Conférence de Paris : la société civile de l’Ituri encourage les humanitaires et exhorte les bailleurs de fonds à s’engager davantage pour la paix en allouant des moyens pour couvrir les besoins de la province

Les déplacés de Djugu

Les acteurs de la société civile engagés dans les questions socio-humanitaires en Ituri, saluent la tenue de la conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs, prévue ce jeudi 30 octobre à Paris, en France. Dans une note de plaidoyer parvenue à ACTUALITE.CD ce mardi 28 octobre, rappellent que l’Ituri est l’une des provinces instables de l’est du pays secouées par des violences armées depuis des années ayant fait plusieurs milliers de morts suite à l’activisme des groupes armés locaux et étrangers.

Malgré les opérations militaires menées par les forces de sécurité, les actions pacifiques telles que les marches et journées “ville morte” initiées par les communautés victimes n’ont pas permis d’atténuer les souffrances des civils. Après le territoire de Djugu, les incursions répétées des miliciens CODECO ont touché Mahagi et Irumu, provoquant la naissance de groupes d’autodéfense aux diverses appellations (MAPI, ZAIRE, ZAIRE MAZEMBE, ZAIRE JAMUKULABATU), constitués au sein des communautés ciblées pour riposter aux attaques.

« Nous souhaitons que la situation humanitaire de la province de l’Ituri soit une priorité pour la RDC en cette circonstance combien importante. Plusieurs constats montrent que la crise en Ituri est souvent oubliée, peu médiatisée et semble n’intéresser que très faiblement la communauté tant nationale qu’internationale. Notre appel s’adresse aux participants de ces assises afin qu’ils soient animés par le souci de la paix, particulièrement pour la province de l’Ituri», peut-on lire dans la note signée par Jean Bosco Kisoke, adressée au Gouvernement congolais, aux humanitaires et aux bailleurs de fonds.

Les signataires reconnaissent que les autorités congolaises ont la responsabilité première de protéger et d’assister la population, conformément au principe humanitaire qui stipule que « c’est aux autorités nationales qu’incombe en premier lieu le devoir de fournir protection et assistance humanitaire aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays ». Se référant également aux conventions liant la RDC aux agences des Nations Unies, ils formulent plusieurs recommandations : 

•Que le Gouvernement de la République impose la paix en neutralisant tous les groupes armés réfractaires au processus de paix, et qu’il assiste les personnes déplacées et retournées, notamment par une aide en vivres et non-vivres. Cette assistance constitue une réponse d’urgence essentielle pour soulager leurs souffrances. Ces déplacés vivent dans plusieurs dizaines de sites, certains reconnus dans le système de coordination humanitaire, d’autres non, tandis qu’une partie est accueillie dans des familles hôtes;

• Que le Gouvernement adopte une approche globale et multidimensionnelle dans la résolution du conflit en Ituri, en impliquant les scientifiques et experts : historiens, théologiens, anthropologues, philosophes, sociologues, agronomes, psychologues, politologues, économistes, juristes, et toute personne éprise de paix et connaissant les réalités de la province.

« Il est constaté que de nombreux chercheurs, hommes politiques, institutions et organisations contribuent, parfois inconsciemment, à la falsification de l’histoire et du contexte des atrocités. Cela entretient la pérennisation du conflit, car les analyses se basent souvent sur des faits politiques sans tenir compte des autres dimensions de la question », souligne encore le document.

Les acteurs de la société civile invitent enfin les partenaires humanitaires à ne pas se décourager malgré les conditions sécuritaires difficiles dans lesquelles ils opèrent, rappelant que la crise de l’Ituri est complexe et particulière au regard du concept d’« urgence » humanitaire. Aux bailleurs de fonds, ils lancent un appel à influencer pour la paix et à allouer des moyens conséquents afin de répondre aux besoins humanitaires de la province : sécurité alimentaire, abris, santé, éducation, protection, nutrition et articles ménagers essentiels.

Paris, capitale française, s'apprête à accueillir  ce jeudi 30 octobre 2025 la Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs, organisée en coordination avec le Togo, médiateur de l’Union africaine. Selon le Quai d’Orsay (Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères), l’objectif principal est de mobiliser la communauté internationale pour répondre à l’urgence humanitaire dans l’est de la RDC et dans la région. La conférence vise également à soutenir les processus de négociation et de médiation en cours, portés par les États-Unis, le Qatar et l’Union africaine.

Toujours selon Paris, cette rencontre permettra d’aborder aussi l’intégration économique régionale, considérée comme un vecteur essentiel d’une paix durable. Elle offrira à la communauté internationale l’occasion de réaffirmer son engagement en faveur de la paix et de la prospérité dans la région des Grands Lacs, tout en soutenant concrètement les populations locales.

Clément MUAMBA