Les dirigeants des pays d'Afrique australe ont annoncé mercredi à Maputo un accord sur l'envoi prochain de troupes au Mozambique, pour lutter contre les groupes jihadistes qui terrorisent le nord-est du pays depuis plus de trois ans.
La Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) a "approuvé la mission de la force d'attente de la SADC pour soutenir le Mozambique dans son combat contre le terrorisme et les violences extrémistes au Cabo Delgado", a déclaré à l'issue d'un sommet extraordinaire la secrétaire exécutive de l'organisation, Stergomena Tax, sans autre précision.
Des groupes connus localement sous le nom d'"Al-Shabab" ("les jeunes" en arabe) sèment la terreur depuis fin 2017 dans la province pauvre et à majorité musulmane du Cabo Delgado, frontalière de la Tanzanie. Ils pratiquent une violence spectaculaire, incendiant les villages et décapitant des hommes. Leurs attaques sont montées en puissance depuis un an.
Jusqu'à présent, le président mozambicain, Filipe Nyusi, s'était montré réticent à toute aide étrangère, insistant sur la souveraineté du pays, indépendant depuis 1975. L'armée, mal formée et équipée, s'était jusqu'ici appuyée sur des sociétés militaires privées.
L'éventuel déploiement de 3.000 hommes avait déjà été discuté en mai lors d'un précédent sommet des dirigeants d'Afrique australe, mais aucune annonce n'avait été faite.
"Les initiatives de soutien de la SADC sont un complément important à l'effort de notre pays pour faire face au terrorisme avec, en première ligne, nos forces de défense et de sécurité, qui assurent avec abnégation la souveraineté et l'intégrité territoriale, ainsi que la protection de la population", a déclaré mercredi M. Nyusi, qui a présidé l'organisation pendant les 12 derniers mois.
Le 24 mars, une attaque surprise d'ampleur contre la ville portuaire de Palma a fait des dizaines de morts et des dizaines de milliers de déplacés.
Cette attaque, l'une des plus importantes depuis le début des violences dans le Cabo Delgado, a provoqué la réaction de la communauté internationale et interrompu un méga-projet gazier de 16,8 milliards d'euros, opéré par le français Total et situé à seulement quelques kilomètres de Palma.
L'Italien ENI, qui a lancé un autre projet gazier dans la région, a pour sa part assuré lundi ne pas être affecté et être en bonne voie pour lancer l'exploitation comme prévu en 2022.
Le président Nyusi a subi "une pression énorme de la part de l'organisation pour le déploiement de ces troupes, car la situation au Mozambique n'est pas seulement une situation locale, elle s'est également transformée en dilemme régional", a affrirmé à l'AFP Willem Els, de l'Institute for Security Studies (ISS).
Le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG), qui a récemment exhorté le Mozambique à accepter une aide extérieure "mesurée", a salué cette décision comme "une étape supplémentaire" dans la réponse à l'instabilité dans la région.
Lors d'une visite officielle en Afrique du Sud voisine fin mai, le président français Emmanuel Macron s'était dit prêt à "prendre part à des opérations maritimes" au large du Mozambique, si les Etats de la région le demandaient. Le Portugal et les Etats-Unis ont déjà envoyé des militaires pour des missions de formation.
Les violences dans le nord-est du pays ont déjà tué 2.800 personnes et forcé près de 800.000 autres à fuir, selon l'ONU.
AFP avec ACTUALITE.CD