Réunis lundi 24 février à Bruxelles, les 27 ministres des Affaires étrangères de l’Union Européenne ont évoqué les combats dans l’est de la République démocratique du Congo, le rôle du Rwanda en soutien au M23 et ont enclenché une première salve de sanctions. Toutefois, rapporte nos confrères RFI, une deuxième vague de sanctions a été bloquée par un veto du Luxembourg.
Comme en République Démocratique du Congo, cette situation avait également affecté et choqué certains parlementaires Luxembourgeois. L'un d'eux David Wagner avait adressé une question parlementaire au ministre des Affaires étrangères et du Commerce extérieur et le ministre de la Coopération et de l'Action humanitaire Xavier Bettel afin de s'expliquer sur les raisons de son véto lors du vote à la réunion des ministres des affaires étrangères de l'Union européenne.
Dans sa réplique parvenue à la rédaction de ACTUALITE.CD vendredi 28 février 2025, il dit prendre au sérieux la détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire dans l'Est de la RDC. Il justifie sa position par son engagement par une approche " graduelle" et "pragmatique " et " réversible" de la situation sur terrain.
"Le ministère prend très au sérieux les développements récents et examine les mérites de tous les moyens à la disposition du Luxembourg et de l'Union européenne pour infléchir la trajectoire de la crise, qui ne peut être résolue que à travers une solution politique durable, médiée et portée par des acteurs locaux et régionaux. S'agissant des mesures de l'UE en réaction à la crise, tenant compte de l'importance du respect du droit international ainsi que de nos intérêts à long terme dans la région, le Luxembourg s'engage auprès de ses partenaires pour une approche graduelle, pragmatique et réversible, qui garde la porte ouverte à un dialogue afin de pouvoir répondre aux évolutions sur le terrain, sans nuire à ceux qui ont le plus besoin de notre aide", a expliqué Monsieur Xavier Bettel.
M. Xavier Bettel tient à préciser qu'après la réunion ministérielle conjointe SADC-EAC prévue à Harare s'il n'y a pas évolution de la situation sur le terrain, l'Union Européenne va passer à une nouvelle dimension des sanctions ciblées contre le régime de Kigali.
"L'Union européenne a d'ores et déjà suspendu le dialogue de haut niveau en matière de sécurité et de défense. Au Conseil des affaires étrangères du 24 février 2025, la préparation de sanctions ciblées a été avalisée. Ces sanctions seront adoptées en l'absence de développements concrets dans le cadre des efforts de médiation en cours. Une réunion ministérielle SADC-EAC est prévue le 28 février 2025 à Harare et ses résultats permettront à l'Union européenne d'évaluer si des avancées concrètes se produisent sur le terrain. Le ministère continue de faire un suivi rapproché de la situation, en concertation étroite avec l'Ambassade du Luxembourg à Kigali et la Représentation permanente du Luxembourg auprès de l'Union européenne", a-t-il fait savoir dans sa réplique.
Par la même occasion, le Luxembourg encourage le dialogue entre Kinshasa et Kigali. À l'en croire, il n'y aura pas d'issue ou solution militaire dans le cadre de cette crise sécuritaire.
"Il n'existe pas de solution militaire à cette crise; seule une solution politique basée sur un processus de dialogue inclusif et la démonstration de la volonté politique de chaque partie concernée permettra d'atteindre une paix durable. Le ministère est en contact régulier avec le Rwanda et la RDC, et encourage les dirigeants des deux pays à se réunir et à s'engager dans tous les efforts diplomatiques visant à adresser les causes profondes de ce conflit. Dans un entretien téléphonique récent avec le ministre des Affaires étrangères rwandais, le ministre a demandé des gestes concrets d'engagement dans les processus de médiation en cours.Pour parvenir à une solution durable, le Luxembourg soutient en effet les efforts de médiation des processus fusionnés de Luanda et de Nairobi et appelle au respect du cessez-le-feu, conformément aux conclusions du sommet EAC-SADC", a ajouté le chef de la diplomatie de Luxembourg.
L’Union européenne a suspendu lundi ses consultations en matière de défense avec le Rwanda et annoncé un réexamen du mémorandum d’entente sur les matières premières stratégiques, en raison de la situation en République démocratique du Congo.
"La situation est très grave et nous sommes au bord d'un conflit régional. L'intégrité territoriale n'est pas négociable, que ce soit en RDC ou ailleurs ", a déclaré Kaja Kallas, vice-présidente de la Commission européenne et Haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, à l’issue du Conseil des Affaires étrangères de l’Union.
Selon Kallas, l’UE a pris la « décision politique » d’appliquer des sanctions en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain. Elle a également « exhorté le Rwanda à retirer ses troupes » du territoire congolais. Cette annonce fait suite à une résolution adoptée le 13 février dernier par le Parlement européen, qui appelait à des mesures plus fermes contre Kigali. Les députés européens avaient notamment recommandé la suspension immédiate de l’accord entre l’UE et le Rwanda sur les chaînes de valeur des matières premières durables, tant que Kigali maintiendrait son implication dans l’est de la RDC.
Alors que les combats entre l’armée congolaise et l’AFC/M23 se poursuivent, la position de l’Union européenne vise à renforcer la pression diplomatique sur Kigali, sans exclure d’autres mesures en cas d’aggravation de la situation sur le terrain.
Clément MUAMBA