Massacre de Lubero : Denis Mukwege dénonce des crimes commis dans « un vide de gouvernance sécuritaire » et doute de Washington et Doha sur le retour de la paix

Des traces de sang dans une maison attaquée par les ADF à Beni
Des traces de sang dans une maison attaquée par les ADF à Beni

Le prix Nobel de la paix, Denis Mukwege a exprimé sa peine sur les dernières attaques meurtrières des forces démocratiques alliés (ADF) dans la nuit du lundi 8 à mardi 9 septembre à Ntoyo, village de la localité de Mahoho situé à près de 7 km à l'Est de Manguredjipa dans le secteur des Bapere (territoire de Lubero) au Nord-Kivu. Cet énième massacre a fait au moins 72 morts d’après le bilan officiel. Et le lendemain, 18 autres civils ont été tués au village de Fotodu, dans le territoire de Beni.

Dans un post sur le réseau social X, l’opposant résidant en Europe bien avant l’assaut des rebelles dans la ville de Bukavu a, quant à lui, condamné un massacre de plus de 90 civils, perpétré dans « un vide de gouvernance sécuritaire qui expose particulièrement la population civile qui compte chaque jour ses morts dans les provinces en conflit. »

Il refuse qu’un crime de telle ampleur passe sous silence dans une zone riche mais théâtre des exactions « en totale impunité », et met en doute les processus de paix de Washington et de Doha comme panacée au retour de la paix dans cette partie du pays. Il appelle néanmoins à un réveil pour recouvrer l’humanité et la dignité.

« Nous condamnons avec la plus grande fermeté le massacre de plus de 90 personnes, perpétré par les terroristes ADF lors de l'attaque de Ntoyo, situé près de la zone minière de Manguredjipa dans le territoire de Lubero au Nord Kivu. Cet énième massacre à grande échelle s'inscrit dans un vide de de gouvernance sécuritaire qui expose particulièrement la population civile qui compte chaque jour ses morts dans les Provinces en conflit. Ces crimes de masse ne peuvent passer comme de simples faits divers. Nous sommes un peuple en danger, livré à lui-même. Hier, une zone de libre-échange ; aujourd'hui, une zone de libre extraction, où nos richesses constituent notre propre malheur et où les exactions se commettent en totale impunité », écrit Denis Mukwege ce mercredi.

Mukwege conclut que « notre salut et la paix durable ne viendront ni de Washington, ni de Doha ».

« Réveillons-nous et recouvrons notre humanité et notre dignité. Ne banalisons jamais la violence et disons non à la barbarie», a-t-il recommandé. 

Peu avant lui, Moïse Katumbi était le premier à décrié un massacre dans une province sous un régime d’état de siège. Sur X, l’opposant en exil a chargé les autorités sécuritaires, alertées en vain pour intervenir, appelant Kinshasa à reconnaître « son échec protéger le droit sacré de la vie. »

Un agent de sécurité a indiqué à ACTUALITE.CD avoir compté cette journée, 72 corps sur les lieux de l’attaque. Parmi les victimes, 26 ont été tuées dans une parcelle où se tenait une veillée mortuaire. Les infortunés ont été achevés par balles, confie notre source.

D’après lui, une centaine de personnes ont été enlevées par les assaillants. Au moins 16 maisons, 8 motos et deux véhicules ont été incendiés. Ces dernières informations des sources sécuritaires à Manguredjipa sont corroborées par la société civile dans la région.

L'État Islamique Daesh revendique, lui, avoir tué  “100 chrétiens” à Ntoyo, en territoire de Lubero. Dressant un bilan de 71 personnes tuées et de six autres blessées et d’innombrables disparus, Kinshasa a condamné avec fermeté les attaques terroristes des ADF. Il promet de renforcer des moyens pour plus de protection des populations civiles et la restauration de la sécurité.

Samyr LUKOMBO