Le Premier Président de la Cour de cassation dénonce les effets néfastes des immunités des poursuites et privilèges de juridiction accordées à certaines autorités. Le magistrat David-Christophe Mukendi Musanga a démontré que ces droits fragilisent le Parquet dans sa mission de poursuivre les infractions commises par certaines autorités.
Dans son discours prononcé lors de la rentrée judiciaire de ce jeudi 15 octobre 2020, le Premier Président de la Cour de cassation soutient que les immunités des poursuites et privilèges de juridiction font obstacle aux poursuites des personnes qui en sont bénéficiaires.
« La lenteur se justifie du fait de la nécessité de soumettre les poursuites à des contraintes procédurales est préjudiciable à la réalisation de ses missions dans un Etat de droit. On ne peut s'accommoder d'une situation qui contribue à fragiliser la justice et qui laisse celle-ci se réfugier dans sa tour d'ivoire à cause des autorisations des poursuites qui tardent à venir ou qui ne viennent pas du tout simplement du Parlement. Celui-ci ne s'empêche pas d'ailleurs le plus souvent lors de l'examen des réquisitoires du Procureur Général, à porter une appréciation du fond sur les dossiers jusqu'à en refuser de donner suite. », affirme-t-il.
Il a évoqué des difficultés auxquelles fait face le Parquet Général près la Cour de cassation :
« Le Parquet Général près la Cour de cassation a des difficultés pour bien mener des enquêtes jusqu'à leurs termes dans les affaires dites sensibles qui donnent par-là l'impression d'une complicité par abstention. Quand il attend patiemment la décision de levée politique que rencontrent tous les membres du Gouvernement, l'autorisation de la majorité absolue des membres de l'assemblée nationale ou leurs mises en accusation, il se développe ainsi un sentiment d'impunité qui serait le meilleur terrain de la délinquance et de la récidive », explique le Premier Président de la Cour de cassation.
Il conclut que les immunités des poursuites et privilèges de juridiction favorisent la tolérance vis-à-vis des personnes investies des charges étatiques.
« Nos règles de procédure pénale consacrent les immunités des poursuite et privilèges de juridiction. Certes les raisons n'en manquent pas, mais elles sont loin d'être objectives et présentent plusieurs effets pervers. Ceux-ci se déclinent en une seule pierre : tolérance à vis-à-vis des personnes investies des charges d'Etat », dénonce-t-il.
Ainsi, le magistrat David-Christophe Mukendi Musanga propose notamment, que les parlementaires et les membres du gouvernement ne soient pas poursuivis uniquement pour les infractions commises dans l’exercice de leurs fonctions. Il explique que ces propositions de réformes sont « motivées par le souci de restaurer le sentiment de crainte dans le chef de ceux qui sont appelés à gérer la cité. »
Blaise BAÏSE