RDC: un député demande à Mabunda et Thambwe de rejeter la proposition de Tshisekedi de tenir séparément les plénières sur l’état d’urgence

Congrès

Félix Tshisekedi  a introduit, depuis le  vendredi 17 avril dernier à l'Assemblée Nationale et au Sénat, une demande de prorogation  de l'état d’urgence. Le cabinet du président de la République précise que les deux chambres doivent se réunir séparément pour statuer et non en congrès. Certains députés ne partagent pas cet avis et rejette cette assertion. Il y en a qui vont loin et demandent carrément aux deux chambres de ne pas considérer l’option de Félix Tshisekedi.

Le député André Tambwe a répondu aux questions d'ACTUALITE.CD.

Qu’est-ce qui explique votre position actuelle?

Je suis très déçu par le travail que mène l'entourage du président de la République qui l'amène à produire des œuvres aussi contestables. Le texte d'une grande importance comme l'ordonnance de prorogation du régime d'exception à laquelle nous vivons depuis 30 jours n'est pas une circonstance dérogatoire alors que c'est une culture constitutionnelle. L'article 144 dans son alinéa 2 est clair. L’Assemblée Nationale et le Sénat se réunissent de plein droit. Et il existe un principe de droit sacré appelé "Théorie de l'acte contraire". L'esprit du constituant est qu'il revient au congrès d'ordonner ou d'autoriser la proclamation de l'état d'urgence. Dans ce même esprit prévu par le constituant, qu'il s'agisse de la prolongation ou de la fin de l'état d'urgence, cette tâche revient au congrès. La constitution donne au congrès le pouvoir d'autorisation, de prorogation et de mettre fin à l'état d'urgence. On ne peut aujourd'hui inventer un droit nouveau. Nous sommes en train d'assister à une production jurisprudentielle totalement archaïque et décevante. Sur le plan de la légalité constitutionnelle l'acte du président de la République pose problème.

Vous suggérez aux deux chambres de rejeter carrément l'option du Chef de l'État...

La constitution donne à tous les congolais le droit à la désobéissance légale. La constitution est suffisamment outillée pour donner aux membres des deux chambres de tirer les conséquences du règlement d'ordre intérieur du congrès. Le règlement est clair. Maintenant, il y a une opportunité pour que le congrès se réunisse pour proroger l'état d'urgence à la demande du président de la République mais aussi de tirer les conséquences. On ne peut pas se comporter dans un État dit de droit en violation permanente de la constitution qui a été votée par référendum dans ce pays. La constitution reconnaît au congrès le pouvoir de convoquer, de proroger et de mettre fin à l'état d'urgence. À partir du moment où c'est le congrès qui peut convoquer l'état d'urgence, donc il n'y a que lui qui peut faire le reste. J'appelle les présidents des deux chambres à appliquer la constitution et à ne pas suivre un ordre illégal.

Vous ne pensez pas que cela va accentuer la crise?

Nous sommes en train de constater l'anarchie au sommet de l'Etat qui risque de nous amener dans une crise interinstitutionnelle. Normalement l'article 145 de la constitution aurait dû être respecté avant la proclamation de l'état d'urgence. C'est-à-dire, les ordonnances devraient être proclamées conformes à la constitution avant que cela soient mises en exécution. Les dispositions finale de ces ordonnances disent qu'elles entrent en vigueur en date de la promulgation, ce qui est une violation flagrante de l'article 145 de la constitution. La jurisprudence de la Cour Constitutionnelle n'a reconnu la constitutionnalité ces ordonnances que 10 jours avant l'expiration du délai de ces ordonnances, ce qui veut dire l'entourage du président l'amène petit à petit vers une situation atypique où l'Etat sera quasiment animé par des institutions qui ne se côtoient pas et qui se méfient constamment. Par conséquent, la population va tirer les conséquences. Et l'ordre constitutionnel devra être rétabli de la manière qu'il pourra.