Florence et sa famille vivent à Goma, dans la province du Nord-Kivu. En janvier 2023, une épidémie de choléra est déclarée dans le territoire de Nyiragongo, où ils se sont déplacés, fuyant les violences. Ils seront tous contaminés, et survivront à cette maladie diarrhéique potentiellement mortelle.
"C'était un jeudi de décembre, neuf jours après notre arrivée dans le camp fuyant la guerre de Rugari", se souvient Florence, une femme déplacée du site de Kanyaruchinya, sur le territoire de Nyiragongo, dans la province du Nord-Kivu. Alors qu'elle lessivait les vêtements de ses enfants à l'extérieur de sa hutte en bâche, Florence a commencé à avoir des nausées et a dû se précipiter aux toilettes.
"J'avais hâte que tout cela finisse", raconte cette mère de trois enfants, alors à bout de forces. Après des heures de diarrhée et de vomissements, les relais communautaires circulant dans le site l’ont conduite dans un centre de santé du site pour y être soignée. Inquiète de son état, l'infirmière titulaire a orienté Florence directement vers le centre de traitement du choléra (CTC) de Munigi.
Le choléra est une maladie extrêmement virulente qui peut provoquer une diarrhée aqueuse aiguë sévère. Les symptômes apparaissent entre 12 heures et cinq jours après l’ingestion d’eau ou d’aliments contaminés. Touchant les enfants comme les adultes, la maladie peut tuer en l’espace de quelques heures si aucun traitement n’est administré.
« Nous sommes venus de Rugari avec les enfants, les mains vides, dans la promiscuité, avec peu de toilettes pour nous tous ici sur le site, un manque de nourriture, nous buvions l'eau du lac", raconte Espérance, la mère de Florence. "Nous avons toutes souffert de diarrhées et de vomissements deux jours après elle. Nous avons toutes été admises au CTC".
Florence ne savait pas vraiment ce qui lui arrivait. "Une fois là-bas, le traitement a commencé immédiatement", explique-t-elle. Pendant toute une semaine, les équipes médicales se sont relayées pour soigner Florence et les autres patients du CTC de Munigi. Lorsque son état s'est finalement amélioré, elle a pu rentrer chez elle.
Le choléra est une maladie facile à traiter. On peut guérir la majorité des sujets atteints en leur administrant rapidement des sels de réhydratation orale. Les patients gravement déshydratés présentent un risque de choc et l’administration rapide de liquide par voie intraveineuse et la prise d’antibiotiques adaptés s’imposent.
La vaccination pour prévenir les épidémies de choléra
Depuis le 14 décembre 2022, les autorités provinciales du Nord-Kivu ont officiellement déclaré une épidémie de choléra dans la zone de santé de Nyiragongo, qui abrite les sites de personnes déplacées par les violences armées qui frappent durement les populations vivant dans la province du Nord-Kivu.
Il existe un lien étroit entre la transmission du choléra et un accès inadapté à l’eau potable et à des installations d’assainissement correctes. Les crises humanitaires, qui ont notamment pour conséquence l’interruption des systèmes d’approvisionnement en eau et d’assainissement et des déplacements massifs de populations dans des sites mal équipés et surpeuplés, peuvent augmenter le risque de transmission du choléra, si jamais le bacille est présent ou s’il est introduit.
Sans attendre, le Programme élargi de vaccination (PEV) et ses partenaires ont organisé en janvier 2023 une campagne de vaccination de masse pour protéger plus de 360 000 personnes âgées d'un an et plus, réparties dans les différents sites de personnes déplacées des zones de santé de Nyiragongo et de Karisimbi.
‘’La campagne de vaccination que nous avons organisée était une réponse rapide et urgente à l'épidémie qui se développait.’’, explique le docteur Stéphane Hans, médecin coordinateur du PEV au Nord-Kivu. « Nous avions beaucoup de cas confirmés de choléra et une douzaine de décès ».
Quelques 614 vaccinateurs du PEV, a raison de trois par équipe, dont deux vaccinateurs et un mobilisateur social, se sont rendus sur les différents sites de personnes déplacées et dans les familles d'accueil pour administrer le vaccin oral, ou vaccin anticholérique oral (VCO). Environ 120 000 personnes ont été vaccinées, et protégées contre le bacille. Deux doses de VCO, espacées de deux semaines, confèrent une protection anticholérique pendant trois ans aux personnes vaccinées.
L'épidémie de choléra est endémique dans les provinces de l'est de la RDC où plus de 17 000 cas suspects dont 285 décès (soit un taux de létalité de 1,6%) ont été notifiés en 2022, dans 98 zones de santé de 17 divisions provinciales de santé. Depuis la mi-décembre 2022, le choléra a coûté la vie à 16 personnes déplacées et dans la communauté à Goma, tandis que le nombre total de cas enregistrés s'élève à 3 706.
Yves Ndjadi Lopongo / Responsable de communication PATH-RDC détaché au PEV