Un avocat français condamné pour diffamation envers des lanceurs d'alerte congolais

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Service infographie de ACTULITE.CD

Un avocat français a été condamné jeudi à Paris pour avoir diffamé deux lanceurs d'alerte congolais condamnés à mort dans leur pays, ainsi qu'une ONG les défendant, a-t-on appris vendredi de sources proches du dossier.

Me Eric Moutet était poursuivi pour avoir, auprès de médias congolais en février 2021, qualifié de "faussaires" ces deux ex-employés de la banque Afriland First Bank, dont il est le conseil en France.

Les deux hommes, aujourd'hui réfugiés en France, avaient dénoncé des malversations s'apparentant à du blanchiment d'argent dont ils disaient avoir été témoins au sein de cette banque, ce qui leur a valu une condamnation à mort par contumace en septembre 2020.

Grâce à leurs informations en juillet 2020, l'ONG Plateforme de protection des lanceurs d'alerte en Afrique (PPLAAF) et l'ONG anticorruption Global Witness avaient révélé qu'un milliardaire israélien à la tête d'actifs miniers au Congo, Dan Gertler, semblait "avoir utilisé un réseau de blanchiment d'argent, s'étendant de la RDC (République démocratique du Congo) jusqu'à l'Europe et Israël, pour échapper aux sanctions américaines contre lui".

Les deux ONG avançaient que Dan Gertler, proche de l'ex-président Joseph Kabila, avait "ouvert des comptes bancaires dans les succursales congolaises d'Afriland First Bank, basée au Cameroun".

Afriland First Bank avait porté plainte à Paris (siège du PPLAAF) notamment pour "vol de documents" et "faux et usage de faux"

La 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris a conclu que Me Moutet avait imputé aux lanceurs d'alerte des falsifications sur le fondement de bases factuelles insuffisantes. Et qu'il avait dénigré PPLAAF en la rendant responsable de leur condamnation à mort.

Il a été condamné à trois amendes de 500 euros avec sursis et doit verser 1.000 euros pour préjudice moral aux deux lanceurs d'alerte ainsi qu'à l'ONG.

Me Moutet a indiqué à l'AFP avoir fait appel de cette décision.

"Un jugement rendu par un tribunal congolais constitue une base factuelle suffisante et valable", a-t-il argué dans un communiqué, estimant "qu'il était en droit de rappeler à l'opinion publique au Congo, dans le cadre de la défense de sa cliente (...) que les deux anciens salariés qui avaient porté de lourdes accusations contre (elle) avaient été condamnés" pour cela.

Me Antoine Beauquier, qui défend les deux ex-employés de l'Afriland, a lui estimé auprès de l'AFP que "la qualité d'avocat n'(était) pas un pavillon de complaisance".

"Les attaques contre les lanceurs d'alerte, les ONG et les journalistes à la suite de publications d'intérêt général portant sur Dan Gertler et son réseau ont été systématiques et brutales. Elles visaient vainement à nous bâillonner", a dénoncé William Bourdon, président de la PPLAAF dans un communiqué.

 

AFP avec ACTUALITE.CD