Dans la cité de Bili, située à 160 km de Gbadolite, chef-lieu de la province du Nord-Ubangi, au nord-ouest du pays, la société ne perçoit pas avec la même valeur l’éducation des filles et celle des garçons. Plusieurs filles sont précieusement prises en mariage, cela parfois contre leurs propres volontés.
Le secteur de Bosobolo comprend plus de 82 écoles dont une dizaine se trouvent dans la cité de Bili.
A l’Ecole Primaire II Boyokani (EP II Boyokani), école conventionnée catholique, l’enseignement est quasiment gratuit. Certains frais connexes sont taxés aux parents pour le fonctionnement et la paie de la garde. Malgré le moindre coût de la scolarité, plus de la moitié de l’effectif des filles inscrites ne finit pas l’année scolaire.
« Dans notre école, l’enseignement est gratuit. Nous avons un total de 18 membres du personnel dont 16 sont des enseignants. L’ensemble du personnel est mécanisé, sauf la sentinelle. Ce sont les parents qui doivent le payer. C’est dans cet argent que nous prélevons également une partie des frais de fonctionnement. Malheureusement, nous sommes butés à deux grandes difficultés. D’abord, les parents négligent l’éducation des filles. J’ai vu beaucoup de parents venir retirer leurs filles de 6ème primaire dont l’âge varie entre 13 et 15 ans pour les marier. Ensuite, il n’y a pas de suivi pour l’éducation surtout pour les filles. Une fille peut rester deux semaines à la maison sans que personne ne vienne se renseigner auprès de l’enseignant », explique Mbiate Yawe François, le directeur de l'EP II Boyokani.
Pour les parents et la majorité des habitants de la cité de Bili, les filles ne doivent plus avoir le même niveau d’éducation, selon la tradition locale.
« Les filles doivent accompagner leurs mères à la pêche ou au champ, chaque matin. C’est pour les préparer à être des femmes capables de tenir leurs foyers. Pourquoi doit-on refuser le mariage à nos filles quand l’occasion se présente ? Dans notre culture, chez les Mono, les filles doivent se marier», se justifie Francine, mère au foyer.
Certains parents ou responsables refusent même de payer les frais scolaires pour leurs filles afin de les contraindre à rester à la maison pour prendre soin de leurs petits-frères. Elles sont directement exposées au mariage précoce.
« Mon père est mort. Je suis venue chez mon oncle. Il ne veut plus me payer l’école. Quand je lui demande à propos de ma scolarité, il me répond qu’il n’a plus de moyens. Si j’avais les moyens, j’étudierai pour devenir docteur ou médecin », regrette Huguette, 15 ans.
Pour lutter contre la discrimination entre l’éducation des filles et celle des garçons, les enseignants et certains leaders de la société tentent de maintenir un dialogue avec les parents et les responsables afin de les sensibiliser sur l’importance de l’éducation des filles.
Auguy Mudiayi