Rebecca avait 17 ans. Samedi soir, elle était au restaurant, comme tous les jours. Elle s’apprêtait à rentrer chez elle quand les tirs ont commencé dans la ville de Beni (Nord-Kivu). Elle était habituée à entendre les coups de feu, mais elle ne se doutait point que c’était son jour. 19 ans, Chadrack Kanzinga, son frère, est encore sous le choc.
« Je suis fils d’un militaire. Ma sœur, Rebecca Tshiandiro a été tuée d’une balle à la tête. Elle était célibataire. Elle n’avait que 17 ans. Elle n’avait même pas un fiancé. Elle travaillait dans un restaurant au niveau du parking. Elle terminait souvent vers 20h. Quand les tirs ont commencé, elle était encore au restaurant. Elle triait les haricots pour le service du lendemain », explique-t-il à ACTUALITE.CD.
Il avait une mauvaise prémonition ce soir-là, dit-il. Il n’a pas attendu longtemps pour avoir les nouvelles de sa sœur.
« Quand j’ai entendu les premiers tirs, j’ai directement appelé. Elle m’avait rassuré qu’elle quittait le lieu une fois les haricots tirés du feu. J’ai attendu trente minutes plus tard, j’ai rappelé. Elle m’a dit qu’elle craignait de rentrer à la maison à cause de l’intensité des tirs. Je lui ai demandé de m’attendre sur place. Je suis arrivé trop tard. Elle avait déjà quitté le restaurant. Je suis rentré à la maison. Elle n’y était pas. Au téléphone, elle me dira qu’elle a passé la nuit chez une de ses amies, près du restaurant. Le matin, j’ai appelé sans succès. J’ai décidé de me rendre auprès de son amie qui me dira qu’elle avait finalement décidé d’aller en ville. Je craignais le pire. Je me suis rendu à la morgue et ce que j’ai retrouvé, c'est sa dépouille », relate-t-il.
Rebecca fait partie de 18 victimes recensées le dimanche 23 septembre après les affrontements entre les FARDC et les présumés combattants ADF.
« Je crois qu’elle a été tuée par nos soldats. Elle a reçu une balle à la tête, au cou et à la poitrine. Elle a été également poignardée à plusieurs endroits. Je regrette énormément. Je me suis chamaillé avec les militaires à la morgue qui disaient que ma sœur était la femme des ADF. Un militaire s’est même approché de son corps, en ma présence. Il a roué des coups la dépouille de ma sœur prétextant qu’elle était la femme des ADF. Ils étaient à quatre. Ils s’en sont pris également à moi et ont déchiré mes habits. Heureusement qu’un autre militaire qui connaissait ma sœur est intervenu. C’est comme ça qu’on a pu récupérer le corps », ajoute Chadrack.
Rebecca a été inhumée dimanche dans l’intimité familiale.
«La famille s’est organisée avec le peu que le maire nous a envoyé. Nous l'avons enterrée. C’est fini », conclu Chadrack.
Le calme est revenu depuis dimanche à Beni. La société civile a décrété un deuil, jusqu’à vendredi, dans la région. Le chef d’Etat major des FARDC est arrivé sur place et les opérations militaires se poursuivent.
Vous pouvez écouter le témoignage (en swahili) de Chadrack ici
Yassin Kombi, depuis Beni