En République démocratique du Congo, la guerre entre l’armée congolaise et le M23 fait rage dans l’Est et le nombre des civils blessés par des armes lourdes ne fait qu’augmenter, a déclaré mercredi à Goma, Robert Mardini, le directeur général du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Il affirme que cette situation représente une menace de saturer les établissements de santé déjà mis à rude épreuve au risque d’aggraver l’une des crises humanitaires les plus importantes et les plus complexes qui sévit dans le monde.
« Ce à quoi nous assistons actuellement dans l’est de la RDC est sans précédent et extrêmement préoccupant à bien des égards. Suite à la récente flambée des hostilités début février, des centaines de civils gravement blessés, dont beaucoup de femmes et d’enfants, ont afflué vers les établissements de santé du Nord-Kivu – 40 % avaient été victimes de bombardements ou d’autres armes lourdes utilisées dans des zones urbaines densément peuplées. Cette nouvelle dynamique vient accentuer la profonde souffrance de si nombreux civils déjà accablés par des décennies de conflit », a expliqué Robert Mardini.
En février, des combats se sont intensifiés dans les villages proches de la cité de Sake (territoire de Masisi), à 27 kilomètres de Goma. Plusieurs explosifs en provenance des fronts ont ainsi atteint la cité de Sake et les quartiers périphériques de Goma faisant plusieurs décès et des dizaines de blessés parmi les civils. Des explosifs ont même touché des camps de déplacés.
« En cas d’utilisation d’armes explosives en zones habitées – y compris à proximité de camps de personnes déplacées – la probabilité d’effets indiscriminés est très forte. En un mot, des civils risquent d’être blessés voire tués. C’est précisément ce que nous observons en ce moment dans le Nord-Kivu – avec les conséquences dévastatrices que cela entraîne », a ajouté M. Mardini.
Le Nord-Kivu instable depuis les années 90 enregistre plus de 2 millions de déplacés internes et la crise humanitaire s’est aggravée avec la résurgence du M23, rébellion défaite militairement en 2013. La complexité des défis humanitaires se manifeste de façon frappante à l’hôpital Ndosho (ouest de Goma) soutenu par le CICR. Face à un afflux quotidien de civils blessés parmi lesquels de nombreux enfants, l’hôpital gère aujourd’hui plus de 130 lits, plus de deux fois sa capacité d’accueil normale, et beaucoup ont été installés sous des tentes.
Certaines blessures sont invisibles. La violence sexuelle et sexiste est devenue endémique au cours des multiples conflits qui ont frappé la RDC, et elle demeure une préoccupation majeure dans la phase actuelle. « Le niveau de souffrance subie ici est absolument affligeant et ce n’est qu’un aperçu de l’ampleur et la complexité des défis humanitaires à relever en RDC », a déclaré M. Mardini à l’hôpital Ndosho avant de poursuivre : « Nous assistons à une crise de la protection à vaste échelle, qui peut pourtant être évitée. »
Clément MUAMBA