C’est dans la soirée de ce dimanche 19 octobre que la nouvelle du décès de l’artiste peintre congolais Joseph Kinkonda alias Chéri Cherin a circulé. C'est la Mutuelle congolaise des artistes plasticiens qui a donné l’info qui laisse triste de nombreux artistes et amateurs d’art qui l’ont connu, personnellement ou à travers ses œuvres. Maître pour certains, grand maître pour d’autres, Cherin Chérin a mis son nom sur le courant de la peinture populaire congolaise.
Grâce à son regard unique, Chéri Chérin a transcendé les frontières de la RDC, ses toiles, mêlant réalisme et caricature, ont été exposées dans de grandes galeries et institutions internationales, notamment à la Fondation Cartier pour l'Art Contemporain à Paris. Il a non seulement documenté Kinshasa dans ses toiles, mais aussi a inspiré et formé de nouvelles générations d'artistes congolais.
“C’est quelqu'un qui a tant contribué dans le monde de l'art, qui a formé beaucoup de maîtres tels que Landry Mulala, JP Mika et bien d’autres. Il était la figure emblématique de la peinture populaire à Kinshasa. Il a apporté une pierre à l’édifice pour que nous parlions aujourd’hui de la peinture populaire. C’était un génie dans le vrai sens du mot”, témoigne à ACTUALITE.CD Winnart Nsangu, artiste peintre.
Danny Maluku, artiste plasticien de style populaire qui a travaillé avec Chéri Chérin précise avoir appris de lui la composition.
“En le côtoyant, je me suis rendu compte que c’est un génie de la composition. Il a amené l’art congolais dans une autre dimension. Ce qui a fait que nous autres qui sommes venus après, on a pu repousser encore plus loin en partant de lui comme référence. Je pouvais faire un tableau, en revenant le soir, je trouve qu’il a tout détruit, me demandant de refaire. Contrarié mais je faisais de nouveau et je me rendais compte que je m’améliorait de plus en plus”, ajoute-t-il.
Inspiré par la religion, la politique, la mythologie et la vie urbaine, Joseph Kinkonda est devenu un Créateur Hors série, un Expressioniste Remarquable et un Incomparable Naturaliste. Les premières lettres de cette description expliquent le surnom de Cherin, Chéri signifiant par ailleurs l’amour du travail bien fait, l’amour du créateur des œuvres envers son public.
“Je suis né avec le dessin, j’ai l’art dans le sang. En première primaire, je griffonnais déjà, mon père a décidé que je sois prêtre de l’Eglise catholique. Il m’a envoyé au séminaire. Les jésuites ont vu que j’étais fort en dessin, ils m’ont orienté à l’académie des beaux-arts de Kinshasa où j’ai étudié la céramique. Après, je suis revenu à mon premier amour, la peinture”, racontait Chéri Chérin dans une interview.
Chéri Chérin est une figure singulière de l'art contemporain africain et l'un des piliers du mouvement de la peinture populaire en RDC. Né à Kinshasa en 1955, il s'est distingué par un style narratif, figuratif et intensément coloré, faisant de ses toiles de véritables chroniques sociales de la mégapole kinoise. Initialement formé à l'Académie des Beaux-Arts, il s'éloigne de l'académisme pour embrasser une peinture accessible, critique et souvent satirique.
Son œuvre est un miroir sans concession de la vie urbaine et des défis de la RDC. Abordant des sujets aussi variés, il donnait à voir le quotidien avec un humour mordant et une ironie acérée. Il était considéré comme l'un des quatre grands maîtres de cette peinture populaire, aux côtés de Chéri Samba, Moke et Pierre Bodo.
Kuzamba Mbuangu