Il existe ce jour, plus de 122 millions de déplacés de force dans le monde, d’après le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), Filippo Grandi qui s’exprimait à l'ouverture de la 76e session du Comité exécutif du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) à Genève en Suisse.
De la Syrie au Myanmar, du Soudan du Sud au Yémen, de l’Afghanistan à République démocratique du Congo, mais aussi en Ukraine et au Soudan, des conflits ont conduit au déplacement de millions de personnes. En Amérique latine et dans les Caraïbes, des crises complexes entraînent des déplacements complexes, notamment de Vénézuéliens, de Nicaraguayens, d’Haïtiens et d’autres populations.
« Depuis 2015, le nombre de personnes contraintes de fuir leur foyer en raison de la guerre et des persécutions a pratiquement doublé, atteignant 122 millions. Les déplacements forcés, la mobilité humaine en général ont également gagné en rapidité et en complexité. La fuite d'Ukraine en 2022, suite à l'invasion russe à grande échelle, a constitué le déplacement massif le plus rapide depuis la seconde guerre mondiale. En quelques semaines, des millions de personnes ont cherché refuge au-delà des frontières ou dans des régions plus sûres d'Ukraine », a déclaré Filippo Grandi.
Et de poursuivre :
« Au Soudan, les lignes de front mouvantes d'un conflit acharné entre des forces rivalisant pour la suprématie au détriment de leur propre peuple, conjuguées aux multiples factions armées opérant en dehors des structures de commandement centralisées, ont fait des ravages et ont entraîné une mosaïque de mouvements de réfugiés, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays. Des dynamiques similaires existent au Soudan du Sud, en République démocratique du Congo, au Myanmar, au Sahel et dans de nombreux autres pays ».
M. Grandi a révélé que cette année, il s'était fixé comme objectif de se rendre dans ces pays pour palper du doigt les réalités sur terrain mais aussi pour se rapprocher d'autres agents du HCR dans ces différents pays.
« Cette année, je me suis rendu dans pratiquement toutes les situations humanitaires majeures où le HCR intervient : Ukraine, Moldavie, Syrie, Turquie, Jordanie, Liban, Bangladesh, Kenya, Tchad, Mexique, Éthiopie, Afghanistan, Iran, République démocratique du Congo, Rwanda et Myanmar. J’ai prévu quelques autres visites avant la fin de l’année. Je l'ai fait intentionnellement. Je voulais constater de mes propres yeux l'impact des coupes budgétaires. Je voulais également discuter avec les gouvernements des moyens par lesquels le HCR pourrait poursuivre son soutien. Et je voulais parler à mes collègues. Être à leurs côtés dans cette épreuve ».
Coupes budgétaires
Le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés a souligné les conséquences extrêmement néfastes des coupes budgétaires de cette année. « Notre budget pour 2025, approuvé, s'élevait à 10,6 milliards de dollars, un montant similaire à celui des années précédentes. Ces dernières années, nous avons reçu environ la moitié de nos besoins budgétaires, soit environ 5 milliards de dollars par an », a-t-il indiqué.
Et d'ajouter :
« Après la forte hausse des contributions due à la crise ukrainienne, anticipant une réduction, nous avons procédé à un ajustement en 2024, avec la suppression d'environ 1 000 postes et le gel de certaines activités. En 2025, nous avons prévu de forts vents contraires financiers et projeté une nouvelle baisse de 10 % des contributions attendues par rapport à 2024. La situation s’est avérée bien pire. En l'état actuel des choses, nous prévoyons de terminer 2025 avec 3,9 milliards de dollars de fonds disponibles, soit une baisse de 1,3 milliard de dollars par rapport à 2024, soit environ 25 %. Et l'année n'est pas terminée. La dernière fois que nous avons eu moins de 4 milliards de dollars, c'était en 2015, lorsque le nombre de personnes déplacées de force était deux fois moins élevé qu'aujourd'hui ».
Pour lui, cette situation pourrait non seulement « contraindre à de nouvelles coupes budgétaires, affectant les réfugiés et les pays d'accueil, mais aussi nous exposer à un début d'année 2026 très difficile, car nous ne disposerions d'aucun report de fonds ni de liquidités pour couvrir nos engagements en début d'année ».
Le budget du HCR pour l'année prochaine s'élève à 8,5 milliards de dollars, a annoncé Grandi, ce qui reflète toujours les besoins, mais avec une appréciation réaliste de la diminution des ressources.
Les Nations-Unies sont affectées par les coupes budgétaires, qui ont contraint l'organisation à réduire drastiquement son plan mondial d'aide humanitaire pour 2025, entraînant une réorganisation des priorités et risquant de priver des millions de personnes d'assistance vitale. Des agences comme le HCR avaient tiré la sonnette d'alarme, avertissant que l'effondrement des financements menace des millions de réfugiés et de personnes déplacées dans le monde. À titre indicatif, entre mai et juin de l'année en cours, l'ONU avait annoncé une réduction de 35% de son plan d'aide humanitaire mondial pour 2025, passant de 44 milliards à 29 milliards de dollars.
Dans ce cadre, le chef de l'humanitaire des Nations Unies a prévenu que la poursuite de la fermeture d'opérations d'assistance pourrait entraîner la mort de millions de personnes. Jusqu'à 11,6 millions de réfugiés pourraient être privés d'aide humanitaire en 2025 en raison de l'effondrement des financements, selon le HCR.
Clément MUAMBA