RDC : "La seule autorité à laquelle un magistrat, mieux un juge doit faire allégeance c'est la loi" Raphaël Kibuka

Raphael Kibuka, député national invalidé par la cour constitutionnelle

Provisoirement élu sur la liste du Mouvement de Libération du Congo (MLC), Raphaël Kibuka avait ensuite été invalidé au profit de Sylvie Ingele. Celle-ci n'avait recueilli que moins de 700 voix, contre 26.802 voix pour le candidat du MLC. Réhabilité, depuis, par la Cour constitutionnelle, Raphaël Kibuka déplore les péripéties ayant conduit à son invalidation. Dans une interview à ACTUALITE.CD ce vendredi 5 juillet, le député plaide pour l'amélioration des conditions sociales et du travail dans le milieu judiciaire, notamment en y appliquant la discipline et la rigueur.

Quelle réaction après votre réhabilitation définitive comme député national ? 

J'ai un sentiment de satisfaction teinté de regret au vu des péripéties qui ont émaillé mon invalidation injustifiée et ma validation définitive après un recours formulé contre l'arrêt de la Cour constitutionnelle. Tout ceci malgré mon élection régulière dûment proclamée par la CENI avec 26.802 voix. L'invalidation de mes camarades de l'opposition pour des raisons inavouées me laisse un goût amer.

Quel regard portez-vous sur la Cour constitutionnelle après votre réhabilitation ?

La cour constitutionnelle est une haute institution judiciaire qui doit, conformément aux articles 150 à 152 de la constitution, garantir les droits des citoyens et surtout se départir de toute influence politique quelconque en statuant en toute indépendance sous la seule autorité de la loi. Ce qui n'a pas été le cas lors de mon invalidation à la fois surprise et injustifiée.

Quelle sera la particularité de votre mandat en tant que député national ? 

Ce sera de jouer pleinement mon rôle de représentant du peuple en défendant, au sein de l'Assemblée nationale, les droits et libertés des citoyens. En y relevant les desideratas du peuple en termes de leurs priorités d'ordre social, économique, sécuritaire et politique. Pour ce faire, je mettrai en branle, pour le seul intérêt du peuple, les mécanismes juridiques prévus à cet effet (motion, question écrite ou orale, interpellation). Le peuple nous a votés, il attend que nous lui rendions ce pour lequel il nous a donnés ce mandat. Je suis déterminé à le faire de mon mieux.

Comment redorer l'image de notre justice à ce jour ternie ? 

Suivant l'article 149 de la Constitution, la justice est et doit être indépendante. Elle ne doit ni se soumettre aux injonctions du gouvernement, ni être assujettie au parlement. La seule autorité à laquelle un magistrat, mieux un juge, doit faire allégeance c'est la loi et la loi seule. Si la justice n'y parvient pas, c'est premièrement à cause de la corruption, ensuite il y a l'instrumentalisation politique. Il faut mettre fin à ce fléau sinon on ne saura parler de l'État de droit. Et pour y mettre un terme, les voies de solution sont connues et ce n'est pas sorcier. Il faut améliorer les conditions socioprofessionnelles de tous organes judiciaires mais surtout et fondamentalement veiller à l'intégrité en y appliquant une discipline adroite. Par éthique, rien ne peut justifier une décision judiciaire inique ou illégale si ce n'est qu'une question de déficit d'intégrité donc de discipline due essentiellement à l'impunité généralisée et aux autres tares corollaires (tribalisme, clientélisme, etc).

Comment avoir une "vraie" justice en RDC ? 

C'est en relevant de manière effective l'État de droit sur le plan politique surtout. Que le politique en primeur et cela mettra en évidence l'indépendance de la justice laquelle devra être l'arbitre neutre et honnête pour réguler les conflits en toute impartialité et avec objectivité. Pour y arriver sans encombre, il faut absolument améliorer les conditions sociales et du travail dans le milieu judiciaire. Mais surtout il faut que la discipline y soit appliquée avec rigueur pour écarter de son milieu toutes les brebis galeuses.

Interview réalisée par Stanis Bujakera Tshiamala