Manifestations meurtrières anti-ONU: une enquête conjointe RDC-mission onusienne sera menée pour établir les responsabilités

Les manifestantes devant le QG de la Monusco à Goma
Les manifestantes devant le QG de la Monusco à Goma

Des policiers et des militaires congolais ont été déployés mercredi dans les villes de l'est de la République démocratique du Congo au troisième jour de manifestations meurtrières qui ont visé la Mission des Nations unies dont la côte de popularité est en baisse dans le pays.

Les manifestants accusent les Casques bleus d'être inefficaces contre la centaine des groupes armés locaux et étrangers, responsables du chaos dans lequel est plongé les provinces orientales du Nord-Kivu, Sud-Kivu et Ituri depuis trois décennies.

Une première manifestation avait regroupé une cinquantaine de femmes qui ont marché dans le calme vendredi à Goma où elles n'ont pas pu déposer leur mémorandum au siège local de la mission onusienne, les portes leur étant fermées.

Dans ce chef-lieu de la province du Nord-Kivu, des jeunes gens ont pris le relais lundi. Ils ont forcé les portails du quartier général de la mission et sa base logistique pillant et détruisant tout sur leur passage. 

Le mouvement s'est poursuivi mardi en gagnant d'autres villes provinciales : Beni, Butembo, Nyamilima. 

Bilan: 15 morts dont trois membres de la Monusco et une soixantaine d'autres personnes ont été blessées, selon les sources officielles.

Les manifestants répondaient à un appel des associations et des politiques notamment le mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha), la jeunesse de l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS, parti au pouvoir) ou encore au président du Sénat Modeste Bahati qui, de passage dans la région 10 jours plus tôt, avait invité la Monusco à "plier les bagages" et partir après 22 ans de présence en RDC.

Après ces manifestation et l'annonce du lourd bilan humain, des voix se sont levées dans le pays et l'étranger pour condamner ces actes et appelé à l'apaisement dans le pays où la côte de popularité de la Monusco est a baisse.

La France condamne les attaques contre la Monusco et les violences qui ont émaillé les manifestations de ces derniers jours dans l'est de la RDC, a déclaré une porte-parole du Quay d'Orsay.

"Nous appelons au retour au calme" et "à ce que les responsables des attaques soient poursuivis et à ce que des enquêtes soient menées pour déterminer les causes des décès", a-t-elle ajouté.

- Manifestants manipulés -

Les autorités congolaises ont assuré mardi qu'une enquête conjointe avec la mission onusienne sera menée pour établir les responsabilités.

Dans un communiqué, la conférence épiscopale de la RDC qui "condamne fermement toute violence qui a prévalu durant les manifestation".

Mais elle dit aussi comprendre "la colère des compatriotes qui participent à ces manifestations et "comme eux, elle estime que le gouvernement (congolais) et la Monusco ont montré leurs limites dans leur mission de sécuriser les populations exposées aux attaques des groupes armés en RD Congo".

"Il est tout à fait possible que les manifestants contre la Monusco aient été manipulés. Mais ce qui est clair c’est que la mission a perdu beaucoup de popularité", a analyse sur Twitter Jason Stearns chef des experts du Groupe d'Etudes sur le Congo (GEC, rattaché à l'Université de New-York).

Il a ajouté que les opinions favorables au maintien de la présence de la Monusco en RDC est passée de 55,1% en 2016 à 44,7% aujourd'hui.

"En 2016, 63% [de personnes] pensaient que la mission faisait du bon travail pour protéger les civils, maintenant seulement 23,6% le pensent", a-t-il indiqué, citant un sondage de son institut.

Une des plus importantes et des plus coûteuses missions de l'ONU au monde, la Monusco est présente en RDC depuis 1999. Elle compte compte actuellement plus 14.000 soldats de la paix, avec un budget annuel d'un milliard de dollars.

"Notre souhait le plus ardent, c'est de voir l'est (de la RDC) stabilisé", a assuré mardi Khassim Diagne, chef-adjoint de la Monusco lors de la conférence de presse conjointe avec le ministre Muyaya.