La ville de Bujumbura (Burundi), plus précisément le Palais de Kiriri, accueille les 11 et 12 décembre 2025 la 4ᵉ édition du dialogue continental sur la jeunesse, la paix et la sécurité, sous le thème "au-delà des discours : l’autonomisation et l’engagement des jeunes dans le développement durable". Ces assises se tiennent sous la direction du chef de l’État burundais, Évariste Ndayishimiye, champion de l’Union africaine pour l’Agenda Jeunesse, Paix et Sécurité.
Ce grand rendez-vous annuel, qui réunit plusieurs jeunes venus de quatre coins du continent pour discuter du rôle central de la jeunesse dans l’avenir de l’Afrique, a servi de cadre au président Évariste Ndayishimiye pour dénoncer le double jeu de la communauté internationale envers l’Afrique. Le champion de l’UA pour l’Agenda Jeunesse, Paix et Sécurité dit mal digérer leur attitude face à l’agression dont est victime la RDC via la rébellion de l'AFC/M23 soutenue par le Rwanda mais aussi face à des conflits interminables.
" Sur la grande partie du continent africain, on n’entend pas le crépitement des armes, mais je dois vous avouer que la guerre d’aujourd’hui est plus subtile et plus complexe qu’on ne le pense. L’Afrique est l’objet de convoitises multiformes. Pour pouvoir mettre la main sur ses immenses richesses, les géants du monde attisent les feux et les conflits. Ils nous mènent une guerre de l’ombre : ils ne se laissent pas voir mais ils sont là, cachés, déguisés et nous distraits. Dans un tel contexte, des pays comme la RDC, juste à côté, peuvent se faire agresser et vivre des conflits interminables pendant que la communauté internationale regarde ailleurs alors que nos crises semblent inaudibles ", a dénoncé, dans son discours, Évariste Ndayishimiye.
Dans son intervention, il a également évoqué la situation au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Il a dénoncé la multiplication des coups d’État visant, selon lui, à installer des dirigeants au service des intérêts des puissances extérieures.
" Des pays comme le Mali, le Burkina Faso, le Niger et d’autres pays du Sahel peuvent se retrouver confrontés à l’insécurité jihadiste pendant des années, sans que la communauté internationale ou régionale n’intervienne pour rétablir l’ordre en guise de solidarité. Des soulèvements populaires éclatent dans des pays traditionnellement très paisibles, et à la fin l’on découvre finalement que l’argent destiné à l’aide au développement a servi à financer un changement de régime défavorable aux intérêts des puissants. Des leaders politiques, qui devraient pourtant contribuer au maintien de la paix et de la stabilité, deviennent des acteurs de destruction de leur propre pays pour raison de satisfaire leur ambition d’être au sommet de l’État ", a fustigé Évariste Ndayishimiye.
Ce discours de l'un des alliés de Félix Tshisekedi dans la région des Grands Lacs intervient dans un contexte où la ville d'Uvira, considérée comme stratégique dans le dispositif sécuritaire du gouvernement congolais dans la province du Sud-Kivu, est désormais passée sous le contrôle de la rébellion de l’AFC/M23 appuyée par le Rwanda, renforçant davantage son influence et sa mainmise dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. Il s’agit d’un verrou essentiel susceptible d’ouvrir la voie à l’AFC/M23 vers l’espace Grand Katanga, considéré comme le poumon économique du pays.
La détérioration de la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC a coïncidé avec l’entérinement des accords de Washington signés entre Kinshasa et Kigali sous les auspices des États-Unis d’Amérique. Alors que ces accords étaient censés valider et encourager le cessez-le-feu souhaité par les médiateurs et plusieurs partenaires de la RDC et du Rwanda, la situation s’est au contraire dégradée, marquée par des accusations mutuelles entre les deux États quant à la responsabilité de la détérioration de la situation sécuritaire actuelle.
Après l’occupation de Bukavu en février 2025, le gouvernement de Kinshasa avait désigné la Uvira comme siège provisoire des institutions dans les zones encore sous contrôle gouvernemental dans la province du Sud-Kivu. L’AFC/M23, soutenu par le Rwanda et son armée, ayant désormais pris le contrôle d’Uvira, inflige, selon le chef de la diplomatie burundaise, une "gifle " à Washington, seulement quelques jours après la signature des accords censés ramener la paix dans la région des Grands Lacs.
Clément MUAMBA