RDC: bientôt une commission mixte pour enquêter sur la "spoliation et l'exploitation minière" dans le parc de l'Upemba

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Une commission mixte pour une enquête indépendante sur les allégations de spoliation, exploitation minière et érection d'un barrage hydroélectrique à Sombwe dans le parc national de l'Upemba sera bientôt mise en place. Les discussions sont déjà en cours entre le Corps chargé de la sécurisation des parcs nationaux et réserves apparentées (CorPPN) et l'Institut congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN).

Cette commission va inclure les membres des ONG de la société civile et des leaders des communautés locales vivant autour du parc de l'Upemba.

Pour le commandant des CorPPN, le Général Massi Bamba Albert, l'ICCN n'est pas contre l'érection d'un barrage hydroélectrique à Sombwe tant que cela est nécessaire. Mais une chose est vrai, dit-il, la procédure doit être respectée. Il faut que les études d'impact environnemental soient menées. D'où l'importance de la commission mixte qui aura pour mission d'enquêter notamment sur la construction du barrage et sur la spoliation par la ferme Espoir afin d'établir des responsabilités et faire des recommandations à tous les niveaux.

"L'ICCN n'était pas contre l'érection du barrage dans le Parc mais beaucoup, il faudra qu'on mène des études de faisabilité par les agents de l'ICCN et les techniciens de la province. Parce que ce n'est pas à notre niveau, ni au niveau de l'ICCN d'autoriser l'érection du barrage. Nous avons fait rapport à qui de droit. Nous devrions nous rendre également à Kundelungu où nous apprenons qu'il y aurait une ferme Espoir qui spolierait le parc. Malheureusement, nous n'avions pas terminé la Mission, nous devons retourner pour nous occuper des éco-gardes qui sont dans les provinces sous état de siège (Ituri et Nord-Kivu)", a expliqué le Général Massi Bamba Albert, le commandant de CorPPN au cours d'une conférence de presse tenue à Kinshasa.

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Dans un rapport récent, l'ONG Justicia ASBL a dénoncé des cas de spoliation du complexe Kundelungu-Upemba. On y explique aussi que la ferme Espoir qui appartiendrait à l'ancien chef d'État, Joseph Kabila aurait déplacer ses limites jusque dans le parc de Kundelungu et que l'entreprise Kipay Investment aurait débuté les travaux de construction d'un barrage hydroélectrique à Sombwe dans le parc de l'Upemba au mépris de la loi.

À lire aussi : Parc de l’Upemba: Kipay Investments dit avoir respecté toutes les conditions légales pour la construction du barrage de Sombwe

Des causes profondes de spoliation

Pour mieux comprendre le conflit autour des parcs de l'Upemba et Kundelungu à ce jour, il faudra savoir deux causes profondes. Il s'agit d'abord de l'ignorance de la loi n° 14 sur la conservation de la nature.

Selon les enquêtes menées en avril dernier par le CorPPN lors d'une descente dans le parc de l'Upemba, il a été démontré que la loi portant protection de la nature en République démocratique du Congo n'était pas connue non seulement par la population civile mais aussi par les dirigeants. Ce qui appelle à une sensibilisation.

"Nous avons trouvé deux problèmes sur le terrain. Le premier problème c'est que les gens étaient dans l'ignorance de la loi, même le procureur de Mitwaba c'est le commandant qui lui a donné une copie de la loi n° 14. Pour eux, quand les éco-gardes essaient d'empêcher les activités dites illégales dans le Parc, c'est une tracasserie. C'est à ce niveau là que la société civile intervenait en fait pour accuser les éco-gardes de tracasser la population. Tout cela parce qu'ils n'avaient pas les notions de ce qui est permis et ce qui est interdit. On a confirmé tout cela avec toutes les réunions qu'on a tenues avec le commandant, que toute la communauté était en ignorance", a expliqué M. Benoît Kisuki Mathe, 3ème Commandant du CorPPN en charge de Logistique et Administration.

Ensuite, la pauvreté reste l'un de grands défis à relever afin de protéger au mieux les parcs de Kundelungu et de l'Upemba. Cette pauvreté rend les chefs coutumiers vulnérables face aux propositions des opérateurs économiques qui veulent exploiter les minerais dans les parcs. 

"Le deuxième problème c'était la pauvreté. Les chefs coutumiers qui facilitent l'exploitation de l'or et des minerais dans les parcs nous ont dit : ici nous n'avons pas de moyen de vivre, nous ne pouvons pas produire. Nous ne pouvons pas nous passer de gens qui nous proposent d'exploiter la terre de nos ancêtres. Donc, jusqu'à la preuve du contraire, ils continuent à considérer que les terres qui se trouvent dans les aires protégées sont les terres de leurs ancêtres. Donc les chefs coutumiers sont faibles devant les opérateurs économiques qui leur proposent d'exploiter de l'or dans le parc", a ajouté M. Benoît Kisuki Mathe.

Le complexe Upemba-Kundelungu créé en 2017, abrite des animaux de la grande faune (éléphants, cobes de Lechwe, zèbres, céphalophes à dos jaune, ratel, etc.), pour l’avifaune (bec-en-sabot, tisserins de la Lufira, etc.). On y trouve également  les amphibiens, les guépards et les zèbres ainsi que la chute de la Lofo qui sont une véritable attraction pour les touristes.

Auguy Mudiayi