5ème édition de Kin Graff : l’art et son rôle dans la lutte contre le réchauffement climatique au cœur d’une table ronde

Table ronde à la 5ème édition de Kin Graff
Table ronde à la 5ème édition de Kin Graff

La culture et l’environnement ne sont pas des secteurs distincts, nous a certifié Augustin Bikale, administrateur national programme culture de l’UNESCO. Quand on parle de l’art ou la culture, on ne peut pas oublier l’environnement, le lieu où on vit, la terre. C’est ce qu’a précisé, pour sa part, Freddy Tsimba, artiste plasticien. Comprendre les besoins environnementaux de l’heure actuelle figure en haut de la liste des objectifs de cette cinquième édition du festival international de graffiti de Kinshasa “Kin Graff”.

La table ronde s’est tenue dans la salle de cinéma de l’Institut Français de Kinshasa, dans la soirée du mercredi 12 avril. Après l’exposition peinture sur le thème de l’urgence environnementale planétaire qui a lancé cette édition, le 5 avril dernier, cette autre activité vient mettre l’accent sur la question. Cette fois, en plus des artistes, des personnes qui interviennent dans le secteur de l’environnement proprement dit ont eu droit à la parole. En fil rouge des discussions, la culture pour faciliter cette lutte contre le réchauffement climatique.

Madame Laurie Kamuyi, rudologue, a déploré le manque d’existence des centres d’enfouissement dans toute l’étendue du pays, de société de recyclage des déchets organiques, de culture de gestion de déchets ou encore de loi sur la gestion des déchets dans le pays. Ce qui est la cause des décès de plus de 400 enfants par jour, suite au paludisme.

« Il n’y a pas de civisme éco responsable dans le pays. Il n’existe pas de loi spéciale sur la gestion des déchets en RDC jusqu’à ce jour. On ne peut pas dialoguer sur des thèmes aussi profonds comme le changement climatique, la transition écologique en banalisant les déchets, c’est incohérent », a-t-elle regretté dans son intervention à cette table ronde.

Elle a invité les artistes qui le veulent à s’informer auprès d’elle et de sa structure de gestion des déchets, spécifiquement sur cette question des déchets. Augustin Bikale, quant à lui, appelle les artistes à tirer leurs inspirations dans tout le secteur même de l’environnement.

« Les artistes œuvrent pour la vie. Et l’environnement est une des conditions pour que nous soyons en vie. L’artiste doit s’y intéresser pour pouvoir capter les éléments qu’il peut communiquer à la population en vue d’atteindre les objectifs de développement durable », a-t-il dit à ACTUALITÉ.CD.

Communiquer par les artistes

Les intervenants ont martelé sur les pistes de solution afin que cette question environnementale bouge dans le bon sens en RDC tant elle est le premier poumon pour la survie de la planète, avec la forêt équatoriale. Parmi les pistes, il y a la communication à travers les acteurs culturels et spécialement les artistes car ceux-ci ont l’oreille du grand public.

« L’artiste n’est pas seulement un créateur, il joue aussi un très grand rôle de communicateur, de porte-parole, de sensibilisateur. Il est beaucoup écouté par le grand public. Quel que soit le niveau d’éducation ou de sensibilité, les artistes entrent dans les maisons de tout le monde. Il est beaucoup plus facile d’utiliser le langage artistique pour toucher les sensibilités du grand public à comprendre les enjeux de la protection de l’environnement », a ajouté Augustin Bikale.

Aussi intervenant à cette table ronde, l’artiste plasticien Freddy Tsimba a déjà saisi cette notion de communication environnementale indispensable. Il a été très critique par rapport à la situation environnementale de Kinshasa, appelant à un changement de comportement de tous pour que la vie soit saine pour tout le monde, et pas que pour les ministres ou autres autorités.

« Plasticiens, créateurs, musiciens, personne lambda, que tous essaient à leur façon de donner quelque chose venant de lui-même pour que la vie soit meilleure. L’environnement souffre à Kinshasa et nous avons besoin que ça bouge. Et nous plasticiens, nous avons aussi notre apport. Il ne faudrait pas qu’on soit passif, il faut qu’on en parle. A mon âge, on ne peut plus cajoler le mal. Les choses doivent bouger », a tonné Freddy Tsimba.

Dans son travail, il utilise déjà des objets récupérés pour créer des œuvres d’art. Manchettes, cuillères, sachets et bien d’autres constituent les ressources de son travail depuis plus d’une dizaine d’années. Mais cela était sans idées environnementales au préalable.

« J’avais des questionnements à l’époque, je cherchais des réponses à travers les matériaux que je récupérais. Je me disais que la matière a une vie. Quand on voit une cartouche qui a tué quelqu’un, où est allée la vie ? C’est dans la cartouche. Donc, je la récupère et j’en fais une œuvre. C’est ce qui a donné une autre dimension à mon travail, qui a émergé, a pris corps et vie », a expliqué Freddy Tsimba.

Une autre recommandation faite par les intervenants dans cette activité est d’intégrer la question de l’environnement dans le programme de l’enseignement, aussi bien au niveau primaire que secondaire et universitaire.

Quid de Kin Graff 5 ?

La cinquième édition du Festival International de Graffiti de Kinshasa a ouvert ses portes depuis le 5 avril. Il y est pour 10 jours, jusqu’au 15 avril. Sauf l’exposition peinture qui est à visiter dans la salle d’exposition de la halle de la Gombe qui ira jusqu’au 25 du mois en cours. Elle connaît la participation des artistes étrangers tels que Stone du Bénin, Madzoo et Zeinixx du Sénégal, Maliciouz du Canada, Dema et HMI de la Belgique. Et des artistes congolais tels que Jonatemps Mbomba ou Tatanizo Kobo.

Mis à part cette table ronde, les artistes sont en atelier depuis le 6 avril pour se préparer à descendre dans les rues pour faire le graffiti sur les murs où ils ont obtenu l’autorisation de travailler. Des projections de film sont prévues jeudi, vendredi et samedi à l’Institut Français de Kinshasa. La soirée de clôture connaîtra des concours de portraits, live painting, body painting, concert de rap, spectacle de danse et bien d’autres, à la grande halle de l’Institut Français de Kinshasa, dans la soirée du 15 avril.

Le graffiti est un art contemporain consistant à réaliser des fresques murales avec de bombes de peintures aérosols. Il se veut le canal d’expression visuelle de la culture urbaine. Le graffiti suivi aujourd’hui par des millions de jeunes dans le monde entier offre un cadre d’échange et de concertation entre artistes, professionnels, panélistes, conférenciers et publics.

Emmanuel Kuzamba