Pour nous, il doit être le plus court possible. <strong><em>Donnons la chance à la paix</em></strong>. Nous avons toujours dans nos poches l’article 64, mais on ne l’utilisera que quand on aura épuisé toutes les autres voies.

<strong>Vous ne considérez pas ces manifestations comme un rejet de ce Dialogue ? </strong>

Pour vous, toute la population congolaise était dans la rue ? Déjà que Kinshasa n’est pas la<strong> RDC</strong>. Si vous pouvez me citer toutes les provinces qui étaient dans la rue alors on peut ensemble faire la comptabilité. Tout en déplorant les morts et tout en respectant la position de ceux qui estiment que le 19 septembre Kabila doit partir, je pose la question : Quelle est l’alternative ? Ils proposent quelle solution ? Nous avons connu les empoignades entre <strong>Tshisekedi et Mobutu.</strong> Nous avons vécu 7 ans de transition avec quel résultat ? C’est Laurent Kabila qui a surpris tout le monde. Il a remis tout à plat : plus d’activités politiques, etc. Un décret signé par Lutundula a annulé la constitution. Tshisekedi a été relégué à son village. Personne n’était sorti dans la rue pour dire : Pourquoi on peut reléguer notre leader au village.  Si nous ne faisons pas attention, nous allons revoir la même chose. J’ai lu <strong>Olivier Kamitatu</strong> et je l’ai écouté sur la Radio Top Congo. Je me dis qu’il fallait qu’il le dise avant. Ma position : je préfère dialoguer avant pour épargner les vies humaines. Certains veulent voir d’abord les gens mourir avant de soutenir le Dialogue. Evitons les égos. La nation congolaise passe avant tout le monde.

<strong>Peut-on considérer que le Dialogue s’enlise ?</strong>

C’est nous qui avons proposé la suspension. Je remercie la Majorité et la société civile d’avoir accepté notre position. Nous ne pouvons pas discuter à la cité de l’<strong>UA</strong> pendant que nous avons vu nos frères et sœurs mourir. Ce n’est pas africain. Ce n’est pas humain. Il ne faut pas confondre la précipitation à la vitesse. Nous voulons avoir un  bon accord. On dit que la fin justifie le moyen. Je ne suis pas pressé. Je suis guidé par les principes. Il nous fallait un<strong> fichier électoral</strong>, une séquence qui commence par la présidentielle et il nous faut un calendrier qui présente des dates précises : la date de la convocation du scrutin, la date du scrutin et la date de passation du pouvoir. Il faut ajouter la garantie que cet accord sera respecté par tous alors je dirai qu’on a fait œuvre utile.

<strong>Un bilan à mi-parcours ?</strong>

Quand je vois les messages de tout le monde, je suis conforté dans ma position. Le message de l’Eglise catholique, celui du <strong>G7</strong> et celui de la communauté internationale, tout le monde parle de 2017. Nous ne sommes pas les seuls à avoir compris que mieux vaut perdre un  peu de temps mais préserver la paix sociale. Nul n’est prophète chez soi. Cette position, je l’avais annoncé depuis longtemps. Nous voulons la même chose, mais les approches sont différentes. Je crois que personne ne sort vainqueur de la violence. Il faut établir les responsabilités entre la police, l’armée et ceux qui ont planifié des actions de vandalisme. Il faut établir les responsabilités. C’est aussi cela l’Etat de droit.

<strong>La question de notre consoeur Ange Kasongo qui est à Paris : Où en êtes-vous avec Pasi nayo pasi na nga, l’alliance Kamerhe-Katumbi-Tshisekedi (Félix) ?</strong>

Ça continue. J’ai pris la feuille de route du Rassemblement, de <strong>Moise Katumbi, de Félix Tshisekedi.</strong> Il faut l’alternance, le respect de la constitution, etc. J’ai intériorisé tout cela. Ils verront que je ne vais pas accepter tout ça. C’est ça être un homme d’Etat, mais pour l’approche, je considère qu’il faut préserver les vies humaines et arriver aux mêmes résultats. Peut-être que j’ai tort, mais j’ai remarqué que le <strong>19 septembre</strong> on a eu des morts et quel est le résultat ? Le président de la république a déclaré qu’il va partir ? Nous voulons avoir des dates qui soient clairement marquées et que le président de la république ne soit pas candidat.

<strong>Vous vous êtes éloigné de Katumbi parce qu’il s’est déclaré candidat à la prochaine présidentielle ? Question d'Ange Kasongo </strong>

Je ne suis pas contre le fait que les uns et les autres se déclarent candidats. Cependant, il ne faut pas se tromper de bataille et d’opportunité. Je pense que la première bataille était de connaitre avec exactitude la date de la présidentielle. <strong>Vous êtes candidat à quelle élection et qui aura lieu quand ?</strong> Nous sommes rattrapés par le temps. Je ne regrette pas.

<strong>Quelle différence faite vous entre l’action du 19 janvier 2015 et celle du 19 septembre 2016 ? Question de Stany Bujakera.</strong>

Janvier 2015, c’était moi qui avais demandé cela et je l’assume. L’objectif était bien défini. L’objectif était d’empêcher le pouvoir d’adopter le projet de loi qui conditionnait la tenue des élections à l’organisation du recensement général. Le sang des congolais qui a coulé nous a fait gagner. La loi a été retirée. Le 19 septembre ? L’objectif, c’était quoi ? <strong>Que Kabila parte</strong>. Est-ce qu’il est parti ? On a pillé les écoles. Est-ce que les organisateurs savaient qu’on allait piller les écoles ? Que les jeunes allaient se droguer ? Que la police allait tirer à balle réelle ? Quand on a la tête qui marche,  on allait le prévenir. Le recours à l’article 64, c’est quand on a épuisé toutes les autres voies. Ce sont eux qui m’ont supplié d’aller au Dialogue. J’accepte et ils me disent que j’ai trahi. La voie de la paix est la meilleure. Quand on aura épuisé toutes les démarches, on pourra actionner l’<strong>article 64,</strong> mais de manière organisée. Vous pouvez envoyer les gens dans la rue et un sergent comme Dadis Camara en Guinée nous ramène tous au point zéro. Est-ce qu’on aura gagné ?

<strong>Quelle différence entre la refonte du fichier électoral et le recensement ?</strong>

C’est nous l’opposition qui étions la première à dire que le fichier de 2011 était infecté.<strong> L’UDPS</strong> était même la première à demander une transition pour mieux organiser les élections. La Majorité nous a emboité les pas. La refonte s’impose à nous. Malheureusement, nous nous sommes réveillés en retard. L’abbé <strong>Malu Malu</strong> nous a donné un calendrier plus que global, nous l’avons, jugé surchargé – avec raison - en même temps, nous nous sommes fait piéger (…) Nous n’avons pas multiplié des actions en sachant que le temps n’était pas notre allié et Kabila nous attendait au tournant. C’est en février qu’il accepte la révision du fichier. Maintenant, ne perdons plus le temps. Si nous continuons à tourner autour du pot, ce ne sera pas que le glissement, mais la glissade et ça sera terrible.

<a href="https://soundcloud.com/actualitecd/kamerhe-si-nous-continuons-a-perdre-… l’intégralité de cette interview en audio ici. </strong></a>

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