Minembwe : les 4 vérités de Muzito

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Mise au point

J’interviens sur cette question principalement parce que mon nom, comme Premier Ministre, a été cité dans ce dossier de la commune de Minembwe avec beaucoup d’amalgames par les esprits de mauvaise foi.

I. DU SIEGE DE LA MATIERE

Conformément à l’Article 3 de la Constitution de la RDC : La commune est une Entité Territoriale Décentralisée dont les modalités d’organisation et de fonctionnement sont fixées par l’article 46 de la Loi organique du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les Provinces.

1.   Une commune est :

a.   soit un chef-lieu de territoire ;

b.   soit une subdivision de la ville ou une agglomération ayant une population d’au moins 20.000 habitants à laquelle un décret du Premier Ministre aura conféré le statut de commune sous les conditions de forme ci-après :

·      sur proposition du Ministre ayant les affaires intérieures dans ses attributions ;

·      et ce après avis conforme de l’Assemblée provinciale compétente ;

2.   Les chefs-lieux de secteur ou de chefferie ne peuvent être érigés en communes.

II. LES FAITS

Les faits sont les suivants :

Le 09 juin 2009, le Gouverneur de la Province du Sud-Kivu propose à l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu l’érection de certaines agglomérations de la province du Sud-Kivu en communes ;

Par sa Recommandation du 07 octobre 2009, l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu donne son avis conforme sur les agglomérations à ériger en villes et communes dans la Province du Sud-Kivu : l’agglomération de MINEMBWE n’est pas reprise dans l’avis conforme ;

Par Décret du 18 février 2012, se fondant sur cet avis conforme et sur proposition du Ministre de l’Intérieur, le Premier Ministre Adolphe MUZITO confére le statut de ville et de commune à certaines agglomérations de la Province du Sud-Kivu, à l’exclusion notamment de MINEMBWE, cela se passe en Février 2012 ;

En Juin 2013, par Décret, sur proposition du Ministre compétent, le Premier Ministre MATATA PONYO abroge le décret de son prédécesseur, Adolphe Muzito.

Il reprend dans les visas, l’avis conforme de l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu, conférant le statut de ville et de commune à certaines agglomérations de la Province du Sud-Kivu, en incluant MINEMBWE dont les frontières furent du reste fixées dans le décret ;

Par Décret du 22 juillet 2015, le Premier Ministre MATATA PONYO décide de surseoir à l’exécution de certaines dispositions des Décrets évoqués ci-haut du 13 juin 2013 donc le Décret n°13/029 précité ;

Par Décret du 30 mai 2018, le Premier Ministre Bruno TSHIBALA, sur proposition des Ministres Henry MOVA et Azarias RUBERWA, décide de lever la surséance de l’exécution des dispositions de tous les Décrets susvisés ;

Par son Arrêté ministériel du 20 novembre 2018, se fondant sur la mesure de levée de surséance et sur le Décret du 13 juin 2013 du Premier Ministre MATATA ainsi réactivé, le Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Intérieur, Monsieur Henri MOVA, désigna à titre intérimaire, dans la commune de MINEMBWE, un bourgmestre et un bourgmestre adjoint.

III. MINEMBWE : L’ARBRE QUI CACHE LA FORET                                                            

L’érection de MINEMBWE en commune rurale sans avis conforme des représentants locaux est l’expression de la culture politique néocoloniale des héritiers du Roi Léopold II, un Monarque étranger, qui en 1885, s’est accaparé de nos terres, en les déclarant vacantes.

Nous sommes les nouveaux occupants de la RDC. Nous confisquons les terres des communautés locales ou les cédons à qui nous voulons.

Il s’agit ici de la volonté politique des dirigeants au niveau central de prendre le pouvoir des autorités locales et de s’accaparer de leurs terres et ressources.

Cette situation consiste à décider à leur place, ce qui est anti-démocratique et constitue une dictature. Telle est la question de la décentralisation et de la gestion des ressources nationales par le Gouvernement central.

IV. AVIS ET SUGGESTIONS

Pour absence d’avis conforme de l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu, donc pour vice de forme, le Décret du Premier Ministre MATATA réactivé par la décision de levée de surséance prise par le Premier Ministre Bruno TSHIBALA est entaché d’illégalité et de faux en ce qu’il viole les dispositions de l’article 46 de la Loi organique d’Octobre 2008 relative aux ETD et fait état d’un avis conforme inexistant ;

Ainsi, ce Décret aurait dû être rapporté (retiré), à défaut d’être annulé à la suite d’un recours juridictionnel auprès du Conseil d’Etat dans les délais légaux déjà expirés ;

L’existence du faux dans les motivations du Décret peut également poser la question de responsabilité pénale de ses auteurs ;

A ce stade, pour anéantir tous ses effets dans le passé, ce décret doit être purement et simplement rapporté par parallélisme des formes et des compétences. Il ne devait pas être abrogé au risque d’un vide juridique en vue de la réactivation automatique du Décret du 18 février 2012 du Premier Ministre Adolphe MUZITO, qui a tenu compte de l’avis conforme de l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu en ce qui concerne notamment MINEMBWE.

A défaut, bien que ça soit discutable sur le plan juridique, une ordonnance présidentielle peut annuler le décret décrié pour cause d’illégalité manifeste (quitte à provoquer un recours juridictionnel éventuel auprès du Conseil d’Etat et de la Cour constitutionnelle) ;

Toutefois, dans la mesure où l’agglomération de MINEMBWE remplirait les conditions de fond pour être érigée en commune rurale, une concertation entre toutes les communautés locales est nécessaire pour dégager un consensus qui conduira l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu à émettre cette fois-ci un avis conforme, car la décision doit venir de la base, du pouvoir coutumier, propriétaire terrien ;

Il y a lieu de noter qu’un avis conforme entraîne une compétence liée du Premier Ministre pour autant que toutes les conditions légales de fond et de forme soient réunies, encore que la loi ne lui fixe aucun délai pour prendre un décret dans ce cadre.

Fait à Kinshasa, le 13 octobre 2020

Adolphe MUZITO

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