Le Centre de Recherches en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL) a publié jeudi 9 mai, un rapport qui met à nu le mode opératoire de deux chambres du Parlement, qui ont, entre 2021 et 2023, saigné à blanc la caisse du trésor public à travers des effectifs pléthoriques.
Dans ce rapport de 33 pages, intitulé « le biface du parlement congolais: un contrôleur à contrôle », le CREFDL révèle que les cabinets politiques de l'Assemblée nationale ont recruté 2 756 personnes, rémunérées de manière arbitraire, en violation de son règlement intérieur, qui limite ce nombre à 157.
« Au niveau de l’Assemblée Nationale, le personnel administratif du secrétariat général est 5 fois moins important, en termes d’effectif que le personnel du cabinet politique, soit 612 contre 2 756. Conformément aux articles 235, 236 et 238 du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale révisé, l’effectif du personnel des cabinets des membres du bureau est fixé à 157 dont 28 du personnel administratif, 49 du personnel d’appoint et 80 du personnel domestique. Ceci démontre que le recrutement effectué au niveau du bureau de l’Assemblée nationale est irrégulier. Les effectifs de 2.756 personnes sont rémunérés de manière arbitraire », dit le rapport.
Même chose au Sénat où les effectifs sont de 881 contre 259 affectés au secrétariat général. Par ailleurs, le CREFDL fustige le fait que les deux chambres du Parlement soient tenues par les partis politiques, qui recrutent en masse le personnel, situation qui ne permet nullement le renforcement de l'administration du Parlement et la pérennisation de la compétence.
« Cette situation est similaire à celle du Sénat (Article 252, 253 et 255 du Règlement intérieur). Pourtant le personnel politique affecté au cabinet est de 881 contre 259 affectés au Secrétariat Général. En d’autres termes, les deux chambres du Parlement sont tenues par les partis politiques qui recrutent en masse le personnel à chaque législature. Cette situation ne peut en aucun cas renforcer l’efficacité de l’administration du Parlement et pérenniser la compétence. Se référant à ces statistiques, malgré les salaires et autres avantages octroyés exorbitant aux hauts responsables de ces institutions, le contribuable congolais paye, en plus, leurs domestiques dont le nombre s’élève à 160 pour les deux chambres », révèle CREFDEL.
« Autre personnel», une autre ligne de crédit qui coûte 2,3 millions $ par an à l'État
Cette ligne de crédit, à en croire ce rapport consulté par Actualite.cd, prend en charge un total de 2788 personnes dont 2063 à l'Assemblée nationale et 725 au Sénat, coûtant ainsi à l'État plus de 2 millions de dollars l'an. « Ces allocations y afférentes n’émargent qu’au niveau de ces deux sections qui jouent le rôle clé dans l’amélioration de la qualité de la dépense publique. La suppression de ces crédits aiderait le trésor public à économiser 2,3 millions $ par an, susceptible de financer un laboratoire médical par territoire », indique le CRFDL.
1,2 millions CDF supplémentaire sur le salaire de chaque assistant parlementaire
La loi des finances de l'année renseigne qu'un un assistant parlementaire touche 495 760,15 CDF, soit 246,27$ par mois. le CRFDL révèle, selon les informations concordantes qu'il a recueillies auprès de quelques assistants parlementaires, que ceux-ci perçoivent au contraire 1 720 000 CDF (856,5 USD), soit un écart non retracé de 1,2 millions CDF (609,6 USD) sur leur enveloppe mensuelle, entraînant un impact total mensuel de 304 650 USD. «Ce qui donne un montant annuel de 3 655 800 USD. «L’origine de ce montant supplémentaire décaissé par l’Assemblée Nationale est incertaine et n’émarge pas dans la Loi des finances de l’année», a-t-il signifié
Le CRFDL s'indigne du fait que le Parlement ne saurait, dans cette situation, procéder à la vérification de l'efficacité de la qualité de la dépense publique, avant de regretter la mauvaise organisation du contrôle parlementaire entre 2021 et 2023.
Et, en vue de mettre fin à ces pratiques, cette structure recommande au Président de la République de garantir le fonctionnement efficient de l’Assemblée nationale et du Sénat par une sélection rigoureuse de leurs animateurs, en élaborant un profil robot des animateurs de ces institutions ; au gouvernement de détailler et clarifier les lignes budgétaires appelées « fonds spécial d’intervention » et « autre personnel » dans la loi des finances. À l'inspection générale des finances et à la cour des comptes de diligenter un contrôle au parlement et effectuer un audit approfondi des crédits payés au parlement depuis 2021; à la justice de se saisir d’office des rapports de reddition des comptes 2021-2023 et du rapport provisoire 2023 du ministère du Budget et entamer des enquêtes judiciaires afin d’établir les responsabilités sur la gestion des fonds mis à disposition de l’Assemblée Nationale et du Sénat.
Samyr LUKOMBO