RDC : l’Actualité de la semaine, vue par Gisèle Ndaya Luseba

RDC : l’Actualité de la semaine, vue par Gisèle Ndaya Luseba

Affaire Huguette Ngomb Matand et Hazeeb Padiyath, décision du PPRD de ne pas faire partie du gouvernement Sama Lukonde,  tueries à l’Est, le desk Femme d'Actualité.cd passe au crible les faits marquant de la semaine avec Gisèle Ndaya Luseba. Elle est Chef du CDTU, un parti politique et vice-présidente de la Dynafec.  

Bonjour Madame Gisèle et merci d'avoir accepté de nous accorder cet entretien. Près de 20 corps sans vie ont été retrouvés près de Mayimoya en territoire de Béni au Nord-Kivu, des personnes tuées par les ADF. Quelle politique de sécurité faudrait-il mettre en place pour sécuriser la population congolaise à l'Est sous ce mandat de Félix Tshisekedi à la tête de l'Union Africaine ? 

Gisèle Ndaya Luseba : je pense qu’il n’y a pas de nouvelle politique à mettre en place étant donné que cette situation existe depuis des longues années. C’est un problème qui implique entre autres, les pays voisins à la République Démocratique du Congo et la main mise d'autres puissances mondiales. La présence du Chef de l’Etat aux commandes de l’Union africaine est une occasion de dialoguer et de parler de la sécurité à l’Est. C’est tout un processus de consultations, de consensus qui doit être mis en place. 

En économie, le trafic routier sur les axes Beni-Kasindi et Beni-Butembo a été suspendu au cours de la semaine pour protester contre les embuscades et attaques armées à répétition, dont les chauffeurs sont victimes. La société civile a aussi décidé de suspendre les activités économiques sur ces mêmes axes ce 26 mars. Que faire pour sécuriser les chauffeurs et les habitants exerçant de cette région ?

Gisèle Ndaya Luseba : il s'agit d'une situation très délicate. Il faudra doter l’armée congolaise de tous les moyens nécessaires pour sécuriser la population. On parle également d'infiltrés au sein de l’armée, il faudra déceler ces personnes. L’Etat congolais devra évaluer ses actions militaires, repérer les intrus et proposer des nouvelles stratégies.    

Quelles recommandations adresseriez-vous au ministre de l'intérieur et de la sécurité ou celui de la défense ?

Gisèle Ndaya Luseba : je suppose que la question de  la sécurité dans cette partie du pays est entre les mains du ministre de l’intérieur et de la sécurité et c’est le dossier le plus important qui préoccupe le Chef de l’Etat et même le gouvernement sortant. Il faudra, comme je l’ai dit, renforcer l’armée en moyens efficaces et adopter de nouvelles stratégies. 

Au cours de cette semaine également, Docteur Huguette Ngomb Matand, a annoncé qu'un arrangement à l'amiable avait été trouvé entre elle et l'administrateur directeur général de l'hôpital du Cinquantenaire et que sa plainte contre ce dernier allait être retirée, avant de remercier toutes les personnes et organisations qui l'ont accompagné dans ce combat. Quelle analyse faites-vous de cet événement survenu en plein mois de mars ?

Gisèle Ndaya Luseba : je déplore le comportement du responsable de l’hôpital du Cinquantenaire. Le docteur a dénoncé et nous avons salué son action. Elle a accepté un arrangement à l’amiable, nous pensons qu’elle est humaine, peut-être qu’elle a été prise de compassion envers l’ADG. Cependant, étant donné que les faits ont été commis dans la profession et portés sur la place publique, cela n’engageait plus Madame Huguette uniquement, mais aussi  toutes les personnes victimes du mauvais traitement de la part des responsables expatriés d’obtenir justice. Un arrangement à l’amiable ne résout pas le problème. Il ne faut pas crier à la violence si l’on n’est pas capable de tenir jusqu’au bout. Elle devait laisser la justice poursuivre l’affaire. Ce n’est vraiment pas digne. 

En même temps, cette affaire interroge  les lois congolaises et la protection des personnes œuvrant dans le secteur privé ? 

Gisèle Ndaya Luseba :  étant donné que nous sommes dans une période des réformes, il faudra également revoir le code du travail, apporter des reformes dans le secteur privé et public. Travailler dans la vulgarisation de ces textes. 

En politique, le PPRD a annoncé qu'il ne prendrait aucun poste au sein du prochain gouvernement. Que pensez-vous de cette position ?

Gisèle Ndaya Luseba : c’est une décision tout à fait normale, cela ne nous surprend pas. Le PPRD constitue actuellement l’opposition politique. Ce que nous avons vécu, il y a quelques temps avec l’UDPS est entrain de se répéter avec le PPRD. Tout ce que fait le parti au pouvoir est critiqué par le PPRD et cela est tout à fait normal.   

Lors de ses discussions avec les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, l'ambassadeur américain Mike Hammer a indiqué l’importance de s’assurer qu’il y aura des élections en 2023 comme programmé dans la constitution. C’est essentiel pour montrer au peuple congolais qu’il y a de vrais changements et que le glissement de l’ancien régime est mort. Et vous, croyez-vous aux élections en 2023 ?

Gisèle Ndaya Luseba : oui, j’y crois. Les élections sont prévues dans la constitution. Il faudra respecter ce délai. Mais avant d’aller aux élections, il faudra au préalable, organiser les réformes électorales, le recensement de la population congolaise. Comment peut-on organiser les élections sans avoir les chiffres exacts de la population. Si tous les moyens sont réunis, l’identification de la population pourra intervenir avant 2023.  

  Élections riment avec réformes électorales, notamment à la CENI, la loi électorale. Quelles réformes sont prioritaires selon vous ? 

Gisèle Ndaya Luseba : il faut une nouvelle loi électorale. Nous avons aujourd’hui des nombreux députés qui ont été nommés et non élus. Le seuil électoral a également causé des préjudices aux élections de 2018. Le recensement, le seuil électoral, la caution sont parmi les réformes importantes à entamer avant les élections. 

Que pensez-vous de la réception des candidatures pour le poste de président de la CENI entamée par les confessions religieuses ?

Gisèle Ndaya Luseba :  il ne faudrait pas inventer la roue. L’Eglise a toujours été à la tête de la CENI depuis toutes ces années et nous avons vu les résultats. Cela ne pose aucun problème de laisser l’Eglise reprendre encore la direction de cette institution d’appui à la démocratie. Cependant, il sera important de suivre le processus normal avant de parler de l’installation d’un nouveau comité directoire de la CENI.  J’encourage les femmes à déposer également leurs dossiers. 

En justice, Carine Lokeso, commissaire supérieure adjointe de la police a été mise à la disposition du ministère public pour son rôle supposé clé, dans le meurtre de Rossy Mukendi. Quelles sont vos attentes par rapport à ce procès ? 

Gisèle Ndaya Luseba :  tous ceux qui ont été cités et interpellés par rapport à ce dossier doivent répondre de leurs actes devant la justice. Si Madame Carine qui est officier, est citée, elle doit également répondre parce qu’elle maitrise les missions de la police. 

Dans le territoire de Lengabo en Ituri, une jeune femme a été victime d'une agression sexuelle de la part de 8(huit) présumés officiers militaires. La société civile a appelé les autorités compétentes à ouvrir une enquête à ce propos et sanctionner les coupables. Selon vous, que devrait faire la justice congolaise face aux cas de violences sexuelles impliquant les forces armées ? 

Gisèle Ndaya Luseba :  on ne sait pas encore confirmer que ce sont des militaires. J’ai évoqué le fait que l’armée congolaise était infiltrée par des tiers. Mais les autorités militaires et la justice devraient mener des enquêtes et trouver des coupables. Et sur base des résultats qui seront trouver, rendre justice à la victime. 

 Le mois de mars dédié aux femmes touche à sa fin. Un mot par rapport aux thématiques de cette année ?

Gisèle Ndaya Luseba :  oui, nous sommes en train d’atterrir, il y a eu beaucoup d’ateliers, des conférences, des cadres de réflexion pour évaluer le respect des droits des femmes en général et les violences dont elle continue d’être victime. Par rapport au leadership féminin, je pense que les femmes ne doivent pas baisser les bras. Il faut qu’elles poursuivent la lutte pour leurs droits jusqu’à se trouver valablement représentées dans tous les postes de prise des décisions. Ce sera l’occasion pour elle d’opérer un changement dans sa communauté.

Propos recueillis par Prisca Lokale