RDC : pourquoi les femmes meurent-elles encore pendant l'accouchement ? 

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L’une des cibles de l’objectif de développement durable 3 est de faire passer le taux mondial de mortalité maternelle en dessous de 70 pour 100 000 naissances vivantes. Aucun pays ne devrait présenter un taux supérieur à deux fois la moyenne mondiale, souligne l’OMS. A Kinshasa, des femmes se sont exprimées au sujet des causes qui favorisent ces décès. 


"Je pense que c'est une question du choix des formations sanitaires. Plus les personnels sont qualifiés, moins on parlera de décès maternels. Les couples qui par manque de moyens se retrouvent dans les centres de santé et maternité des quartiers défavorisés sont les plus exposés à ces risques" estime Andrea Ntumba,  étudiante en 2e graduat de l'université libre de Kinshasa (ULK). 


Pour Ernestine Lumbala et Chimène Mpunga, le retard dans la prise en charge des femmes lors de l’accouchement, les moyens financiers et le non-respect des rendez-vous de consultations sont parmi les causes des décès maternels en RDC. 


"Le personnel des hôpitaux de Kinshasa ont parfois une attitude très compliquée. Une femme enceinte peut arriver à la maternité pour accoucher. Elle est déjà en travail, le personnel soignant le sait, mais ces derniers exigent de l'argent avant de poser un quelconque acte. La vie de la femme et du fœtus sont exposées. Au moment où ils se décident d'agir finalement, on trouve soit que la femme est essoufflée, elle meurt ou que l'enfant a avalé le liquide amniotique. C'est trop tard", déplore Ernestine Lumbala, qui travaille dans un salon de coiffure. 


À Chimène Mpunga, cinquantenaire et mère des 4 enfants d'ajouter. "Certaines femmes enceintes ont tendance à négliger les rendez-vous de CPN (Consultations prénatales). C'est vers la fin qu'elles se précipitent. Si la grossesse n'a pas été suivie durant son évolution,au moment de l'accouchement les sage-femmes vont-elles faire un miracle ? Elles procèdent comme elles ont l'habitude de le faire, et si la femme ne s'adapte pas, elle succombe et l'enfant reste en vie". 


Césarienne et erreurs médicales 


Stéphanie Mobonzi est de celles qui pensent que la césarienne est une option vers la mort, pour avoir vu sa sœur mourir après la naissance de ses jumeaux par cette voie. 


"Elle avait de la force pour pousser. Ma sœur était brave, elle s'exerçait régulièrement. Dans son for intérieur, elle était convaincue que la césarienne est une bonne voie pour accoucher.  Nous avons fait tout le nécessaire pour lui enlever cette idée de la tête mais ça n'a pas marché. Elle était catégorique. Jamais, elle n'accoucherait par voie basse. (...) Ma sœur est morte sous anesthésie. Elle y a laissé sa vie en donnant la vie aux jumeaux. Ils ont grandi, 7 ans plus tard, ma sœur n'est plus", se rappelle Stéphanie Mobonzi, une tresseuse à Zando, le grand marché de Kinshasa. 


Enfin, pour Angélique Bisimwa, mère de huit enfants et agent de la fonction publique, les causes des décès maternels sont multiples. Elle cite notamment, le mauvais temps, l'alimentation ainsi que les conditions sociales dans lesquelles évolue la grossesse. 


"Il y a des périodes où dans une ville, on enregistre un taux élevé de décès maternels. À Kinshasa, c'est généralement vers la fin de l'année et dans les périodes qui suivent les fêtes. Je suppose que le personnel de santé n'est pas efficace pendant cette période et il en découle des décès maternels", avance-t-elle. 


Et de renchérir, « la grossesse et l'accouchement sont des périodes extrêmes de la vie d'une femme. Elle est constamment entre la vie et la mort. Il lui faut un milieu favorable à son état. Il lui faut une alimentation saine et variée. Il lui faut un sommeil paisible. Il lui faut plus de temps de repos et tout un tas de choses. Mais si elle n’est pas bien nourrie, si ces conditions ne sont pas réunies, elle peut perdre la vie pendant l’accouchement. Il peut également être question d’une erreur médicale. Les médecins peuvent se tromper pendant l’accouchement et la femme y reste. Bref, plusieurs raisons peuvent être associées aux décès maternels, surtout à Kinshasa ».

Prisca Lokale