"L'Afrique n'a pas abandonné la RDC et l'Union africaine souhaite que ce pays retrouve la paix et la stabilité", affirme le président de la Commission de l'UA en visite à Kinshasa 

Mahmoud Ali Youssouf, président de la Commission de l'UA
Mahmoud Ali Youssouf, président de la Commission de l'UA

Pour la première fois depuis son élection à la tête de la Commission de l’Union africaine, l’ancien ministre djiboutien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Mahmoud Ali Youssouf, séjourne à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC), dans un contexte marqué par la dégradation continue de la situation sécuritaire et humanitaire dans l’Est du pays, consécutive aux offensives de la rébellion de l’AFC/M23, appuyée par le Rwanda, contre les forces gouvernementales.

Au cours de son séjour, le patron de l’exécutif de l’Union africaine a été reçu jeudi décembre par le président de la République, Félix Tshisekedi à Kinshasa. Les dernières évolutions de la situation sécuritaire sur le terrain ont été au centre des échanges entre les deux personnalités. L’instance africaine est également impliquée dans les processus de Washington et de Doha en vue du rétablissement de la paix dans l’Est de la RDC et dans la région des Grands Lacs.

"Les deux personnalités ont échangé sur la guerre d'agression rwandaise menée contre la RDC et la possibilité pour l'Union africaine d'accompagner les efforts entrepris dans le cadre du processus de paix de Washington et de Doha. « L'Afrique n'a pas abandonné la Rdc et l'Union africaine souhaite que ce pays retrouve la paix et la stabilité »" a déclaré M. Mohamed Ali Youssouf dans des propos rapportés par la Présidence de la République.

Cette rencontre intervient dans un contexte marqué par l’annonce, par la rébellion de l’AFC/M23, soutenue par Kigali, de son retrait de la ville d’Uvira, dans la province du Sud-Kivu. Une démarche contestée par Kinshasa, qui estime que le mouvement rebelle cherche à faire diversion afin de réduire la pression internationale, notamment celle des États-Unis sur le régime de Kigali, considéré par l’ONU comme le parrain de cette rébellion. Ce mouvement rebelle poursuit des conquêtes territoriales dans l’Est de la République démocratique du Congo, tout en mettant en place une administration parallèle ne relevant pas des autorités de Kinshasa.

La ville d’Uvira, considérée comme stratégique dans le dispositif sécuritaire du gouvernement congolais au Sud-Kivu, était passée sous le contrôle de l’AFC/M23, renforçant ainsi l’influence et la mainmise de la rébellion dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Il s’agit d’un verrou essentiel, susceptible d’ouvrir la voie à l’AFC/M23, soutenue par le Rwanda, vers l’espace du Grand Katanga, considéré comme le poumon économique du pays.

La détérioration de la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC a coïncidé avec l’entérinement des accords de Washington, signés entre Kinshasa et Kigali sous les auspices des États-Unis d’Amérique. Alors que ces accords étaient censés consolider le cessez-le-feu souhaité par les médiateurs et plusieurs partenaires des deux pays, la situation s’est, au contraire, aggravée, marquée par des accusations mutuelles entre les deux États quant à la responsabilité de la crise sécuritaire actuelle.

En interne, l’Union africaine fait parfois face à des critiques sur son attitude face à l’agression rwandaise menée à travers la rébellion de l’AFC/M23. La progression de ce mouvement rebelle, appuyé par le Rwanda, dans la province du Sud-Kivu, a notamment suscité la réaction du Prix Nobel de la paix, Denis Mukwege, au lendemain de la prise de la ville d’Uvira. Ce dernier a fait part de sa stupéfaction à la suite de la lecture du communiqué du président de la Commission de l’Union africaine, déplorant l’incapacité de l’organisation continentale à désigner clairement Kigali comme acteur de déstabilisation dans l’Est de la République démocratique du Congo. Denis Mukwege a, par ailleurs, appelé l’Union africaine à poser des actions concrètes à l’encontre du Rwanda.

Clément MUAMBA